La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/1997 | FRANCE | N°97-81536

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mai 1997, 97-81536


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de Y...;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Pierre, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 28 janvier 1997, qui,

dans l'information suivie contre lui du chef de violation de secret professionn...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de Y...;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Pierre, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BORDEAUX, en date du 28 janvier 1997, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de violation de secret professionnel, a rejeté sa demande de mainlevée du contrôle judiciaire ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 197 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué, statuant sur une demande de mainlevée de contrôle judiciaire, a statué au vu d'un avis d'audience adressé à un avocat que le mis en examen avait déchargé de ses intérêts, et sans avoir averti de cette audience l'avocat expressément désigné par lui dans la procédure, pour le représenter désormais; que l'avocat désigné n'a pu ni prendre connaissance du réquisitoire du ministère public, ni déposer un mémoire écrit avant l'audience ;

qu'ainsi les droits de la défense ont été méconnus" ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'avis d'audience a été adressé à son précédent conseil, dès lors que son nouvel avocat a déposé un mémoire devant la chambre d'accusation et a comparu à l'audience, où il a présenté ses observations sans se prévaloir de l'irrégularité de sa convocation ;

Que, les droits de la défense n'ayant subi aucune atteinte, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 197 du Code de procédure pénale, 826-13 du Code pénal et 11 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, dans le cadre de la demande de mainlevée du contrôle judiciaire formée par Jean-Pierre X..., mis en examen du chef de violation du secret professionnel pour avoir soi-disant averti une personne de ce qu'elle était sous écoute téléphonique dans une instruction menée parallèlement, la personne constituée partie civile dans cette autre procédure et ses avocats ont été avisés de la date d'audience devant la chambre d'accusation sur la demande de mainlevée du contrôle judiciaire ;

"alors, d'une part, que la partie civile constituée dans l'autre procédure n'était pas partie à l'information ouverte ensuite du chef de violation du secret professionnel, sur le seul réquisitoire du parquet; qu'en la convoquant à une audience dans une procédure où elle n'était pas partie, et en lui donnant ainsi les moyens de s'expliquer sur cette procédure, la chambre d'accusation a violé les droits de la défense du mis en examen ;

"alors, d'autre part, que, en avertissant ainsi une personne parfaitement étrangère à l'information en cours du chef de violation du secret de l'instruction, la chambre d'accusation a rendu son arrêt en violation du secret devant recouvrir cette seconde information, et en violation de l'article 11 du Code de procédure pénale" ;

Attendu que, n'ayant pas discuté à l'audience l'intervention de la partie civile devant la chambre d'accusation, le demandeur ne saurait être admis à le faire pour la première fois devant la Cour de Cassation ;

Qu'ainsi, le moyen est irrecevable ;

Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 137, 138, 139, 140, 593 du Code de procédure pénale, 226-13 du Code pénal, 11 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de la présomption d'innocence ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mainlevée de contrôle judiciaire formée par Jean-Pierre X... ;

"aux motifs que les faits dont Jean-Pierre X... doit répondre à raison de leur qualification pénale et de leurs conséquences sur les investigations entreprises justifient que l'intéressé n'accède plus aux locaux du commissariat de Périgueux et n'exerce plus ses activités dans le ressort de la juridiction confirmée ;

que les faits ont été commis dans le cadre de l'exercice de sa profession de fonctionnaire de police et que l'on peut en redouter la réitération; que le maintien du contrôle judiciaire est indispensable au bon déroulement de l'information en cours ;

"alors, d'une part, que Jean-Pierre X..., mis en examen du chef de violation du secret professionnel pour avoir soi-disant révélé à Gérard Z... que celui-ci avait été mis sur écoute téléphonique par les services de police judiciaire dans une information parallèle, a toujours contesté avoir connu l'existence de cette écoute, pratiquée dans cette information parallèle dont il n'était pas chargé et dont il ne savait rien; que la violation du secret professionnel suppose la transmission d'une information dont on est dépositaire pour l'avoir reçue dans le cadre de sa profession; que, faute de s'expliquer sur l'élément matériel de cette violation, expressément contestée par Jean-Pierre X..., et en se bornant à affirmer que les faits ont été commis, la chambre d'accusation a privé sa décision de toute base légale et méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

"alors, d'autre part, que la mise ou le maintien sous contrôle judiciaire doit être nécessaire au déroulement de l'information; que cette nécessité doit être justifiée de façon concrète, et par référence aux éléments de l'espèce; qu'en l'occurrence, une simple référence abstraite au "bon déroulement de l'information en cours", dont on ne sait même pas s'il s'agit de l'information ouverte du chef de violation du secret professionnel, ou de l'information dont le secret aurait été violé, est insusceptible de donner un fondement légal à la décision de maintien du contrôle judiciaire ;

"alors, de surcroît, que Jean-Pierre X... faisait valoir très clairement, dans sa demande de mainlevée, que depuis sa mise en examen du chef de violation du secret professionnel et sa mise sous contrôle judiciaire, le 1er août 1996, aucun acte d'information n'était intervenu pendant plus de six mois; que la mise en oeuvre d'une mesure coercitive de contrôle judiciaire ne peut se justifier que si, parallèlement, le juge d'instruction poursuit ses investigations et fait avancer le dossier; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le fait que l'instruction n'avait pas bougé depuis six mois, et de justifier le maintien d'une mesure coercitive, sans aucune contrepartie quant au déroulement de l'instruction, la chambre d'accusation a méconnu les textes précités ;

"alors, au surplus, que le placement ou le maintien sous contrôle judiciaire ne peut être ordonné qu'à l'égard d'une personne mise en examen dans le cadre de l'information ouverte à raison de faits dont elle serait personnellement responsable; qu'en aucun cas, par conséquent, le maintien sous contrôle judiciaire de Jean-Pierre X... ne pouvait être justifié par les nécessités de l'information parallèle ouverte du chef d'attentat à l'explosif, et dont il aurait prétendument violé le secret ;

"alors, enfin, que l'arrêt est entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif; qu'en effet, la chambre d'accusation rejette la demande de mainlevée d'un contrôle judiciaire interdisant purement et simplement à Jean-Pierre X... l'exercice de son activité professionnelle de policier, tout en énonçant dans ses motifs que seules étaient justifiées une éventuelle interdiction d'exercer localement ses fonctions, et une interdiction d'accéder aux locaux du commissariat de Périgueux; qu'ainsi il résulte de l'arrêt attaqué lui-même que la mesure de contrôle judiciaire n'était pas strictement proportionnée aux exigences de la poursuite de l'information, et qu'elle était donc illégale" ;

Vu lesdits articles ;

Attendu que les arrêts de la chambre d'accusation doivent être motivés; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à l'absence de motifs ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le juge d'instruction saisi d'une information judiciaire distincte, ouverte à la suite de la destruction partielle, par substance explosive, d'un bar de Périgueux, a donné commission rogatoire, le 10 juillet 1996, au service régional de police judiciaire, de placer sous écoutes la ligne téléphonique d'un suspect, Gérard Z...; que les services de police ont ainsi intercepté une communication du 13 juillet 1996 par laquelle Gérard Z... informait son correspondant de ce qu'un prénommé Jean-Pierre, identifié ultérieurement comme étant X..., lui avait donné connaissance de sa mise sous écoute téléphonique ;

Qu'à la suite d'une enquête préliminaire sur ces faits, une information a été ouverte du chef de violation de secret professionnel, dans laquelle Jean-Pierre X..., fonctionnaire des Renseignements généraux, en poste à Périgueux, a été mis en examen et placé le 1er août 1996 sous contrôle judiciaire, comportant l'interdiction d'exercer son activité professionnelle de policier ;

Attendu que, le magistrat instructeur n'ayant pas statué dans le délai de 5 jours prévu à l'article 140, alinéa 2, du Code de procédure pénale, sur une nouvelle demande de mainlevée du contrôle judiciaire présentée le 7 janvier 1997, Jean-Pierre X... a saisi directement la chambre d'accusation ;

Attendu que, pour rejeter la demande, la juridiction d'instruction du second degré, après avoir exposé les charges pesant contre l'intéressé, se prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en maintenant l'interdiction totale d'exercer l'activité professionnelle de policier, tout en relevant que la mesure de contrôle judiciaire ne se justifie que par la nécessité d'empêcher Jean-Pierre X... d'accéder aux locaux du commissariat de Périgueux et d'exercer ses activités dans ce ressort, l'arrêt attaqué, empreint de contradiction entre ses motifs et son dispositif, encourt la censure ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 28 janvier 1997, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Agen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. Martin conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Schumacher, Pibouleau, Mme Garnier conseillers de la chambre, MM. de Mordant de Massiac, de Larosière de Champfeu, Mme de la Lance conseillers référendaires ;

Avocat général : M. de Gouttes ;

Greffier de chambre : Mme Ely ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-81536
Date de la décision : 29/05/1997
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE D'ACCUSATION - Procédure - Convocations - Convocation des avocats - Nouvel avocat - Absence de convocation - Dépôt d'un mémoire - Présentation d'observations sans se prévaloir de l'irrégularité - Droits de la défense - Portée.


Références :

Code de procédure pénale 197

Décision attaquée : Chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, 28 janvier 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 mai. 1997, pourvoi n°97-81536


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le GUNEHEC

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:97.81536
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award