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05/03/1998 | FRANCE | N°96-86209

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 mars 1998, 96-86209


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Georges, contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANCON, chambre correctionnelle, en date du 22 octobre 1996, qui, pour abus de biens sociaux et escroquerie, l'a

condamné à 3 ans d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francs d'amende et 5 an...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Georges, contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANCON, chambre correctionnelle, en date du 22 octobre 1996, qui, pour abus de biens sociaux et escroquerie, l'a condamné à 3 ans d'emprisonnement avec sursis, 50 000 francs d'amende et 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 114, 385, 593 et 802 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'instruction soulevée par Georges X..., avant toute défense au fond ;

"aux motifs que Georges X... soulève la nullité de l'instruction en application de l'article 114 du Code de procédure pénale, au prétexte qu'il n'a pas été entendu sur les faits d'escroquerie;

qu'une telle demande de nullité doit impérativement être soulevée "in limine litis";

que ce moyen n'ayant pas été invoqué devant les premiers juges, il ne peut être examiné devant la Cour ;

"alors que nul ne peut être jugé sans avoir été entendu au cours de l'instruction sur les faits qui lui sont reprochés;

qu'en l'espèce, il résulte des pièces de la procédure que le prévenu a, devant le tribunal, avant toute défense au fond, soutenu qu'il n'a jamais été amené à s'expliquer sur le délit d'escroquerie, objet du réquisitoire définitif;

qu'en refusant d'examiner ce moyen de nullité repris devant la Cour, alors qu'il n'a jamais été entendu du chef d'escroquerie, la Cour a dénaturé les documents de la cause et méconnu les dispositions imposées à peine de nullité par l'article 114 du Code de procédure pénale" ;

Attendu que, renvoyé devant le tribunal correctionnel par une ordonnance du juge d'instruction en date du 30 août 1995, Georges X... a excipé de la nullité de la procédure, au motif qu'il n'aurait pas été entendu, au cours de l'information, sur le délit d'escroquerie ;

Attendu que, pour déclarer cette exception irrecevable, les juges du second degré énoncent qu'elle n'a pas été invoquée devant les premiers juges ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors, en outre, qu'en vertu de l'article 179, dernier alinéa, du Code de procédure pénale, l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel couvre, s'il en existe, tous les vices de la procédure antérieure, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'ainsi le moyen, qui reprend la même exception devant la Cour de Cassation, est irrecevable ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 ancien du Code pénal, 313-1 du nouveau Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse aux conclusions, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit d'escroquerie ;

"aux motifs que Georges X..., dirigeant de droit ou de fait des sociétés installées dans le local mis à la disposition de SAB 3 Services (SBAM - SODEXFRAME - SOGESSER), ne pouvait ignorer que toutes ces entreprises ne réglaient pas de loyer en raison d'un manque de moyens financiers ;

"que la SCI "les Marinières" (au capital insignifiant de 6 000 francs), qui ne percevait aucun loyer de ses quatre sociétés locataires, ne pouvait donc pas faire face au coût du crédit-bail consenti par UCEF;

que, du reste, par ordonnance du 10 septembre 1989 rendue par le tribunal de grande instance de Besançon, tous les occupants, c'est-à-dire toutes les sociétés du groupe X..., étaient condamnées à vider les lieux ;

"que malgré cela, Georges X... proposa aux responsables de la SAB 3 Services d'ouvrir un magasin dans les locaux dont la SCI "les Marinières" allait être expulsée ;

"que Georges X... ne saurait sérieusement renverser les rôles et rejeter sur la société B 3 Services la responsabilité de cette situation créée en toute connaissance de cause par lui-même ;

"qu'il est également amplement démontré qu'à aucun moment Georges X... n'a été en mesure de satisfaire à ses promesses de trouver un emprunt de 1 600 000 francs et à fournir un apport de 520 000 francs par compte courant d'associé;

qu'ainsi, le prévenu a monté une escroquerie au détriment de SAB 3 Services et au profit de lui-même et du groupe de sociétés qu'il dirigeait ;

"alors que l'escroquerie suppose l'emploi de manoeuvres frauduleuses et l'intention coupable;

que la cour d'appel, qui s'est bornée à affirmer la culpabilité du prévenu, sans répondre aux conclusions d'appel du demandeur soulignant qu'aucune manoeuvre n'est établie à sa charge, la société B 3 Services d'envergure nationale, n'ayant jamais jugé nécessaire de procéder à la moindre vérification du titre d'occupation de la SCI "les Marinières";

que les dirigeants de la société B 3 n'ont pas attendu d'avoir obtenu la confirmation écrite ou l'accord de la BPFC pour financer à hauteur d'un million de francs le démarrage de la Société Française de Bricolage;

qu'en outre, en ce qui concerne la résiliation du crédit-bail consenti à la SCI "les Marinières", il n'a pas été justifié du caractère exécutoire de l'ordonnance ayant prononcé l'expulsion;

que, de plus, le crédit-bailleur n'était pas opposé à une solution amiable consistant dans la vente du bâtiment à la SCI "les Marinières", et que celle-ci avait obtenu un accord de financement auprès de l'UCB;

qu'enfin, l'apport en compte courant de la somme de 520 000 francs dans la future société manque en fait, cet apport ne devant pas se réaliser lors de la constitution de la Société Française de Bricolage, mais ultérieurement;

qu'en tout état de cause, l'intention délictuelle fait totalement défaut" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 425-4 de la loi du 24 juillet 1966, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse aux conclusions, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de biens sociaux ;

"aux motifs que l'information a permis d'établir :

- qu'au 28 février 1990, le compte courant de Georges X... dans les livres de la société SODEXFRAME était débiteur de 10 093 francs ;

- que le compte ouvert à Georges X... dans les livres de la SARL SBAM était débiteur de la somme de 7 540 francs ;

"que l'élément matériel de cette infraction formelle est incontestablement constitué ;

"que les premiers juges ont très complètement analysé les pratiques de Georges X..., agissant comme gérant de droit ou de fait, lequel faisait fi des obligations légales pour maintenir en vie artificiellement des sociétés pour sauvegarder ses salaires et ceux de ses proches ;

"que durant l'information, Georges X... avait tout loisir de demander des investigations comptables supplémentaires, et que sa demande de complément d'information est aujourd'hui tardive et sans intérêts ;

"que Georges X... se livre à des supputations et imagine des créances afin de transformer les comptes débiteurs litigieux en comptes créditeurs;

que ce procédé ne saurait être retenu par la Cour ;

"que le délit reproché à Georges X... est caractérisé dans tous ses éléments ;

"1° - alors que, d'une part, l'abus de biens sociaux suppose un usage contraire à l'intérêt social des biens ou du crédit de la société et la prise d'un intérêt personnel;

que la cour d'appel a omis de répondre aux conclusions d'appel du demandeur, dans lesquelles celui-ci faisait valoir que l'existence des opérations de cession de créances et d'augmentation de capital n'établissent pas l'abus de biens sociaux incriminé, en l'absence des éléments matériels propres à le caractériser;

que la perception d'un salaire brut de 22 000 francs par mois n'apparaît pas comme anormalement élevé, eu égard aux facultés des sociétés employant le demandeur;

que le tribunal de commerce de Besançon avait, par jugement du 17 avril 1990, constaté que les quatre sociétés SODEXFRAME, SOGESSER, SBAM et SCI "les Marinières" ne forment qu'une seule structure;

que les débits modiques de 10 093 francs et 7 540 francs dans deux sociétés étaient justifiés par la seule existence d'un important crédit de 249 865,91 francs dans une troisième société, en sorte que le délit n'est pas constitué;

qu'enfin, le demandeur invoquait l'article 6 de la Convention européenne propre à assurer le respect des droits de la défense et sollicitait un supplément d'information à l'effet d'examiner la comptabilité des sociétés SODEXFRAME et SBAM ;

"2° - alors, d'autre part, que la mauvaise foi est un élément constitutif du délit incriminé;

que ni la cour d'appel, ni les premiers juges n'ont caractérisé la mauvaise foi du prévenu;

qu'ainsi, la Cour a privé sa décision de base légale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits retenus à la charge du prévenu ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Schumacher conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Roger conseiller rapporteur, MM. Martin, Pibouleau, Challe conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac, Mme de la Lance, M. Sassoust conseillers référendaires ;

Avocat général : M. le Foyer de Costil ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-86209
Date de la décision : 05/03/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(Sur le premier moyen) INSTRUCTION - Ordonnances - Ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel - Vices de la procédure - Ordonnance définitive - Effet.


Références :

Code de procédure pénale 179, dernier al.

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, 22 octobre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 mar. 1998, pourvoi n°96-86209


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SCHUMACHER conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.86209
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