AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BLIN, les observations de Me X..., de la société civile professionnelle COUTARD et MAYER et de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- LA SOCIETE LILLOISE D'ASSURANCE ET DE REASSURANCE, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, du 30 octobre 1995, qui, dans la procédure suivie contre James Z... pour blessures involontaires, a dit la société LILLOISE D'ASSURANCE ET DE REASSURANCE tenue à garantie;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 2 et 594 du Code de procédure pénale, de l'article L 112-3 du Code des assurances, de l'article 1134 du Code civil, défaut de motifs et de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit que la société Lilloise d'Assurance et de Réassurance devait sa garantie à James Z... pour les conséquences dommageables de l'accident dans lequel Rémi A... a été blessé;
"aux motifs que James Z... avait été relaxé du fait d'usage de faux et de tentative d'escroquerie à raison d'une attestation d'assurances établie au nom de la société Lilloise d'Assurance et de Réassurance par un jugement du tribunal de grande instance de Bobigny en date du 16 novembre 1994 et qu'il était déduit de cette relaxe que cette société devait sa garantie;
"alors, d'une part, que ce jugement, que la cour d'appel a dénaturé, avait expressément constaté que cette attestation d'assurances était un faux et qu'il appartenait à la Cour de tirer toutes les conséquences de cette contestation;
"alors, d'autre part, que la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions de la société demandant à la cour d'appel de constater que la procédure suivie devant le tribunal de grande instance de Bobigny contre James Z... avait révélé que l'attestation d'assurances en question était un faux;
"alors, enfin, que les motifs de l'arrêt attaqué ne sont nullement de nature à établir que la société devait sa garantie et à quel titre";
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et d'un précédent arrêt de la même cour d'appel du 2 mai 1990, auquel il est référé, que, sur les poursuites exercées contre James Z... pour blessures involontaires et la constitution de partie civile de Rémi A..., la société Lilloise d'Assurance et de Réassurance a régulièrement présenté une exception de non-garantie en faisant valoir que l'attestation d'assurance délivrée en son nom par l'agence Campos concernant le véhicule conduit par le prévenu était un faux, ce cabinet ne figurant pas au nombre de ses agents, ni James Z... parmi ses assurés;
Attendu, cependant, que le tribunal correctionnel a dit la société Lilloise d'Assurance et de Réassurance tenue à garantie, retenant que celle-ci, en confiant à l'agence Campos, en qualité de courtier, des attestations à son en-tête et lui laissant la possibilité de les délivrer, lui a conféré "la qualité d'un mandataire apparent, l'auteur pouvant croire légitimement à l'existence des pouvoirs donnés par l'assureur";
Attendu que, pour confirmer cette décision, la juridiction du second degré, après avoir sursis à statuer sur la demande en garantie formée contre l'assureur jusqu'à l'issue de l'information ouverte sur sa plainte pour faux, usage de faux et escroquerie, s'est fondée, en se référant au jugement entrepris, sur l'ordonnance de non-lieu et la décision de relaxe intervenues respectivement au profit de Campos et James Z...;
Attendu qu'en cet état la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Blin conseiller rapporteur, MM. Aldebert, Grapinet, Challe, Mistral, Blondet conseillers de la chambre, Mmes Y..., Verdun conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;