AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / Mme Suzanne X..., née Y...,
2 / M. Jean-Michel X..., En présence de M. Jean X..., en cassation d'un jugement rendu le 11 mai 1992 par le tribunal de grande instance de Grasse (4e Chambre, 1re Section) ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 1995, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Grégoire, conseiller rapporteur, MM. Thierry, Renard-Payen, Chartier, Ancel, Durieux, conseillers, M. Savatier, Mme Bignon, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat des consorts X..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. Jean X... et aux demandeurs au pourvoi de ce que M. Jean X... s'associe aux moyens produits ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 1246 et 1262 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que, sauf cas exceptionnel prévu à l'article 1247 du même Code, où l'audition de la personne à protéger est de nature à porter préjudice à sa santé, le juge des tutelles ne peut prononcer l'ouverture d'une curatelle sans avoir entendu l'intéressé et lui avoir donné connaissance de la procédure engagée ;
que cette règle est d'ordre public ;
Attendu que M. Jean X... a été placé sous le régime de la curatelle sans que ni le juge des tutelles, ni le tribunal de grande instance aient procédé à son audition et sans qu'une décision motivée ait constaté que cette mesure fût inopportune ;
que, dès lors, la cassation est encourue ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 mai 1992, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Grasse ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Nice ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal de grande instance de Grasse, en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du six février mil neuf cent quatre-vingt-seize.