AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Americain express Daro voyages France, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 13 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section A), au profit de M. Christian X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ransac, Bouret, conseillers, M. Terrail, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Americain express Daro voyages France, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. X..., les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Lambert, salarié de la société American express et représentant du personnel, a été mis à la retraite le 30 juin 1991, en application de l'article 14 de la convention collective nationale des agences de voyages ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 13 novembre 1995), de l'avoir condamnée à payer une indemnité pour inobservation de la procédure spéciale de licenciement des salariés protégés, alors, selon le moyen, que le licenciement d'un salarié protégé est subordonné à une autorisation préalable de l'inspecteur du travail;
que, s'agissant de la mise à la retraite d'un salarié protégé, mode autonome de rupture du contrat de travail, l'employeur n'est pas tenu de respecter la procédure spéciale de licenciement, dès lors que les conditions légales de mise à la retraite du salarié sont appliquées;
qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 122-14-13, L. 412-18, L. 425-1, L. 436-1 et L. 514-2 du Code du travail ;
Mais attendu que la protection exceptionnelle et exorbitante du droit commun, instituée par le législateur au profit de salariés investis de fonctions représentatives, interdit à l'employeur de poursuivre par d'autres moyens la rupture du contrat de travail;
qu'il en est ainsi lorsque le salarié est mis à la retraite, même si les conditions posées par l'article L. 122-14-13 du Code du travail sont remplies;
que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Americain express Daro voyages France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Americain express Daro voyages France à payer à M. Lambert la somme de 12 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.