AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MASSE de BOMBES, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GERONIMI ;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X..., contre l'arrêt de la cour d'assises du VAR, en date du 27 janvier 1997 qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à 10 ans de réclusion criminelle ainsi que contre l'arrêt du 1er février 1997 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6-1 et 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 328, alinéa 2 et 362, alinéa 1 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que le formulaire pré-rédigé de la feuille des questions porte la mention dactylographiée suivante : "en conséquence des réponses aux questions ci-dessus posées, après que le président ait donné lecture aux jurés des dispositions des articles 132-18 et 132-24 du Code pénal, la Cour et le jury, réunis en chambre des délibérations, statuant sans désemparer, sur l'application de la peine, après avoir délibéré et voté conformément à la loi, à la majorité absolue, faisant application des articles....", le reste étant manuscrit ;
"alors qu'il résulte des dispositions combinées des articles 362 du Code de procédure pénale, 6-1 et 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la délibération sur la peine ne peut avoir lieu qu'en cas de réponse affirmative de la Cour et du jury sur la culpabilité et que la mention d'une décision sur la peine portée sur la feuille des questions avant le début de la délibération et par conséquent avant la décision de la Cour et du jury sur la culpabilité, ne peut qu'entraîner la cassation de l'arrêt pour violation des textes susvisés ;
"alors que la feuille des questions est rédigée sous la responsabilité du président et que, dès lors, la mention portée à l'avance sur ladite feuille des questions du prononcé d'une peine constitue de toute évidence une manifestation d'opinion prohibée sur la culpabilité de la part du président, incompatible en tant que telle avec l'exigence d'impartialité énoncée à l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ;
Attendu que la feuille des questions auxquelles la Cour et le jury ont eu à répondre comporte, après l'énoncé de ces questions, la mention prérédigée exactement reproduite au moyen ;
Attendu que si cette mention est l'oeuvre du président, elle ne constitue aucune manifestation publique d'opinion sur la culpabilité de l'accusé, seule prohibée par l'article 328 du Code de procédure pénale dès lors qu'il n'est nullement établi, contrairement à ce qui est soutenu, que la lecture publique des questions qui n'a donné lieu a aucune observation ni réclamation par les parties, ait comporté celle de la mention critiquée ;
Que par ailleurs, il ne saurait être déduit de la seule prérédaction de ladite mention que la Cour et le jury dont la délibération est secrète aient méconnu les dispositions conventionnelles visées au moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Massé de Bombes conseiller rapporteur, Mme Baillot, MM. Le Gall, Pelletier, Ruyssen conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Géronimi ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;