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29/04/1998 | FRANCE | N°98-80743

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 avril 1998, 98-80743


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Z..., contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AMIENS, du 23 janvier 1998, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de vo

ls aggravés, violences et dégradations volontaires, a confirmé l'ord...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SASSOUST, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Z..., contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AMIENS, du 23 janvier 1998, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de vols aggravés, violences et dégradations volontaires, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction rejetant sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 138 et suivants, 144 et suivants, 197, 198, 199, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre d'accusation a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction du 5 janvier 1998 qui a rejeté la demande de mise en liberté présentée par le requérant le 31 décembre 1997 ;
"aux motifs qu'entre septembre et fin décembre 1996, plusieurs importants cambriolages, dont les auteurs utilisaient des véhicules volés, étaient commis sur la circonscription d'Amiens ;
qu'une information judiciaire contre X était ouverte le 2 avril 1997 (...) ;
que des renseignements parvenus aux services de police désignaient plusieurs individus comme les auteurs de ces faits formant une bande à "géométrie variable" (...);
qu'étaient ainsi, dans le cadre de l'information, successivement interpellés MM. Y..., B..., C..., D... et E... (...);
que M. Z... était directement mis en cause par M. X... (D 406) comme lui ayant proposé, peu de temps après les cambriolages avec M.D..., des téléphones portables et parfums volés;
quant aux graves dégradations commises au restaurant "Le Cottage", elles apparaissent de fait dirigées contre l'ex-amie de M. Z..., Mme A..., elle-même nièce du tenancier de l'établissement (...);
que M. Z... conteste avoir participé à ces faits, même partiellement;
(...) que (selon lui) son innocence serait flagrante au vu des résultats d'une confrontation qui a eu lieu le 20 janvier 1998 (...) ;
qu'il soutient que sa détention excède le délai raisonnable prévu par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;
qu'il n'y a pas lieu de considérer, même après la confrontation évoquée, que les charges existant à l'encontre de M. Z... (...) sont devenues inexistantes;
qu'il y a lieu de constater également que, pour des faits de violence à l'encontre de sa compagne qui s'est rétractée, dans son témoignage à charge, M. Z... a été condamné par la cour d'appel d'Amiens à 8 mois d'emprisonnement ferme (un pourvoi étant en cours);
que les alibis fournis par M. Z... font l'objet de vérifications et d'auditions;
que M. Z... adopte une attitude de dénégation totale alors qu'existait, cependant, des charges contre lui;
que l'enquête se déroule dans des conditions difficiles puisque certains des co-mis en examen ont été longtemps en fuite et que d'autres témoins sont défaillants à leurs convocations;
que la procédure révèle des pressions manifestes (...);
que certains témoins expriment leurs craintes de représailles;
que le nombre des affaires, leur complexité, leur caractère perturbateur et spectaculaire, entraînent des investigations difficiles et variées;
que l'obligation de vérifier les alibis auprès des témoins qui ne défèrent pas entraîne objectivement une durée de détention, qui bien que certaine, ne présente pas actuellement un caractère déraisonnable;
(...) que (les faits) ont apportés à l'ordre public un trouble exceptionnel et persistant;
que le magistrat instructeur a indiqué que des investigations sur commission rogatoire étaient en cours;
que le délai prévisible de l'achèvement de la procédure était fixé au printemps ou été 1998;
que les obligations de contrôle judiciaire sont insuffisantes compte tenu des charges ci-dessus rappelées;
que le maintien en détention de M. Z... reste l'unique moyen d'apaiser le trouble exceptionnel et persistant porté à l'ordre public, d'éviter les possibilités de concertations frauduleuses entre co-mis en examen, des pressions sur les victimes et sur les témoins (arrêt p. 3 à 5) ;
"alors qu'en se déterminant de la sorte sans préciser, de façon préalable et complète, si et en quoi les obligations du contrôle judiciaire eussent elles-mêmes été insuffisantes, la chambre d'accusation a privé son arrêt de toute base légale ;
"alors qu'il incombe aux autorités judiciaires nationales de veiller à ce que la durée de la détention provisoire d'un "accusé" ne dépasse pas la limite du raisonnable;
qu'il leur fait examiner toutes les circonstances de nature à révéler ou écarter l'existence d'un véritable intérêt public justifiant, eu égard à la présomption d'innocence, une exception à la règle du respect de la liberté individuelle et d'en rendre compte dans leurs décisions relatives aux demandes d'élargissement ;
que si la persistance de raisons plausibles de soupçonner la personne arrêtée d'avoir accompli une infraction est une condition sine qua non de la régularité du maintien en détention, au bout d'un certain temps, elle ne suffit plus;
qu'il y a lieu alors de vérifier si les motifs avancés sont "pertinents" et "suffisants" et si les autorités compétentes ont apporté une "diligence particulière" à la poursuite de la procédure ;
qu'en s'abstenant, d'une part, de circonscrire précisément le champ de la suspicion susceptible de peser actuellement sur le requérant, d'autre part, d'établir le caractère pertinent et suffisant des motifs retenus pour écarter, après 9 mois de détention, une demande de liberté, enfin, de s'expliquer sur les carences de l'instruction dénoncées par la défense notamment sur la vérification d'un alibi, la chambre d'accusation a derechef privé son arrêt de toute base légale" ;
Attendu que M. Z..., mis en examen notamment pour vols aggravés, a été placé sous mandat de dépôt le 4 avril 1997;
qu'il a présenté une demande de mise en liberté, rejetée par le juge d'instruction le 5 janvier 1998 ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du magistrat instructeur, la chambre d'accusation énonce que la procédure révèle des pressions manifestes, exercées sur les témoins, qui craignent des représailles;
qu'elle ajoute qu'en dépit des dénégations de M. Z..., il existe des charges à son encontre;
qu'elle constate que l'intéressé a été condamné pour violences et que la détention provisoire est l'unique moyen d'apaiser le trouble exceptionnel et persistant porté à l'ordre public et d'éviter toute concertation frauduleuse entre les autres personnes mises en examen;
qu elle en déduit que les obligations du contrôle judiciaire sont insuffisantes ;
Attendu que les juges indiquent que l'enquête se déroule dans des conditions difficiles, eu égard à la défaillance de témoins régulièrement convoqués, que des investigations sont en cours pour vérifier des alibis, et que la gravité et la complexité des délits commis entraînent une durée de détention "qui ne présente pas actuellement un caractère déraisonnable" ;
que la chambre d'accusation précise que le délai prévisible d achèvement de la procédure est fixé au "printemps ou à l'été" 1998 ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de l'appréciation souveraine, par les juges du fond, du caractère raisonnable de la durée de la détention et de sa nécessité, la chambre d'accusation a justifié sa décision au regard tant des articles 144 et suivants du Code de procédure pénale que des articles 5 et 6 de la Convention européenne des Droits de l'homme ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Aldebert conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Sassoust conseiller rapporteur, MM. Mistral, Blondet, Mme Garnier, M. Ruyssen conseillers de la chambre, Mme Ferrari conseiller référendaire ;
Avocat général : M. le Foyer de Costil ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-80743
Date de la décision : 29/04/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 5.3 - Détention provisoire - Délai raisonnable - Pouvoir d'appréciation de la chambre d'accusation.


Références :

Décision attaquée : Chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens, 23 janvier 1998


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 avr. 1998, pourvoi n°98-80743


Composition du Tribunal
Président : Président : M. ALDEBERT conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:98.80743
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