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01/04/1998 | FRANCE | N°96-40146

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 avril 1998, 96-40146


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Alcatel TITN Answare, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 9 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Albéric A..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 février 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, M. Bouret, conseiller

, Mme Pams-Tatu, Mlle Barberot, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat g...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Alcatel TITN Answare, société anonyme, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 9 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), au profit de M. Albéric A..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 février 1998, où étaient présents : M. Boubli, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, M. Bouret, conseiller, Mme Pams-Tatu, Mlle Barberot, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société Alcatel TITN Answare, de Me Choucroy, avocat de M. A..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. A... a été engagé le 14 août 1990 en qualité de directeur commercial par la société RAD International, alors en cours de constitution, dont il a été nommé administrateur et président du conseil d'administration;

que, le 12 juin 1992, la société RAD International a cédé à la société Alcatel Titn Answare (ATA), à compter du 1er juin, ses activités de conseil, distribution de produits et ingénierie;

qu'un pré-protocole signé par les parties le 21 avril 1992 avait précisé les modalités de la poursuite de contrat de travail de M. A... au sein de la société ATA et avait prévu en son article 7 une clause d'exclusivité;

qu'un avenant du 7 mai 1992, complétant l'article 7 du pré-protocole précité, l'a autorisé à conserver parallèlement ses fonctions d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société RAD International et a constaté son engagement à ne pas utiliser au détriment de la société ATA et au profit de la société RAD International les informations ou les relations commerciales dont il aurait connaissance ou qu'il aurait liées en tant que salarié de la société ATA;

que M. A... a été licencié le 2 octobre pour faute grave ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société ATA fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 9 novembre 1995) d'avoir décidé que M. A... n'avait pas commis une faute grave mais que son comportement constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement, alors, selon le moyen, d'une part, que la lettre de licenciement adressée au salarié indiquait notamment :

"Vous avez consacré une partie de vos activités de directeur-technique de l'activité migration de base de données à la société RAD International, notamment en utilisant du personnel et des moyens D'alcatel Titn Answare, ce qui entraîne une confusion entre vos fonctions au sein D'alcatel Titn Answare et votre mandat au sein de RAD International, confusion caractérisant une violation de votre obligation de loyauté vis-à-vis D'alcatel Titn Answare, rendant impossible la poursuite normale de votre contrat de travail";

que viole les articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail l'arrêt qui, constatant l'existence de courriers à en-tête de RAD International et dactylographiés par des secrétaire d'ATA et le fait que six d'entre eux portaient le nom de M. A..., écarte ces éléments au motif que l'employeur n'en fait pas état dans la lettre de licenciement;

alors, d'autre part, que M. A... avait été engagé par ATA à compter du 1er juin 1992 et licencié par lettre du 2 octobre 1992, à la suité d'une procédure commencée début septembre 1992;

qu'ayant constaté que l'utilisation du personnel et des moyens de l'employeur par le salarié au profit de RAD International était établie pour les mois de juin et juillet 1992, soit pour les deux tiers du temps d'exécution du contrat de travail de l'intéressé au service de l'employeur avant l'engagement de la procédure de licenciement, ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail, l'arrêt qui écarte la qualification de faute grave au motif qu'il n'était pas démontré que ces comportements se fussent poursuivis au-delà d'une période transitoire après la cession par RAD International de partie de son fonds de commerce à ATA;

et alors, enfin, que dans son attestation, M. Y..., salarié d'ATA, certifiait avoir participé à la demande de M. Z..., associé de M. A... dans RAD International, à l'installation d'un progiciel de RAD International chez un client de cette dernière pendant quatre jours au cours de la deuxième quinzaine de juillet 1992 et n'avoir pas fait figurer cette mission dans son rapport d'activité à la demande de M. A...;

que dans son attestation, Mlle B..., salariée d'ATA, certifiait avoir frappé du courrier à en-tête de RAD International pendant ses heures de travail sur l'ordre de M. A... depuis le mois de juin 1992 et avoir remis à M. A... à son retour de vacances la copie d'un rapport à en-tête de RAD International, et confirmait la mission effectuée par M. Y... pour un client de RAD International;

que dans son attestation, M. X..., salarié d'ATA, confirmait également la mission effectuée par M. Y... pour un client de RAD International et certifiait qu'il était fréquent de recevoir des appels du Brésil et de New-York, ainsi que des fax de personnes se réclamant de la société Consist et demandant M. A..., lequel demandait à son tour à M. Y... des informations techniques concernant la progiciel Consist de RAD International, et cela pendant les heures de bureau;

qu'en l'état de ces faits ainsi établis, ne justifie pas légalement sa décision au regard des articles L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail, l'arrêt qui écarte la qualification de faute grave au motif que lesdites attestations n'auraient mis qu'indirectement en cause M. A... ;

Mais attendu que la cour d'appel, s'en tenant aux griefs allégués par l'employeur dans la lettre de licenciement, laquelle lettre fixe les limites du litige et appréciant les éléments de fait et de preuve, a constaté qu'il n'était pas démontré que les faits imputés au salarié, dont elle a fait ressortir qu'ils avaient été commis aux mois de juin et de juillet 1992, s'étaient poursuivis au-delà d'une période transitoire ayant suivi la cession, le 12 juin 1992, de certaines des activités de la société RAD International à la société ATA;

qu'elle a, dès lors, pu décider que le comportement du salarié n'était pas de nature à rendre impossible le maintien de l'intéressé dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ne constituait pas une faute grave;

que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt d'avoir condamné l'employeur à payer à son ancien salarié des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, outre une somme en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors, selon le moyen, d'une part, qu'ayant admis la cause réelle et sérieuse de son licenciement, l'intéressé demandait à la cour d'appel, dans ses conclusions d'appel, le paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral, en raison des conditions soi-disant vexatoires de son licenciement (interdiction d'accès de son bureau, fouille de ce bureau et de documents personnels, mise à pied verbale);

qu'il s'ensuit que méconnaît les termes du litige et viole les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt qui condamne la société ATA à lui payer des dommages-intérêts pour réparer le préjudice par lui subi du fait de la perte de son emploi peu de temps après la cession de partie du fonds de commerce de la société RAD International à la société ATA, aux motifs que "la survie de la relation contractuelle de travail constitua nécessairement pour Albéric A... une condition essentielle de la cession du fonds de commerce qu'il avait créé;

qu'à la date du licenciement, la société ATA ne disposait manifestement pas, compte tenu des termes de la lettre de licenciement, d'éléments suffisants quant à la façon dont Albéric A... exerçait ses doubles fonctions de directeur technique auprès d'elle et d'administrateur de la société RAD International, situation qu'elle avait pourtant acceptée au préalable;

que le revirement brutal dans de telles conditions de la situation d'Albéric A... alors que s'achevait à peine une période, somme toute, transitoire, a occasionné à celui-ci un préjudice" ;

alors, d'autre part, qu'ayant constaté que M. A... ne contestait plus l'existence d'une cause réelle et sérieuse de son licenciement, se contredit dans ses explications et viole tant les dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile que celles de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, l'arrêt qui condamne néanmoins la société ATA à lui payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice par lui subi du fait de la perte de son emploi peu de temps après la cession par la société RAD International de partie de son fonds de commerce à la société ATA;

et alors, enfin, qu'ayant admis que le licenciement de M. A... était justifié par une cause réelle et sérieuse, se contredit dans ses explications, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt qui condamne la société ATA à lui payer des dommages-intérêts, au motif qu'à la date du licenciement la société ne disposait manifestement pas d'éléments suffisants pour justifier cette mesure ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a fait ressortir que la rupture était intervenue dans des conditions vexatoires eu égard aux fonctions exercées par l'intéressé a légalement justifié sa décision;

que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Alcatel TITN Answare aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-40146
Date de la décision : 01/04/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (18e chambre, section E), 09 novembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 avr. 1998, pourvoi n°96-40146


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BOUBLI conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.40146
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