AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Bordet Dreux, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 27 février 1995 par la cour d'appel de Versailles (11ème chambre sociale), au profit :
1°/ de M. Christian X..., demeurant ...,
2°/ de l'ASSEDIC de l'Eure-et-Loir, dont le siège est 3, place Anatole France, 28100 Dreux, défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 septembre 1997, où étaient présents : M. Carmet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Girard-Thuilier, conseiller référendaire rapporteur, MM. Ransac, Chagny, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Girard-Thuilier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Bordet Dreux, de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X..., engagé le 14 févier 1977 par la société Bordet en qualité de directeur du magasin Prisunic de Dreux a été licencié pour faute le 31 mars 1993 après mise à pied conservatoire ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 27 févier 1995) d'avoir décidé que le licenciement ne procédait ni d'une faute grave ni d'une cause réelle et sérieuse, alors que, selon le moyen, d'une part, le refus de se conformer aux procédures comptables en vigueur dans l'entreprise de la part d'un cadre dirigeant constitue une faute caractérisée peu important le fait que de tels agissements se soient déjà produits par le passé, dès lors que l'employeur n'en a pas été averti, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 122-14-3 du Code du travail;
alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de prendre en compte la fonction de directeur de magasin de M. X... qui impliquait que l'entreprise n'avait pas à faire procéder à des contrôles automatiques de toutes les feuilles de caisse et en retenant du même coup que l'entreprise tolérait de tels agissements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-6 et L. 122-14-3 du Code du travail;
alors, de troisième part, et en tout état de cause, que l'employeur peut à tout moment faire cesser une pratique contraire aux règles de gestion élémentaire et qui n'a pu voir le jour qu'en raison de la fonction et du grade du salarié concerné, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 122-14-3 du Code du travail;
alors, de quatrième part, qu'en déniant tout caractère fautif au fait que M. X... utilisait le coffre-fort de l'entreprise à des fins personnelles pour y entreposer des fonds relatifs à son activité de trésorier d'un club de tennis, peu important que ce fait ait été découvert postérieurement à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu d'abord, que la cour d'appel a pu décider que les faits reprochés au salarié, énoncés dans la lettre de licenciement, ne rendaient pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis et ne constituaient pas une faute grave ;
Et attendu ensuite que la cour d'appel, par une décision motivée dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, a décidé que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bordet Dreux aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X..., à payer à la société Bordet Dreux la somme de 10 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.