AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Vincent X..., demeurant ...,
2°/ M. Christophe X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 12 octobre 1995 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1ère chambre) au profit de la société Banque Bonnasse société anonyme, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 14 octobre 1997, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Savatier, conseiller référendaire rapporteur, M. Grégoire, conseiller, Mme Le Foyer de Costil, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Savatier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat des consorts X..., de Me Pradon, avocat de la société Banque Bonnasse, les conclusions de Mme Le Foyer de Costil, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que M. Jean X... est décédé le 15 novembre 1989 ; que ses deux fils, MM. X..., ont déclaré, le 15 janvier 1990, accepter sa succession sous bénéfice d'inventaire mais n'ont jamais dressé inventaire ; que la Banque Bonnasse leur a demandé paiement de sommes dont le défunt s'était porté caution ;
Attendu que MM. X... font grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 octobre 1995) d'avoir décidé qu'ils ne disposaient plus d'une exception dilatoire et qu'ils pouvaient être condamnés envers la Banque Bonnasse comme héritiers purs et simples, alors que, d'une part, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale, au regard des articles 795, 797, 2251 et 2257 du Code civil, en ne recherchant pas si, comme ils le soutenaient, la consistance de la succession ne dépendait pas de l'issue des instances alors en cours, de sorte que le délai de trois mois pendant lequel ils bénéficiaient de l'exception dilatoire à l'égard des créanciers de la succession était suspendu jusqu'au jour où ces instances feraient l'objet d'une décision définitive et n'était donc pas écoulé;
alors que, d'autre part, la cour d'appel aurait encore privé sa décision de base légale, au regard de l'article 800 du même Code, en s'abstenant de rechercher si MM. X... avaient fait acte d'héritier ou s'il existait contre eux des jugements passés en force de chose jugée les condamnant en qualité d'héritiers purs et simples, seules circonstances de nature à leur interdire de faire encore inventaire ;
Mais attendu que, comme l'a exactement énoncé la cour d'appel, il résulte des articles 794 et 800 du Code civil que l'héritier, qui a déclaré accepter sous bénéfice d'inventaire mais qui n'a pas fait inventaire dans le délai de la loi et ne dispose donc plus d'une exception dilatoire, doit être condamné comme héritier pur et simple à l'égard du créancier successoral qui l'a poursuivi;
qu'ainsi, ayant constaté que MM. X... avaient déclaré accepter la succession sous bénéfice d'inventaire, que les délais étaient écoulés sans qu'ils aient fait inventaire, et ayant estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, qu'il n'y avait pas lieu de leur accorder un nouveau délai, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes dont fait état le moyen, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer à la société Banque Bonnasse la somme de 12 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.