Attendu que la société d'exploitation des Etablissements
X...
(société X...), qui exploitait un fonds de commerce de récupération et traitement de matériaux sur un terrain appartenant à M. X..., exproprié au profit du département des Alpes-Maritimes, fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 septembre 1995) de limiter le montant de l'indemnité principale d'éviction à la somme de 2 260 000 francs et celui de l'indemnité de remploi à la somme de 565 000 francs, alors, selon le moyen, " que les indemnités allouées à la suite d'une expropriation doivent couvrir l'intégralité du préjudice subi et, à ce titre, que les bénéfices retenus lors de l'évaluation d'un fonds de commerce ou d'un fonds industriel méritent, le cas échéant, d'être majorés par un coefficient leur permettant d'être plus significatifs de la qualité du fonds ; qu'en l'espèce la société X... soutenait qu'en raison de la situation exceptionnelle du fonds un coefficient multiplicateur de 1,5 devait être appliqué aux bénéfices retenus lors de l'évaluation ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile " ;
Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 13-13 du Code de l'expropriation ;
Attendu que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct et matériel ;
Attendu que, pour débouter la société X... de sa demande d'indemnité pour trouble commercial, l'arrêt retient qu'une indemnisation au titre du trouble commercial ne trouve pas de justificatif, la valeur totale du fonds ayant été indemnisée par l'indemnité principale et l'indemnité de remploi ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société X... n'avait pas subi, du fait de l'interruption temporaire de son activité, un préjudice actuel et direct distinct du préjudice indemnisé par l'allocation de la valeur totale du fonds et par l'indemnité de remploi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société X... de sa demande d'indemnité pour trouble commercial, l'arrêt rendu le 19 septembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.