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01/04/1998 | FRANCE | N°97-83051

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 avril 1998, 97-83051


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller C..., les observations de Me BOULLEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de Z... ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yves, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, du 24 avril 1997, qui, pour vol, exécution d'un travail clandestin et exploitation d'une carriè

re sans autorisation, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec s...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le premier avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller C..., les observations de Me BOULLEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de Z... ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yves, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, du 24 avril 1997, qui, pour vol, exécution d'un travail clandestin et exploitation d'une carrière sans autorisation, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec sursis et mise à l'épreuve, à 5 ans d'interdiction d'activité professionnelle et des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10, L. 362-3, L. 143-3, L. 143-5 et L. 620-3 du Code du travail et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré un employeur coupable de délit d'exécution de travail clandestin ;

"aux motifs que "Yves X... n'a aucunement justifié de la tenue d'un registre de paies, ni de la déclaration préalable à l'embauche de Pierre E... et Ange D... à l'Urssaf;

que Gislaine Y... a, elle-même, précisé que, concernant Pierre E... et Ange D... elle n'avait pas établi de déclaration d'embauche;

qu'en sa qualité de chef d'entreprise et compte tenu au surcroît de sa formation professionnelle, il ne pouvait ignorer son obligation;

qu'il s'ensuit qu'il s'est bien soustrait intentionnellement à l'une des obligations prévues par l'article L. 324-10 du Code du travail, à savoir procéder aux déclarations exigées par les organismes de protection sociale" ;

"alors que, d'une part, la négligence par l'employeur de la formalité de déclaration préalable à l'embauche n'est pas constitutive de délit d'exécution de travail clandestin, dès lors que deux parmi les autres formalités obligatoires énoncées à l'article L. 324-10, 3° ont été respectées;

qu'en l'espèce, la cour d'appel qui relève que les dispositions de l'article L. 143-3 du Code du travail exigeant la remise par l'employeur d'un bulletin de paie au salarié lors du paiement de sa rémunération ont été respectées et que Gislaine Y... a affirmé qu'elle détenait le registre du personnel, et qui constate ainsi le respect de deux des formalités obligatoires énoncées par l'article L. 324-10, 3°, n'a pas en déclarant le demandeur coupable du délit d'exécution de travail clandestin, déduit de ses constatations les conséquences légales au regard des textes visés au moyen ;

"alors que, d'autre part, la Cour qui constate expressément que le demandeur a adressé à l'Urssaf la "DADS 1994", ne déduit pas de ses constatations les conséquences légales au regard de l'article L. 324-10 du Code du travail, en estimant que le demandeur a volontairement omis de procéder aux déclarations exigées par les organismes de protection sociale ;

"alors qu'enfin, le non-respect des obligations énoncées par l'article L. 324-10 du Code du travail doit être volontaire, le délit d'exécution de travail clandestin étant une infraction intentionnelle ;

qu'en l'espèce, la cour d'appel qui relève que le demandeur ne pouvait ignorer ces obligations statue par des motifs dubitatifs ne caractérisant pas la volonté du demandeur de se soustraire intentionnellement à ses obligations, et ne donne pas de base légale à sa décision au regard des textes visés au moyen" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 106 et 142, alinéa 1er, du Code minier et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable de mise en exploitation d'une carrière (D n° 899-D n° 1033) au Ledat sans autorisation et en répression, l'a condamné à 2 ans de prison, dont 18 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans et aux réparations civiles ;

"aux motifs que "le juge commissaire de la liquidation judiciaire de la SARL Saetpi, par ordonnance du 26 janvier 1993, avait autorisé la cession du droit d'extraire dont ladite société était titulaire à la SCI Ottawa, moyennant le prix de 100 000 francs payable comptant;

que cependant, ladite cession n'avait encore fait l'objet d'aucun acte notarié et la somme de 100 000 francs n'avait pas encore été payée en totalité lorsque Me A... a été entendu le 29 mars 1995, puisque celui-ci avait alors déclaré : "à ma connaissance et à la réflexion, aucun acte notarié n'a été signé concernant la vente du droit de forage (...), j'ai, cependant, à force de réclamations multiples obtenu un paiement partiel de la SCI Ottawa qui s'était portée acquéreur du droit de forage dont le montant s'élevait à 40 000 francs réparti en quatre versements de 10 000 francs... ;

"qu'ainsi, du moins, pour la date incriminée du 13 juin 1994, il n'est pas établi de manière certaine que la SCI était titulaire du droit de forage de la SARL Saetpi ;

"qu'en tout état de cause, la SCI Ottawa ne pouvait se prévaloir de l'autorisation accordée par "arrêt préfectoral du 6 octobre 1988 à la SARL Saepti d'exploiter la carrière dont s'agit ;

"qu'en effet, ladite carrière a cessé d'être exploitée entre la fin de l'année 1989, époque à laquelle les sociétés Saetpi et Ceri on été mises en liquidation judiciaire, et le début de l'année 1993, époque à laquelle Yves X..., puis la société Ottawa, ont repris ladite exploitation;

que ladite autorisation était donc périmée à la fin de l'année 1992, le délai de trois ans prévu par l'article 106 du Code minier, applicable à cette époque, étant dépassé;

que ce défaut d'exploitation est confirmé par les deux lettres du 9 août 1990 et 27 avril 1991 susvisées du maire de Ledat adressées au préfet;

qu'en application, des dispositions de l'article 30 (II) de la loi du 4 janvier 1993, seules les carrières en situation régulière relativement aux dispositions de l'article 106 du Code minier pouvaient continuer à être exploitées dans le respect des prescriptions qui leur étaient applicables antérieurement à la date d'entrée en vigueur de ladite loi (soit antérieurement au 12 juin 1994) ;

"qu'ainsi, la SCI Ottawa ne pouvait reprendre l'exploitation de cette carrière qu'après nouvelle autorisation;

qu'elle n'a jamais sollicité une telle autorisation, se bornant à se prévaloir du droit de forage prétendument acquis à la SARL Saetpi" ;

"alors que, d'une part, la cour d'appel constate l'existence d'un paiement partiel du droit de forage acquis par la SCI Ottawa suite à l'ordonnance du 26 janvier 1993 du juge-commissaire qui avait autorisé la cession à la SCI Ottawa du droit d'extraire dont était titulaire la SARL Saepti, ce qui impliquait nécessairement une mise en exploitation de la carrière régulière au regard des dispositions de l'article 106 du Code minier;

que la cour d'appel qui estime cependant que la SCI Ottawa ne pouvait reprendre l'exploitation de la carrière D n° 899 et D n°1033 qu'après une nouvelle autorisation qu'elle n'a pas sollicitée, et qui déclare le demandeur coupable de mise en exploitation d'une carrière sans autorisation, viole les textes visés au moyen ;

"alors que, d'autre part, le délit de mise en exploitation d'une carrière sans autorisation suppose caractérisé l'élément intentionnel, c'est-à-dire la volonté de l'exploitant à se soustraire à toute autorisation;

que la cour d'appel qui relève que le demandeur ne pouvait ignorer l'illégalité de la situation, ne caractérise pas la volonté de ce dernier d'exploiter sans autorisation et statue par des motifs dubitatifs, violant les textes visés au moyen" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 106 et 142, alinéa 1er, du Code minier, 10 de la loi du 3 janvier 1992 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable de mise en exploitation de la carrière (lieu-dit Menottes) sans autorisation préfectorale, et en répression l'a condamné à la peine de 2 ans d'emprisonnement et aux réparations civiles ;

"aux motifs que "ainsi les travaux effectués sur ce site étaient soumis, à compter du 12 juin 1994, à autorisation au titre de la législation relative aux installations classées, étant rappelé que les matériaux extraits ont été utilisés à des fins autres (construction d'une rocade) que la réalisation de l'ouvrage (lac d'agrément), que leur tonnage était supérieur à 2 000 tonnes et la superficie d'affouillement supérieure à 1 000 m ;

"que les travaux d'extraction ont été effectués par l'entreprise Tracer, c'est-à-dire par Yves X...;

qu'en effet, dans le procès-verbal susvisé, il a été précisé que Pierre E... conduisait sur les lieux le 6 juillet 1994 une pelle sur chenille de marque internationale et avait déclaré être salarié de la société Tracer et extraire du matériau pour le chantier de la déviation Nord de Villeneuve-sur-Lot;

qu'en outre, Jean-François B..., chef d'agence de la société Cochery Bourdin Chausse a expliqué qu'au mois de juin 1994, Yves X..., "responsable de la société Traver", l'avait contacté personnellement pour lui offrir ses services, à savoir vente de fournitures et chargements de remblais pour la rocade de Villeneuve-sur-Lot, lui indiquant que le terrain pour s'approvisionner en terre se trouvait sur le CD 911 au lieu-dit "Menottes" commune de Villeneuve-sur-Lot;

que B... a ajouté qu'Yves X... employait des ouvriers qui extrayaient eux-mêmes les matériaux et chargeaient les camions de l'entreprise Cochery Bourdin Chausse ;

"enfin que, contrairement aux allégations d'Yves X..., les lieux n'étaient pas remis en état au mois d'avril 1994, puisque des travaux d'extraction ont été constatés le 6 juillet 1994, soit postérieurement" ;

"alors que, la cour d'appel ne pouvait constater que l'article 10 de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau écarte les installations classées de son champ d'application et qu'une déclaration de travaux était seulement nécessaire dans ce cadre et estimer cependant que les travaux effectués pour la réalisation d'un lac d'agrément étaient soumis à autorisation au titre de la législation relative aux installations classées;

qu'en déclarant le demandeur coupable d'exploitation d'une carrière sans autorisation préalable, la Cour viole les textes visés au moyen" ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 311-1 et 311-3 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le demandeur coupable de vol de grave provenant de la parcelle n° 1033 ;

"aux motifs que "n'est aucunement rapportée la preuve de ce que la SCI Ottawa était devenue, au moment des faits, propriétaire de ladite parcelle ;

"qu'en effet, en premier lieu, l'acte sous-seing privé du 7 juillet 1994 prévoyait que l'acquéreur aurait la jouissance de ladite parcelle "par la prise de possession réelle et effective à compter de la signature de l'acte authentique";

que ledit acte n'a jamais été signé, ainsi qu'il l'a été précisé dans le rappel liminaire des faits ;

"en outre, que ledit acte prévoyait que la vente était consentie et acceptée moyennant le prix de 138 404 francs HT, TVA à charge de l'acquéreur, payable : 50 000 francs à la signature de l'acte authentique et 12 mensualités de 7 367 francs, première mensualité à échéance du 27 août 1994, alors que la délibération postérieure du conseil municipal du 8 juillet 1994 a fixé un prix de 131 314 francs TTC (110 720 francs HT et 20 594 francs au titre de la TVA à 18,60%), payable comptant à la signature de l'acte authentique, de sorte qu'il n'existe pas d'accord sur le prix et les modalités de paiement ;

"qu'enfin, qu'à ce jour, aucun prix n'a été payé à la commune du Ledat ;

"qu'ainsi, faute de faits ou de titres donnant un fondement à la prétention des prévenus, il y a lieu de constater que le transfert de propriété n'avait pas été opéré entre juillet 1994 et janvier 1995 et que la commune du Ledat demeurait toujours propriétaire de cette parcelle;

Yves X... ignorait d'autant moins cette réalité juridique qu'il était le signataire de l'acte susvisé pour le compte de la SCI Ottawa" ;

"alors que, d'une part, le vol suppose la soustraction frauduleuse de la chose d'autrui et implique l'appréhension de celle-ci contre le gré du propriétaire;

qu'en l'espèce, la cour d'appel constate que le conseil municipal avait consenti de vendre la parcelle n° 1033 au demandeur pour le compte de la SCI Ottawa qui avait acquis par l'ordonnance du juge-commissaire du 26 janvier 1993 le droit d'extraire la grave de ce terrain, ce dont il résultait que l'extraction de la grave par le demandeur ne constituait pas une soustraction contre le gré du propriétaire;

que la cour d'appel qui déclare le demandeur coupable de vol de grave sur la parcelle n°1033 viole les textes visés au moyen ;

"alors que, d'autre part, la décision qui condamne un prévenu pour vol doit constater le caractère frauduleux de la soustraction;

qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui se borne à constater que le demandeur a matériellement participé à l'appréhension frauduleuse de la grave sur la parcelle n°1033 sans caractériser le caractère frauduleux de cette appréhension, ne donne pas de base légale à sa décision au regard des textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué, incomplètement reproduites aux moyens, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous les éléments constitutifs, y compris intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui remettent en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Roman conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Mistral conseiller rapporteur, MM. Aldebert, Grapinet, Blondet, Mme Garnier, M. Ruyssen conseillers de la chambre, M. Sassoust conseiller référendaire ;

Avocat général : M. de Gouttes ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-83051
Date de la décision : 01/04/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, 24 avril 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 avr. 1998, pourvoi n°97-83051


Composition du Tribunal
Président : Président : M. ROMAN conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.83051
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