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20/01/1998 | FRANCE | N°95-14101

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 janvier 1998, 95-14101


Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que par acte du 11 mai 1981, la société le Crédit du Nord (la banque) a consenti à la société Grégorine (la société) une ouverture de crédit d'un montant de 250 000 francs, assortie d'une clause d'anatocisme applicable aux intérêts dus pour une année entière ; que Mme Marie-Thérèse Z..., née X..., M. Hubert Z..., Mme Catherine Idriss Y..., née Z... et M. Jean-Lin Z... (les consorts Z...) se sont portés cautions solidaires du remboursement des sommes dues à la banque au titre de cette ouverture de crédit ; que par jugement du 8

novembre 1982, le Tribunal a prononcé le règlement judiciaire de la so...

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que par acte du 11 mai 1981, la société le Crédit du Nord (la banque) a consenti à la société Grégorine (la société) une ouverture de crédit d'un montant de 250 000 francs, assortie d'une clause d'anatocisme applicable aux intérêts dus pour une année entière ; que Mme Marie-Thérèse Z..., née X..., M. Hubert Z..., Mme Catherine Idriss Y..., née Z... et M. Jean-Lin Z... (les consorts Z...) se sont portés cautions solidaires du remboursement des sommes dues à la banque au titre de cette ouverture de crédit ; que par jugement du 8 novembre 1982, le Tribunal a prononcé le règlement judiciaire de la société ; qu'après avoir perçu du syndic la somme de 185 314,48 francs représentant le produit de la cession du fonds de commerce de la société et reçu des cautions des versements d'un montant total de 21 000 francs, la banque a délivré à celles-ci, le 18 octobre 1991, un commandement de saisie immobilière pour un montant total de 246 038,96 francs correspondant à un décompte de la créance en principal et en intérêts postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective, arrêté au 15 août 1991 ; que les consorts Z... ont fait opposition à ce commandement et ont, en outre, formé contre la banque une demande de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que les consorts Z... font grief à l'arrêt de rejeter l'opposition à commandement, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'admission d'une créance au passif de la liquidation des biens du débiteur n'est revêtue de l'autorité de la chose jugée que pour ce qui a été admis ; qu'il résulte des constatations des juges du fond que la créance de la banque a été admise pour 242 551,10 francs et que la banque a été désintéressée de sa créance à concurrence de 206 314 francs de sorte qu'il ne lui restait dû sur sa créance admise qu'une somme d'environ 36 000 francs ; qu'en énonçant que la créance de la banque fixée au 15 août 1991 pour une somme de 35 052,99 francs en principal et 210 985,97 francs en intérêts était revêtue de l'autorité de la chose jugée et ne pouvait pas être contestée par les cautions, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant l'article 1351 du Code civil ; alors, d'autre part, que le juge doit analyser les documents sur lesquels il fonde sa décision ; qu'en faisant droit à l'intégralité des prétentions de la banque au seul visa du décompte établi par celle-ci, au motif que sa créance s'avère fondée, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que nul ne peut se constituer une preuve à lui-même ; qu'en faisant droit à l'intégralité des prétentions de la banque au seul visa du décompte établi unilatéralement par celle-ci et contesté par les consorts Z..., la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève, par motifs adoptés, que le Crédit du Nord a déclaré sa créance pour un montant, en ce qui concerne le prêt, de 242 551,10 francs outre les intérêts contractuels à échoir à compter du 8 novembre 1982, qu'il lui a été notifié que sa créance a été admise par privilège, ce qui n'a fait l'objet d'aucune réclamation et en déduit que cette créance se trouve définitivement admise en application de l'article 42 de la loi du 13 juillet 1967 ; que par ces constatations et énonciations, dont il résulte que l'admission a porté tant sur le principal de la créance que sur les intérêts postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, qu'analysant, par motifs adoptés, l'acte d'ouverture de crédit et la déclaration de créance de la banque, suivie de son admission, l'arrêt, qui ne se fonde pas sur le seul décompte du 15 août 1991, n'encourt, en statuant comme il fait après avoir écarté les moyens pris de l'incidence sur le montant des intérêts de la prescription prévue à l'article 2277 du Code civil et de l'application de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, aucune des critiques formulées par les deuxième et troisième branches ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Attendu que le même reproche est encore fait à l'arrêt, alors, selon le pourvoi, que l'action en paiement des intérêts des sommes prêtées se prescrit par cinq ans ; qu'il résulte des constatations des juges du fond que la banque a demandé aux consorts Z..., par acte du 18 octobre 1991, le paiement d'intérêts ayant couru depuis 1981 ; qu'en faisant intégralement droit à la demande de la banque au motif inopérant que les intérêts échus depuis plus de cinq ans faisaient l'objet d'une clause contractuelle d'anatocisme, la cour d'appel a violé l'article 1154 du Code civil par fausse interprétation et l'article 2277 du même Code par refus d'application ;

Mais attendu que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a retenu, à bon droit, que lorsque le créancier et le débiteur sont convenus, comme en l'espèce, que les intérêts à échoir se capitaliseront à la fin de chaque année pour produire eux-mêmes des intérêts, ils constituent non plus des intérêts mais un nouveau capital qui s'ajoute au premier, la prescription trentenaire devenant applicable ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur la seconde branche du même moyen :

Sur la fin de non-recevoir invoquée par la défense : (sans intérêt) ;

Et sur le moyen :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour rejeter l'opposition à commandement des consorts Z..., l'arrêt retient que ceux-ci sont tenus conformément à la déclaration de créance, sans application d'une prescription quinquennale pour un acte de prêt comportant une clause d'anatocisme ni d'une déchéance d'intérêts prévue par la loi du 1er mars 1984, devenue applicable postérieurement à la survenance de la déchéance du terme ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre par aucun motif aux conclusions des consorts Z... qui soutenaient que la clause d'anatocisme doit être écartée si c'est par la faute du créancier que la dette n'a pu être liquidée et que, tandis qu'ils avaient proposé dès 1984 de solder leur dette, la banque avait empêché, à l'époque, toute solution de règlement amiable et ne leur avait fait connaître qu'en 1991 le montant des sommes dues, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que l'arrêt rejette la demande de dommages-intérêts des cautions contre la banque, fondée sur l'alourdissement injustifié du montant de leur dette ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen des consorts Z... qui soutenaient que, dès 1984, ils avaient tout mis en oeuvre pour solder leur dette et qu'ils en avaient été empêchés par la faute de la banque, qui avait fait obstacle à la liquidation des sommes dues, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte précité ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'opposition à commandement des consorts Z... ainsi que leur demande de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 26 janvier 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-14101
Date de la décision : 20/01/1998
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

INTERETS - Anatocisme - Convention spéciale - Effets - Nouveau capital - Prescription trentenaire .

PRESCRIPTION CIVILE - Applications diverses - Prescription trentenaire - Intérêts - Anatocisme - Convention spéciale - Nouveau capital

PRESCRIPTION CIVILE - Applications diverses - Prescription quinquennale - Article 2277 du Code civil - Intérêts - Anatocisme - Convention spéciale - Nouveau capital (non)

C'est à bon droit qu'une cour d'appel retient que, lorsque créancier et débiteur sont convenus que les intérêts à échoir se capitaliseront à la fin de chaque année pour produire eux-mêmes des intérêts, ils constituent non plus des intérêts mais un nouveau capital qui s'ajoute au premier, la prescription trentenaire devenant applicable.


Références :

Code civil 2277

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 26 janvier 1995

A RAPPROCHER : Civ., 1926-12-07, Bulletin 1926, n° 165 (1), p. 321 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 jan. 1998, pourvoi n°95-14101, Bull. civ. 1998 IV N° 32 p. 22
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 IV N° 32 p. 22

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Raynaud.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Pasturel.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Ghestin, M. Spinosi.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.14101
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