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27/02/1996 | FRANCE | N°95-82369

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 février 1996, 95-82369


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept février mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BATUT, les observations de la société civile professionnelle Le BRET et LAUGIER, et de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Henri, contre l'arrêt n 59 de l

a cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, du 6 avril 1995, qui, pour homicide...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept février mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BATUT, les observations de la société civile professionnelle Le BRET et LAUGIER, et de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Henri, contre l'arrêt n 59 de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, du 6 avril 1995, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1382 du Code civil, 398, 427, 512, 522, 551, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Henri Y... coupable d'infractions à la législation sur l'information et la formation des salariés à la sécurité, a prononcé en conséquence sa condamnation à la peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis, et au paiement de dommages-intérêts envers les parties civiles ;

"aux motifs que, lors de l'accident, Alain X..., comme d'ailleurs les deux autres salariés occupés sur le chantier, ne portait pas de casque de protection, pourtant rendu obligatoire par la réglementation sur le type de chantier ;

que les explications du prévenu selon lesquelles les dispositifs de protection étaient à la disposition de ses salariés, ne sauraient l'exonérer de sa responsabilité pénale dans la mesure où il lui appartenait de veiller personnellement au respect effectif de la réglementation, notamment lors des visites quotidiennes, qu'il a déclaré effectuer auprès de ses équipes de salariés ;

qu'il n'est pas sérieusement contestable que si Alain X... avait porté son casque de protection, les conséquences du choc auraient été moins graves et auraient pu ne pas entraîner la mort ;

que, Henri Y... a commis une faute personnelle d'imprudence qui, ajoutée au défaut de protection individuelle, a entraîné la mort d'Alain X... ;

que le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné l'affichage et la publication de la décision, ces mesures accessoires n'étant pas légalement prévues pour des faits d'homicide involontaire commis sous l'empire du Code pénal de 1810, la rédaction de la prévention ne permettant pas d'affirmer que le prévenu ait été poursuivi pour infraction à la réglementation du travail ;

"alors, d'une part, que tout prévenu a droit à être informé d'une manière détaillée de la nature et de la cause de la prévention dont il est l'objet et qu'il doit, par suite, être en mesure de se défendre sur les différents chefs d'infraction dont il est l'objet ;

que, dès lors, la cour d'appel qui, constatant que la rédaction de la prévention ne permettait pas d'affirmer que le prévenu ait été poursuivi pour infraction à la réglementation du travail, a néanmoins confirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré Henri Y... coupable d'une infraction à la législation sur l'information et la formation des salariés à la sécurité, a méconnu à la fois l'étendue des faits déférés à sa connaissance et les droits de la défense ;

"alors, d'autre part, que la cour d'appel a essentiellement reproché au prévenu de ne pas avoir veillé au respect de la réglementation en matière de sécurité, notamment celle au port du casque de sécurité ; que, dès lors, l'arrêt attaqué, qui s'est prononcé sur des faits distincts de ceux visés éventuellement à la prévention, concernant uniquement l'information et la formation des salariés en matière d'utilisation des équipements de protection individuelle, et n'a pas constaté l'acceptation d'Henri Y... afin d'être jugé sur des faits étrangers à la prévention, a violé les textes visés au moyen" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 221-6 du Code pénal, 1382 du Code civil, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Henri Y... coupable d'homicide involontaire sur la personne d'Alain X..., a condamné celui-ci à la peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis, et sur les intérêts civils, a condamné Henri Y... à payer diverses sommes aux parents ainsi qu'aux frères et soeurs d'Alain X... en réparation de leurs préjudices moraux ;

"aux motifs qu'il appartenait au chef d'entreprise d'organiser le chantier, de donner des instructions précises relatives à la sécurité, et de veiller personnellement à ce qu'elles soient respectées ; qu'en particulier, il aurait dû imposer que, lors de la chute d'un chêne abattu, aucun salarié ne se trouve dans la zone de chute ou dans la zone où il puisse être, par contrecoup, heurté et que la zone de chute du chêne soit débarrassée de tous autres petits arbres sur pied ou coupés susceptibles d'être projetés lors de leur heurt par des éléments du chêne abattu ;

qu'Henri Y..., en ne veillant pas au respect de cette élémentaire prudence par des instructions précises, par une formation de ses salariés, par les contrôles effectifs sur le terrain, a commis une faute personnelle d'imprudence qui, ajoutée au défaut de protection individuelle, a entraîné la mort d'Alain X... ;

"alors que la cour d'appel n'a aucunement caractérisé la faute d'imprudence retenue à l'encontre d'Henri Y... en se bornant à énoncer qu'il aurait dû imposer qu'aucun salarié ne se trouvât dans une zone où il pouvait être heurté par contrecoup par un autre arbre et que la zone de chute du chêne fût débarrassée de tous autres petits arbres sur pieds ou coupés, susceptibles d'être projetés lors de leur heurt pas des éléments du chêne abattu ;

qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué s'est prononcé par une série de motifs sur les conditions d'abattage des arbres, qui sont exclues des méthodes de faire en usage dans la profession de bûcheron, lesdits motifs étant donc inopérants, et n'a, par suite, pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que le prévenu est poursuivi pour avoir causé la mort d'un ouvrier de la société dont il était alors le gérant, par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, en l'espèce par les articles R. 233-43 et R. 233-44 du Code du travail relatifs à l'information et à la formation des travailleurs utilisant des équipements de protection individuelle ;

Attendu que, pour le déclarer coupable de ce délit, la cour d'appel, après avoir relevé que le salarié mortellement blessé, qui participait à l'abattage d'arbres, ne portait pas de casque de protection au moment de l'accident, déduit des circonstances de fait qu'elle décrit que le chef d'entreprise n'avait pas donné de consignes précises de sécurité à ses ouvriers ni assuré leur formation quant au port des dispositifs de protection ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent en tous ses éléments constitutifs le délit d'homicide involontaire, seul poursuivi en l'espèce, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués ;

Que, dès lors, les moyens ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Le Gunehec président, Mme Batut conseiller rapporteur, MM. Milleville, Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, MM. Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-82369
Date de la décision : 27/02/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Hygiène et sécurité des travailleurs - Responsabilité pénale - Chef d'entreprise - Obligation d'assurer une formation en matière de sécurité - Travailleurs utilisant des équipements de protection individuelle.


Références :

Code du travail L231-3-1, R233-43 et R233-44

Décision attaquée : Cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, 06 avril 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 fév. 1996, pourvoi n°95-82369


Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le GUNEHEC

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:95.82369
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