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06/05/1998 | FRANCE | N°95-43891

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 mai 1998, 95-43891


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Spado Lassailly, dont le siège est 64, faubourg La Bretonnière, 28320 Gallardon, en cassation d'un arrêt rendu le 27 juin 1995 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit de M. Pierre Y..., demeurant 4, place ..., défendeur à la cassation ;

M. Y... a déposé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancie

n faisant fonctions de président, M. Bouret, conseiller rapporteur, M. Ransac, conseill...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Spado Lassailly, dont le siège est 64, faubourg La Bretonnière, 28320 Gallardon, en cassation d'un arrêt rendu le 27 juin 1995 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), au profit de M. Pierre Y..., demeurant 4, place ..., défendeur à la cassation ;

M. Y... a déposé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bouret, conseiller rapporteur, M. Ransac, conseiller, Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire, M. Terrail, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Bouret, conseiller, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat de la société Spado Lassailly, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de La Varde, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur les deux moyens réunis du pourvoi principal :

Attendu que M. Y..., employé des sociétés La Cire laquée et Sodrog, devenues Spado Lassailly, a été licencié pour faute grave par lettre du 22 février 1984;

qu'à la demande de M. Y..., la société a énoncé les motifs de licenciement par lettre du 6 mars 1984 ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 27 juin 1995) de l'avoir condamnée à payer des sommes à titre d'indemnité de préavis, congés payés sur préavis et indemnité de licenciement, et de l'avoir déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour concurrence déloyale, alors, selon le moyen, en premier lieu, qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. X..., directeur commercial des sociétés Cires laquées et Sodrog, a été exceptionnellement autorisé à créer sa propre société de distribution (la société Soprofor) sous la double condition de ne pas concurrencer ses employeurs et de ne s'adresser qu'à une clientèle de particuliers;

qu'en l'espèce l'arrêt constate que le salarié, en totale méconnaissance de ses engagements, a développé l'activité de sa propre société et distribué des produits Soprofor, auprès de grossistes et de droguistes, tentant même, jusqu'à une date proche de son licenciement, d'accaparer au profit de la société Soprofor le marché des grossistes des DOM-TOM et de l'Afrique;

qu'ainsi, en écartant le grief de concurrence déloyale et la qualification de faute grave, qui en découlait, après avoir de surcroît relevé l'utilisation par le salarié, au profit de sa propre société, des moyens mis à sa disposition par ses employeurs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 121-1, L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail;

alors, en second lieu, que méconnaît gravement les obligations nées du contrat de travail, dans des conditions justifiant un licenciement immédiat et sans indemnité, le salarié qui abuse de ses fonctions pour s'attribuer ou tenter de s'attribuer des avantages particuliers;

qu'en l'espèce, l'arrêt a constaté que M. X... a attribué, à l'insu de ses employeurs, le marché du conditionnement des produits Cire laquée et Sodrog à une société Eurospray dans laquelle il avait des intérêts;

que l'intéressé a commandé pour son compte personnel, le 6 février 1984, différents produits en se faisant consentir une remise supérieure à celle habituellement accordée au personnel, avant d'annuler brusquement cette commande quelques jours avant sa convocation à l'entretien préalable à son licenciement;

qu'il a utilisé, au profit de sa propre société, les moyens matériels de ses employeurs;

qu'en écartant dans ces conditions la qualification de faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 121-1, L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail;

alors, en troisième lieu, que la cassation, qui ne manquera pas d'être prononcée sur la première branche du premier moyen de cassation, entraînera, par l'application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile et par voie de conséquence nécessaire, la cassation du chef de dispositif déboutant l'employeur de sa demande de dommages et intérêts pour concurrence déloyale ;

Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve, a constaté que l'activité concurrentielle reprochée à M. X... n'était pas établie;

qu'elle a pu décider que les reproches faits au salarié ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis, et ne constituaient pas une faute grave;

que le premier moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le rejet du premier moyen entraîne, par voie de conséquence, le rejet du second moyen ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que, suivant l'article L. 122-14-2 du Code du travail dans sa rédaction alors en vigueur, les juges ne peuvent retenir, pour justifier le licenciement, des griefs autres que ceux formulés dans la lettre de réponse à la demande d'énonciation des motifs de licenciement;

qu'en jugeant que constituaient une cause réelle et sérieuse du licenciement de M. X... des faits (avoir commercialisé des produits Sofronor auprès d'une clientèle autre que des particuliers, avoir changé le conditionnement de produits sans l'accord de sa direction, avoir parfois utilisé le secrétariat de l'employeur), que ne mentionnait pas la lettre en réponse de l'employeur en date du 6 mars 1984, intégralement reproduite par l'arrêt, la cour d'appel a violé ledit article ;

Mais attendu que les juges du fond, appréciant le sens et la portée des faits énoncés par l'employeur, dans sa lettre du 6 mars 1984, ont décidé, sans sortir des limites du litige fixées par cette énonciation des motifs et dans l'exercice du pouvoir qu'ils tiennent de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE tant le pourvoi incident que le pourvoi principal ;

Condamne la société Spado Lassailly aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Spado Lassailly ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 95-43891
Date de la décision : 06/05/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (11e chambre sociale), 27 juin 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 mai. 1998, pourvoi n°95-43891


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BOUBLI conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.43891
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