AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ Mlle Valérie E..., demeurant ...,
2°/ M. Sylvestre D... de Marsac, demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 18 octobre 1994 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section A), au profit :
1°/ de M. René Y..., demeurant ...,
2°/ de M. Emmanuel Z... du Tilly, demeurant ...,
3°/ de M. Jean-François B..., demeurant ...,
4°/ de M. André C..., demeurant ...,
5°/ de M. Bernard X..., demeurant ...,
6°/ de M. Didier A..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 juin 1997, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Cottin, conseiller rapporteur, M. Fouret, conseiller, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Cottin, conseiller, les observations de la SCP Monod, avocat des consorts D... de Marsac, de Me Baraduc-Benabent, avocat de M. Y..., de M. Z... du Tilly et de M. B..., de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. C..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que les héritiers de Xavier E..., de son vivant avocat, ont assigné les anciens associés de leur auteur pour voir juger que sa succession était fondée à leur réclamer le paiement de la contre-valeur des droits incorporels qu'il détenait sur la clientèle unique de l'association à la date de son décès; que la cour d'appel a rejeté cette demande en considérant que l'avenant du 24 décembre 1975 à la convention d'association du même jour avait expressément prévu que les apports de clientèle respectifs des associés ne feraient l'objet d'aucune compensation pécuniaire ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 18 octobre 1994), d'une part, d'avoir dénaturé les termes clairs et précis de l'avenant du 24 décembre 1975 par lequel D... de Marsac avait seulement renoncé aux droits auxquels son apport de clientèle lui permettait de prétendre dans la répartition des résultats et n'avait pas renoncé, notamment à la suite d'un décès, à l'indemnisation du droit de présentation de ladite clientèle; d'autre part, d'avoir déclaré irrecevable la demande subsidiaire fondée sur la théorie de l'enrichissement sans cause; enfin, d'avoir violé les articles 1134 et 1165 du Code civil, en se fondant sur l'avenant du 24 décembre 1975 pour déclarer irrecevables les demandes formées contre des associés qui n'étaient pas signataires de cet avenant ;
Mais attendu, de première part, qu'en décidant que, si les dispositions de la clause de l'avenant qui écartent toute prise en compte des apports de clientèle faits par chaque avocat sont adoptées par les signataires "eu égard au mode de répartition des résultats", leur renonciation à l'exercice de tous droits du chef des apports de clientèle s'applique selon les termes de l'avenant, non seulement "dans la répartition des résultats" mais encore à toute réclamation "à titre indemnitaire ou autrement", la cour d'appel n'a fait qu'interpréter souverainement les stipulations ambiguës de la convention; que, de deuxième part, elle a relevé à bon droit qu'en l'état d'une convention ayant réglé les rapports entre les parties, les héritiers de Xavier E... n'étaient pas fondés à invoquer le fondement de l'enrichissement sans cause; que, de troisième part, il résulte de l'arrêt et du dossier que les héritiers de Xavier E... ont fondé leur demande, à l'encontre de l'ensemble des associés, sur l'application de la convention d'association du 24 décembre 1975 et sur son avenant de même date; qu'ils sont donc irrecevables à soutenir devant la Cour de Cassation un moyen contraire à la thèse qu'ils avaient développée devant les juges du fond; d'où il suit que le moyen, qui est irrecevable en sa troisième branche, est mal fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts D... de Marsac aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les consorts D... de Marsac à payer la somme totale de 10 000 francs à MM. Y..., Z... du Tilly et B... et la somme de 10 000 francs à M. C... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept.