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22/04/1998 | FRANCE | N°97-84522

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 avril 1998, 97-84522


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PIBOULEAU, les observations de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN et de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yavuz, contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, 3ème

chambre, en date du 23 juillet 1997, qui, pour infractions à la législation sur l...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller PIBOULEAU, les observations de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN et de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LUCAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yavuz, contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, en date du 23 juillet 1997, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants et importation en contrebande de marchandises prohibées, l'a condamné à 10 ans d'emprisonnement avec une période de sûreté égale aux deux tiers de la peine et maintien en détention, à l'interdiction définitive du territoire national et aux pénalités douanières ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 485, 591, 592 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué mentionne que lors de son prononcé le 23 juillet 1997 (cf p.1) la cour d'appel était composée de M. Albert, président, et de MM. Ors et Crabol, conseillers, et qu'à l'audience publique des débats du 16 juillet 1997 (cf p.12), cette même cour était composée de M. Albert, président, de Mme Z... et de M. Crabol, conseillers ;

"alors que les décisions des juridictions correctionnelles doivent être déclarées nulles lorsqu'elles sont rendues par des juges qui n'ont pas assisté à toutes les audiences de la cause;

que l'arrêt, qui fait état de la présence de M. Ors, conseiller, lors de son prononcé, alors que ce magistrat n'était pas présent lors des débats tenus en audience publique le 16 juillet 1997, est dès lors entaché d'une violation de l'article 592 du Code de procédure pénale" ;

Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les magistrats présents aux débats ont été les mêmes que ceux qui ont délibéré et qu'il a été donné lecture de la décision par l'un d'eux conformément à l'article 485 du Code de procédure pénale;

qu'ainsi, l'arrêt attaqué n'encourt pas le grief allégué ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er et suivants de l'ordonnance du 2 novembre 1945, 414, 435 du Code des douanes, L.627 du Code de la santé publique, 58 de l'ancien Code pénal, 132-19, 132-24 du nouveau Code pénal, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a reconnu Yavuz X... coupable de diverses infractions à la législation sur les produits stupéfiants et l'a condamné a une peine de dix ans d'emprisonnement ferme assortie d'une période de sûreté pour les deux tiers de cette peine et a prononcé à son encontre l'interdiction définitive du territoire national ainsi qu'au paiement conjoint et solidaire avec ses coprévenus de diverses sommes au titre des infractions commises en violation de la législation douanière ;

"aux motifs que sur l'action publique, le 19 décembre 1995 à 22 heures 40 au péage de Virsac (33), un véhicule de location de marque Fiat type Tempra immatriculé en Belgique avec deux occupants à bord forçait un barrage mis en place par les fonctionnaires du service des Douanes qui les prenaient immédiatement en chasse;

que rapidement rejoint le véhicule était immobilisé, mais les douaniers réussissaient à retrouver un paquet que les fuyards avaient jeté par la fenêtre de la voiture au cours de leur fuite et qui s'avérait contenir prés de 400 grammes d'héroïne d'une pureté remarquable (D 128 et D 129) ;

que l'enquête qui se développait alors à la suite de l'interpellation de ces deux malfaiteurs résidant en Belgique, mais d'origine turque, permettait de démanteler une filière qui comptait certainement parmi les plus importantes sources d'approvisionnement en héroïne du marché bordelais et qui témoignait de l'emprise de ce marché par certains membres de la communauté gitane opérant notamment à partir du camp de Labarde;

qu'elle permettait également de s'apercevoir que même depuis le fond de leur cellule, certains trafiquants de drogue continuaient à organiser des livraisons internationales de drogue;

que les policiers mettaient en cause neuf personnes impliquées à un titre ou à un autre dans cette affaire;

que l'on pouvait distinguer dans cette affaire trois filières différentes;

que deux livraisons d'héroïne ont été assurées par Adlan X... accompagné lors de la seconde par Celik Demo à destination de Carmen A..., sur l'initiative de son mari Gregorio B..., qui ont été rendues possibles grâce à l'intervention de Yavuz X..., frère du premier nommé;

que deux livraisons d'héroïne ont été successivement effectuées à Rochefort, auprès de Y... Mekki, puis à la Rochelle, auprès de Nadia D..., toujours par Adlan X..., grâce encore à I'intervention de son frère Yavuz X... toujours détenu au centre de détention de Neuvic;

que Yavuz X... a reconnu qu'au cours de l'été 1995, alors qu'il se trouvait incarcéré à Neuvic pour purger une peine d'emprisonnement pour l'importation en France de 140 grammes d'héroïne il avait été contacté par Gregorio B... qui purgeait une peine pour des faits de même nature;

que grâce aux renseignements fournis par Gregorio B..., il était parvenu à mettre en contact l'amie de celui-ci et son frère Adlan X..., que ce dernier avait alors fourni à Carmen A... 500 grammes d'héroïne;

que cette livraison était destinée à lui permettre de payer les amendes douanières;

que même s'il nie être intervenu dans la deuxième livraison, sa participation active à celle-ci est reconnue non seulement par Adlan X..., mais surtout par son coïnculpé Gregorio B...;

qu'il a admis avoir servi d'intermédiaire entre un codétenu et le nommé Y... Mekki demeurant à Rochefort pour permettre à son frère de livrer ce dernier en héroïne;

que ces précisions données (cote D. 171) n'ont pu être inventées;

que pour la livraison à Nadia C..., il est certes revenu sur ses premières déclarations dans lesquelles il reconnaissait son rôle;

que toutefois la réalité de la livraison a été admise par Nadia C... et le rôle de Yavuz X... précisé par Gregorio B... ;

"1 - alors qu'en ne précisant pas si Yavuz X... avait été précédemment condamné à des peines prononcées par des jugements revêtant un caractère contradictoire, pour le déclarer en état de récidive légale du chef de plusieurs infractions à la législation sur les produits stupéfiants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;

"2 - alors qu'il ressort des propres énonciations de l'arrêt attaqué que Yavuz X... a toujours nié sa participation à une seconde livraison d'héroïne organisée depuis sa cellule, alors qu'il était en détention;

qu'en s'abstenant dès lors de toute précision, autrement que par les déclarations d'autres coprévenus, sur les conditions d'organisation d'un tel trafic en pareille circonstance, la cour d'appel n'a pas caractérisé les éléments constitutifs de cette infraction et privé sa décision de base légale ;

"3 - alors qu'en s'abstenant de toute précision sur la situation administrative de Yavuz X... au regard de la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers sur le sol national, la cour d'appel, qui a prononcé à l'encontre du prévenu une peine d'interdiction définitive de paraître sur le territoire français, a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;

"4 - alors que tout jugement ou arrêt se doit de justifier dans ses motifs des aspects de la personnalité du prévenu pour le condamner à une peine d'emprisonnement ferme;

qu'en s'abstenant de toute précision à cet égard, pour condamner Yavuz X... à une lourde peine de dix ans d'emprisonnement ferme assortie d'une période de sûreté pour les deux tiers de cette peine, la cour d'appel a méconnu le principe de la personnalisation des peines en violation des textes précités au moyen" ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Yavuz X..., alors qu'il était incarcéré en exécution d'une peine de 3 ans d'emprisonnement prononcée pour importation de stupéfiants, a servi d'intermédiaire entre certains de ses codétenus et son frère Adlan X... pour permettre à ce dernier d'approvisionner en héroïne des tiers se livrant au trafic de stupéfiants;

qu'il a ainsi mis en relation Adlan X... avec la femme d'un de ses codétenus, Carmen A..., pour fournir à cette dernière plusieurs quantités d'héroïne;

qu'en dépit de ses dénégations, les juges ont retenu qu'il avait pris part à toutes les livraisons effectuées au profit de cette dernière ;

Que le moyen, qui dans sa deuxième branche, se borne à remettre en question leur appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause ainsi que la valeur des preuves contradictoirement débattues, ne peut être accueilli ;

Attendu que, pour condamner Yavuz X... du chef de complicité d'importation, détention, offre et cession de stupéfiants, à 10 ans d'emprisonnement, avec une mesure de sûreté pour les deux tiers et maintien en détention, ainsi qu'à l'interdiction définitive du territoire national, la cour d'appel énonce que lesdites peines sont suffisamment dissuasives pendant une certaine période pour mettre fin à sa dangerosité avérée de trafiquant de drogue professionnel, qui n'hésite pas, malgré les sanctions dont il a déjà été l'objet, à organiser des livraisons de stupéfiants à partir d'un lieu de détention ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui répondent aux exigences des articles 132-19 et 132-24 du Code pénal, dès lors qu'il n'a pas été fait application de l'aggravation de peine prévue à l'article 132-9 du Code pénal en cas de récidive, et qu'eu égard à la nationalité étrangère de l'intéressé, relevée par les juges, ceux-ci étaient autorisés, en application des dispositions de l'article 222-48 du Code pénal, à prononcer l'interdiction définitive du territoire français sans être tenu de mieux s'en expliquer, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen pris en ses autres branches ne peut être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Roman conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Pibouleau conseiller rapporteur, MM. Challe, Blondet, Ruyssen, Roger conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Soulard conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Lucas ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-84522
Date de la décision : 22/04/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 23 juillet 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 avr. 1998, pourvoi n°97-84522


Composition du Tribunal
Président : Président : M. ROMAN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.84522
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