AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller FARGE, les observations de Me BALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général de GOUTTES;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X... Marcel,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la MEUSE, en date du 23 février 1996, qui, pour viols et violences aggravés, l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle en portant la période sûreté à 13 ans et a prononcé l'interdiction de séjour pendant 10 ans, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a statué sur les intérêts civils;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 296 du Code de procédure pénale;
"en ce que le procès-verbal des débats constate (page 3) que la Cour a statué sur la légitimité des excuses invoquées par deux des jurés sans avoir recueilli au préalable les observations de l'accusé et de son conseil;
"alors que la Cour ne peut se prononcer sur l'empêchement d'un juré sans que l'accusé ou son conseil ait été entendu";
Attendu qu'en application des articles 305-1 et 599, alinéa 2, du Code de procédure pénale, l'accusé n'est pas recevable à présenter comme moyen de cassation une prétendue nullité qu'il n'a pas soulevée devant la cour d'assises conformément aux prescriptions du premier de ces textes;
D'où il suit que le moyen doit être déclaré irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 310, 329 et 331 du Code de procédure pénale;
"en ce qu'il ressort du procès-verbal des débats (page 8) que le président, agissant en vertu de son pouvoir discrétionnaire, a donné lecture à l'audience de la déposition à l'instruction de Yasmine X., témoin non comparant;
"alors que le principe de l'oralité des débats devant la cour d'assises s'oppose à ce que le président donne lecture des dépositions des témoins à charge faites lors de l'instruction";
Attendu que le procès-verbal des débats mentionne que les parties ont renoncé à l'audition de Yasmine X., témoin défaillant;
Que, dès lors, le président, en donnant lecture, après cette renonciation, de la déposition du témoin, a régulièrement usé de son pouvoir discrétionnaire, sans porter atteinte au principe de l'oralité des débats;
Qu'ainsi, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 44 ancien 112-2 et 222-47 nouveau du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que la cour d'assises a condamné Marcel X..., à titre de peine complémentaire, à une interdiction de séjour pour une durée de dix ans dans le département de la Meuse;
"alors qu'une loi nouvelle, portant aggravation du régime des peines prévues par la loi antérieure, n'est applicable qu'à des faits commis après son entrée en vigueur;
qu'en vertu de l'article 44 ancien du Code pénal, en vigueur au moment des faits, la Cour aurait dû prononcer cette peine par décision spéciale et motivée, ce qu'elle n'a pas fait";
Attendu qu'il résulte tant de la feuille de questions que de l'arrêt attaqué qu'outre la peine de 20 ans de réclusion criminelle, la Cour et le jury, après avoir délibéré dans les conditions de l'article 362 du Code de procédure pénale, ont prononcé contre Marcel X... l'interdiction de séjour dans le département de la Meuse pour une durée de 10 ans;
Attendu qu'en cet état, il a été fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet, selon l'article 112-2 du Code pénal, les lois fixant les formes de la procédure sont d'application immédiate;
que tel est le cas des articles 131-31 et 131-32 du même Code qui se sont substitués à l'article 44 du Code pénal en vigueur à l'époque des faits;
Que le moyen n'est donc pas fondé ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Farge conseiller rapporteur, MM. Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Chanet conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Poisot conseillers référendaires;
Avocat général : M. de Gouttes ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;