AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ Mme Marguerite B...,
2°/ M. Michel B..., demeurant tous deux La Fenière, avenue des Rocailles, 83700 Saint-Raphaël,
3°/ Mme Joelle B... épouse Y..., demeurant ..., tous trois pris en qualités d'héritiers de Jean B..., en cassation d'un arrêt rendu le 31 janvier 1995 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre, section C), au profit :
1°/ de Mme Renée X... épouse Z..., demeurant ..., pris en qualités d'unique héritière de Mme X...
2°/ de l'association Syndicale libre lotissement "Clair Bois" dont le siège est ...,
3°/ de la SNC Cochery Bourdin Chaussée, dont le siège est ..., venant aux droits de la société Entreprise Bouclier Chatrousse,
4°/ de M. Andre A..., demeurant 404 Boucle de Bellevue, 83140 Six-Fours-les-Plages, défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 10 juin 1997, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Grégoire, conseiller rapporteur, MM. Renard-Payen, Chartier, Ancel, Durieux, Mme Bénas, conseillers, M.
Savatier, Mme Bignon, conseillers référendaires, Mme Le Foyer de Costil, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Grégoire, conseiller, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat des consorts B..., de Me Balat, avocat de l'association Syndicale libre lotissement "Clair Bois", de la SCP Guiguet, Bachellier et de la Varde, avocat de Mme X..., les conclusions de Mme Le Foyer de Costil, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte aux consorts B... du désistement de leur pourvoi à l'encontre de M. A... ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, propriétaire d'un domaine à Saint-Raphaël (Var), Mme X... l'a vendu, après avoir créé un lotissement dénommé Clair Bois; que, soutenant que les clauses du cahier des charges relatives à la voirie, à la station d'épuration et à l'éclairage public n'avaient pas été respectées, les co-lotis, regroupés en une Association syndicale libre (ASL), ont assigné le lotisseur; que l'expert commis a évalué à 926 199,90 francs le coût des travaux de remise en état; qu'aux termes d'une transaction intervenue entre les parties le 1er février 1982, Mme X... s'est engagée à prendre à charge l'intégralité du coût de ces travaux, qui devaient être effectués sous la maîtrise d'oeuvre de M. B..., architecte; que, de son côté, l'ALS s'engageait à se désister de toute instance et action relatives au litige, objet de la convention, "en cas de respect de l'intégralité des clauses de la transaction"; que, le 22 février 1984, les parties ont reconnu que Mme X... avait rempli toutes ses obligations; que, de nouveaux désordres étant survenus quelques mois plus tard, l'ASL a assigné une seconde fois le lotisseur, lequel a appelé en garantie l'architecte B... et l'entreprise Bouclier-Chatrousse, aux droits de laquelle vient actuellement la société Cochery-Bourdin-Chaussée; que l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 31 janvier 1995) a condamné Mme Z..., héritière de Mme X..., à faire procéder à la reprise de ces nouveaux désordres, partagé par moitié la responsabilité entre l'architecte et l'entrepreneur, et déclaré ces derniers tenus à garantir dans cette proportion Mme Z... ;
Attendu que les héritiers B... font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'aux termes de la transaction du 1er février 1982, Mme X... s'était bornée à assumer une obligation pécuniaire, consistant dans la prise en charge du coût des travaux; qu'en énonçant qu'elle avait conservé la maîtrise d'ouvrage de ces travaux et en condamnant, son héritière, à remettre en état les chaussées défectueuses du lotissement, l'arrêt attaqué a violé l'article 2052 du Code civil; alors, d'autre part, qu'en prononçant cette condamnation contre Mme Z..., sans constater que son auteur, Mme X..., aurait manqué aux seules obligations pécuniaires mises à sa charge par la transaction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte; alors, par ailleurs, qu'en affirmant que l"ASL n'a jamais renoncé à l'exercice de ses droits procéduraux au cas où les reprises réceptionnées se révéleraient insuffisantes", l'arrêt attaqué a dénaturé la transaction du 1er février 1982 ;
et alors, enfin, qu'en omettant de répondre aux conclusions d'appel, selon lesquelles "l'ASL ayant reconnu, par acte du 22 février 1984, que le protocole était exécuté, ne peut demander cette exécution en justice", la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, sur les deux premières branches, que la novation ne se présume pas; qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que le fait que les contrats aient été soumis à l'approbation de l'ASL "ne saurait en aucune façon modifier les qualités respectives des parties et rendre l'ASL titulaire de la maîtrise d'ouvrage pour des travaux qui, à l'évidence, relevaient de la seule responsabilité du lotisseur", c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que la cour d'appel a estimé que la transaction du 1er février 1982 n'avait pu avoir pour effet de nover l'obligation de faire du lotisseur, consistant à réaliser un lotissement exempt de vices; qu'elle en a exactement déduit que les désordres antérieurs et postérieurs à cette transaction engageaient la responsabilité du lotisseur, Mme X..., et justifiaient la condamnation prononcée contre son héritière ;
Attendu, sur les deux dernières branches, qu'il avait été prévu par la transaction qu'"en cas de non-respect par l'une des parties de l'une quelconque de ses obligations définies au protocole, les autres parties pourraient l'y contraindre par toute voie de droit"; qu'ayant retenu que les travaux de réfection, réceptionnés avec réserves le 22 février 1984, avaient été suivis de nouveaux désordres quelques mois plus tard, ce qui justifiait une seconde action en justice de l'ASL, la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions invoquées, n'a pas dénaturé la transaction litigieuse ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses quatre branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts B... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne des consorts B... à payer à l'ASL la somme de 12 000 francs et rejette la demande de Mme Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.