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13/01/1998 | FRANCE | N°95-20773

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 janvier 1998, 95-20773


Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Micromega est spécialisée dans la fabrication de fournitures destinées aux laboratoires et cabinets dentaires ; que les sociétés GACD, Centrale d'achats des chirurgiens-dentistes Alpha (société GACD), et Promodentaire, qui commercialisent des fournitures dentaires par catalogues de vente par correspondance, estimant qu'elles faisaient l'objet de pratiques discriminatoires de la part de la société Micromega en ne bénéficiant pas des remises qu'elle accordait aux autres distributeurs, l'ont assignée, en 19

94, devant le tribunal de commerce pour qu'il lui soit ordonné, s...

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Micromega est spécialisée dans la fabrication de fournitures destinées aux laboratoires et cabinets dentaires ; que les sociétés GACD, Centrale d'achats des chirurgiens-dentistes Alpha (société GACD), et Promodentaire, qui commercialisent des fournitures dentaires par catalogues de vente par correspondance, estimant qu'elles faisaient l'objet de pratiques discriminatoires de la part de la société Micromega en ne bénéficiant pas des remises qu'elle accordait aux autres distributeurs, l'ont assignée, en 1994, devant le tribunal de commerce pour qu'il lui soit ordonné, sous astreinte, de mettre fin à ces pratiques et de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour le préjudice qu'elles avaient subi ;

Sur la première branche du premier moyen :

Vu l'article 36-1 de l'ordonnance du ler décembre 1986,

Attendu que, pour rejeter la demande des sociétés GACD et Promodentaire tendant à établir qu'elles avaient fait l'objet de conditions de prix discriminatoires de la part de la société Micromega, pour la période antérieure à la mise en place par cette entreprise à la fin de l'année 1993 de contrats écrits de distribution, l'arrêt relève que si, l'existence de tarifs différents n'est pas contestée, l'obligation d'établir par des contrats écrits les accords de coopération commerciale a seulement été consacrée par une loi du 31 décembre 1992, avec des sanctions applicables à compter du mois de septembre 1993 et qu'on ne peut donc appliquer rétroactivement ces dispositions ; que l'arrêt énonce que cela ne signifie nullement qu'antérieurement à l'application de cette réglementation les remises différenciées accordées aux distributeurs, selon l'étendue et la nature des services rendus à la société Micromega, étaient dépourvues de contrepartie réelle ; que l'arrêt constate cependant que la preuve de l'absence de contrepartie réelle pour la période concernée n'est nullement rapportée par les sociétés GACD et Promodentaire ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que si la preuve de l'existence de pratiques discriminatoires incombe à celui qui s'en prétend victime, il appartient au vendeur de justifier de la licéité des remises de prix qu'il accorde à certains clients, lorsque celles-ci, comme en l'espèce, ne sont pas contestées ; qu'en imposant aux sociétés GACD et Promodentaire, distributeurs des produits fabriqués et commercialisés par la société Micromega, de prouver le caractère injustifié des avantages tarifaires pratiqués par cette société, pour la période considérée, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 36-1 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Et sur la sixième branche du premier moyen :

Vu l'article 36-1 de l'ordonnance du ler décembre 1986,

Attendu que, pour rejeter les griefs des sociétés GACD et Promodentaire à l'encontre de la société Micromega pour leur avoir imposé des conditions de prix discriminatoires pour la période postérieure " à la fin de l'année 1993 ", l'arrêt relève que les sociétés GACD et Promodentaire, qui vendent exclusivement par correspondance, n'offrent pas de service après-vente structuré sur les instruments destinés aux prothésistes et aux chirurgiens-dentistes, ni un service performant de promotion technique ; que l'arrêt relève encore, qu'à l'inverse des remises différenciées qui représentent " un total maximum de 27 % " et qui sont accordées à certains distributeurs tenant des " dépôts dentaires ", les services spécifiques sont les contreparties pour les services variés rendus par ces distributeurs à la clientèle et " pouvant s'analyser comme des remises au titre de la coopération commerciale " ; qu'à ces services spécifiques, au nombre de 7, correspondent pour chacun d'eux des taux de remise variant de 2 à 6 % ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des considérations d'ordre général selon lesquelles les entreprises de vente par correspondance n'offrent pas les mêmes services à la clientèle que ceux rendus par les distributeurs tenant des " dépôts dentaires " et, sans vérifier de façon concrète, ainsi que les sociétés GACD et Promodentaire le soutenaient dans leurs écritures, si celles-ci offraient, en tout ou en partie, les services différenciés correspondant à ceux énumérés dans le barème des remises élaboré par la société Micromega, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-20773
Date de la décision : 13/01/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Transparence et pratiques restrictives - Pratiques discriminatoires - Preuve - Charge.

1° CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Transparence et pratiques restrictives - Pratiques discriminatoires - Vente - Remise de prix - Pratique illicite - Preuve - Charge.

1° Si la preuve de l'existence de pratiques discriminatoires incombe à celui qui s'en prétend victime, il appartient au vendeur de justifier de la licéité des remises de prix qu'il accorde à certains clients, lorsque celles-ci ne sont pas contestées.

2° CONCURRENCE (ordonnance du 1er décembre 1986) - Transparence et pratiques restrictives - Pratiques discriminatoires - Vente - Remise de prix - Pratique licite - Appréciation - Barême de remise - Application du barême par le vendeur - Recherche nécessaire.

2° Ne donne pas de base légale à sa décision une cour d'appel qui, pour dénier l'existence de pratiques discriminatoires, retient, par des considérations d'ordre général, que les entreprises de vente par correspondance n'offrent pas les mêmes services à la clientèle que les distributeurs tenant des dépôts, sans vérifier de façon concrète si celles-ci offraient les services différenciés correspondant à ceux énumérés dans le barême de remise élaboré par le fabricant auquel sont imputées les pratiques litigieuses.


Références :

ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 36-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 12 septembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 jan. 1998, pourvoi n°95-20773, Bull. civ. 1998 IV N° 14 p. 9
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 IV N° 14 p. 9

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Léonnet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, MM. Vuitton, Ricard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:95.20773
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