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27/05/1997 | FRANCE | N°95-11921

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 mai 1997, 95-11921


Donne acte à la société Prigest de son désistement envers la Commission des opérations de bourse ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 janvier 1995), que la société Prigest, gestionnaire de portefeuilles de valeurs mobilières, a convenu avec la société Les Ciments français, en janvier 1988, de faire acquérir pour son compte, par des clients dont elle gérait le portefeuille ou par des fonds communs de placement qu'elle gérait, des actions de la société Cementos X..., opérations devant donner lieu à l'établissement d'un document tous les 2 mois ; qu'au cours de

l'année suivante les sociétés Prigest et Les Ciments français ont passé un...

Donne acte à la société Prigest de son désistement envers la Commission des opérations de bourse ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 janvier 1995), que la société Prigest, gestionnaire de portefeuilles de valeurs mobilières, a convenu avec la société Les Ciments français, en janvier 1988, de faire acquérir pour son compte, par des clients dont elle gérait le portefeuille ou par des fonds communs de placement qu'elle gérait, des actions de la société Cementos X..., opérations devant donner lieu à l'établissement d'un document tous les 2 mois ; qu'au cours de l'année suivante les sociétés Prigest et Les Ciments français ont passé un accord identique concernant des titres de la société Guintoli ; que les opérations d'acquisition et de placement ont eu lieu jusqu'à la fin de l'année 1992 ; que la Commission des opérations de bourse a sanctionné la société Prigest pour avoir méconnu ses obligations au regard du règlement n° 90-05, en pratiquant, à la suite de décisions répétées prises entre le 20 juillet 1990 et la fin de l'année 1992, des opérations de gestion motivées par d'autres intérêts que ceux de ses clients et ayant consisté à maintenir dans leurs portefeuilles et à poursuivre, en leur nom, des achats de titres Guintoli et Cementos X... en exécution de promesses de vente successives conclues avec la société Les Ciments français ; que la société Prigest a formé un recours contre cette décision ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Prigest reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'exception d'illégalité du règlement, alors, selon le pourvoi, que l'exception d'illégalité d'un acte administratif réglementaire est recevable à tout moment, si bien qu'en déclarant irrecevable l'exception d'illégalité parce qu'elle n'aurait pas été présentée dans le mois de la déclaration du recours, sans constater que l'exception d'illégalité du règlement n° 90-05 ait pu n'être pas sérieuse ou nécessaire à la solution du litige, la cour d'appel a faussement appliqué l'article 8 du décret du 23 mars 1990 et violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, ensemble la loi des 16 et 24 août 1790 ;

Mais attendu qu'ayant rappelé qu'en vertu de l'article 8 du décret du 23 mars 1990 l'auteur d'un recours contre une décision de la Commission des opérations de bourse doit, à peine d'irrecevabilité, exposer ses moyens dans sa déclaration de recours et, s'il ne l'a pas fait, déposer cet exposé dans le mois qui suit cette déclaration, l'arrêt constate que la société Prigest n'a pas invoqué l'illégalité du règlement dans son mémoire du 13 juillet 1994, déposé dans le mois de sa déclaration de recours, mais ne l'a fait que dans son mémoire en réplique du 13 octobre 1994 et retient, exactement, qu'elle était alors irrecevable à le faire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que la société Prigest reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à une amende en application du règlement n° 90-05, alors, selon le pourvoi, d'une part, que se trouvait en cause l'utilisation abusive des mandats de gestion passés entre elle et ses clients autres que la société Les Ciments français, si bien qu'en se fondant exclusivement sur des conventions successives, passées après l'entrée en vigueur du règlement n° 90-05, entre elle et la société Les Ciments français pour écarter le moyen tiré de l'application rétroactive du règlement, la cour d'appel n'a pas donné de fondement légal à sa décision au regard de l'article 2 du Code civil ; alors, d'autre part, que, s'agissant des effets futurs des mandats de gestion passés par elle avec ses autres clients, il y avait lieu, hors de la constatation de toute nouvelle convention successive, à survie de la loi ancienne, si bien que la cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil ; alors, en tout état de cause, que, même à se placer dans le cadre des conventions passées entre elle et la société Les Ciments français, il résultait des propres constatations de l'arrêt que les conventions successives passées après le 20 juillet 1990 n'étaient que l'exécution d'une convention unique de portage, conclue par accord des parties antérieur au 20 juillet 1990, si bien que la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1134 du Code civil et, en conséquence, a violé, par application rétroactive du règlement n° 90-05 à un mandat de gestion conclu avant le 20 juillet 1990, l'article 2 du Code civil ; et alors, enfin, que l'utilisation abusive d'un mandat de gestion est matérialisée et consommée, de manière instantanée, au moment de la décision d'utiliser le mandat à des fins ne correspondant pas à celles à raison desquelles le mandat avait été confié si bien que, dès lors qu'il était constaté que cette décision était antérieure au 20 juillet 1990, la cour d'appel ne pouvait déclarer applicable le règlement n° 90-05 sans violer l'article 2 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la société Prigest n'a pas soutenu devant la cour d'appel que les mandats de gestion des clients à qui elle a fait porter des titres auraient été conclus avant le 20 juillet 1990 ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable en sa deuxième branche ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt constate que la société Prigest qui, jusqu'à la fin de l'année 1992, a maintenu dans les portefeuilles qu'elle gérait des titres Cementos X... et Guintoli et a continué à en acquérir au nom de ses clients, ces achats ayant cessé dès que la société Les Ciments français lui a donné instruction de ne plus investir pour son compte, a agi ainsi non dans l'intérêt des clients dont elle gérait les portefeuilles mais pour exécuter des engagements qu'elle avait pris envers un tiers ; qu'ayant retenu, au vu de ces constatations et appréciations dont il résulte que chacune de ces opérations effectuées dans un intérêt autre que celui du mandant constituait un abus de mandat, que le règlement susvisé était applicable à celles accomplies après son entrée en vigueur, la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision, a pu statuer comme elle a fait ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa deuxième branche, et mal fondé dans les trois autres, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 95-11921
Date de la décision : 27/05/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° BOURSE DE VALEURS - Commission des opérations de bourse - Procédure - Cour d'appel - Moyen - Délai - Inobservation - Irrecevabilité.

1° Ayant rappelé que, en vertu de l'article 8 du décret du 23 mars 1990, l'auteur d'un recours contre une décision de la Commission des opérations de bourse doit à peine d'irrecevabilité exposer ses moyens dans sa déclaration de recours et, s'il ne l'a pas fait, déposer cet exposé dans le mois qui suit cette déclaration, la cour d'appel qui constate qu'une société n'a pas invoqué l'illégalité du règlement dans son mémoire déposé dans le mois du recours mais ne l'a fait que 3 mois plus tard retient exactement qu'elle était alors irrecevable à le faire.

2° BOURSE DE VALEURS - Commission des opérations de bourse - Règlement n° relatif à l'utilisation abusive des pouvoirs ou des mandats - Mandataire - Abus - Opération dans un intérêt autre que celui du mandant.

2° BOURSE DE VALEURS - Commission des opérations de bourse - Règlement n° relatif à l'utilisation abusive des pouvoirs ou des mandats - Application dans le temps - Opération effectuée après son entrée en vigueur.

2° La cour d'appel qui constate qu'une société gestionnaire de portefeuilles de clients a acquis, puis maintenu dans leurs comptes des titres de deux sociétés non pas dans leur intérêt mais pour exécuter des obligations qu'elle avait contractées envers un tiers, ce dont il résultait que chacune de ces opérations ayant été accomplie dans un intérêt autre que celui du mandant avait constitué un abus de mandat et, dès lors qu'elle avait été effectuée après l'entrée en vigueur du règlement de la Commission des opérations de bourse n° 90-05 tombait sous l'application de ce texte, a légalement justifié sa décision de condamner cette société gestionnaire.


Références :

1° :
Décret 90-263 du 23 mars 1990 art. 8

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 janvier 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 mai. 1997, pourvoi n°95-11921, Bull. civ. 1997 IV N° 155 p. 139
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1997 IV N° 155 p. 139

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Raynaud.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Poullain.
Avocat(s) : Avocats : M. Choucroy, la SCP Ancel et Couturier-Heller.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:95.11921
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