AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de LAROSIERE de CHAMPFEU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de la société civile professionnelle LE BRET et LAUGIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Louis, - LE Y... Gisèle, contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, 3ème chambre, en date du 29 septembre 1994, qui, a condamné Louis Z... à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, pour infraction aux règles sur la facturation et abus de biens sociaux, et Gisèle Le Gall à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende pour recel d'abus de biens sociaux et banqueroute par détournement d'actif, et qui a prononcé sur les réparations civiles ;
Vu le mémoire ampliatif, commun aux deux demandeurs, et le mémoire en défense produits ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué précise que les débats se sont déroulés comme suit : "la Cour a entendu :
"Mme Algier, conseiller, en son rapport de l'affaire ;
le prévenu en son interrogatoire ;
le ministère public en ses réquisitions ;
le conseil du prévenu en sa plaidoirie ;
Me C..., conseil des consorts D... et de la société Sopia en sa plaidoirie ;
Me B..., conseil de Me X..., partie civile, en sa plaidoirie ;
le prévenu en ses dernières explications" ;
"alors qu'aux termes de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, soit le 2 septembre 1993, les parties en cause d'appel ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 du même Code ;
qu'il s'ensuit que la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public doivent être présentées avant la défense du prévenu ;
qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt établissent que les deux conseils des parties civiles ont présenté leurs demandes après la plaidoirie du conseil du prévenu ;
que l'obligation ainsi imposée au prévenu de présenter sa défense avant l'intervention de la partie civile, a porté atteinte aux intérêts de la défense, de sorte que l'arrêt attaqué a violé les textes susvisés" ;
Attendu que si l'arrêt mentionne que Louis Z..., seul prévenu comparant, a présenté sa défense avant le ministère public dans l'ordre prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale en leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise que le prévenu a eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité invoquée n'a pas porté atteinte aux droits de ce demandeur ;
Que Gisèle Le Gall, qui a eu connaissance de la citation à comparaître à l'audience de la cour d'appel, à laquelle elle ne s'est pas présentée, sans fournir d'excuse, est sans qualité pour invoquer ce grief ;
Que le moyen ne saurait dès lors être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6-1 et 6-3 a.) et b.) de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité des poursuites présentée par les prévenus ;
"aux motifs que l'ouverture d'une procédure d'instruction n'est nullement obligatoire ni nécessaire lorsque les éléments recueillis lors de l'enquête préliminaire sont suffisants ;
qu'en l'espèce, la procédure d'enquête menée par le SRPJ de Rennes comporte de nombreuses auditions, ainsi que divers documents comptables ;
que les citations délivrées aux prévenus sont précises et de nature à leur permettre de préparer utilement leur défense ;
"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne a droit à un procès équitable ;
que si le Parquet est libre de choisir entre l'ouverture d'une instruction et la voie de la citation, cette dernière procédure doit être exclue si elle ne peut assurer la garantie d'un procès équitable ;
qu'en l'espèce, la complexité de l'affaire relative à de prétendues infractions d'ordre économique et à la législation sur les sociétés commerciales, ainsi que le fait que Gisèle Le Gall, souffrante pendant l'enquête, n'avait pas été entendue dans le cadre de celle-ci, nécessitait manifestement l'ouverture d'une instruction ;
qu'il s'ensuit que la saisine du tribunal correctionnel par citation, sans instruction, à la suite d'une seule enquête policière non contradictoire à l'égard de Gisèle Le Gall et dans le cadre de laquelle Louis Z..., qui n'a été entendu que pendant sa garde à vue, n'a pu s'expliquer sereinement, a privé les prévenus d'un procès équitable, de sorte que l'arrêt attaqué a violé le texte susvisé ;
"alors, d'autre part, qu'aux termes de l'article 6-3 de la Convention européenne des droits de l'homme, tout accusé a droit à être informé d'une manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui, et à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; qu'en l'espèce, les citations du 7 janvier 1993 se bornaient à proposer, en des termes hermétiques, des qualifications et à préciser les textes estimés applicables, sans énoncer de façon claire et détaillée les faits poursuivis ;
qu'au surplus, et compte tenu de la complexité de l'affaire, le délai entre les citations du 7 janvier 1993 et l'audience du 13 mai 1993 était insuffisant pour préparer efficacement la défense des prévenus ;
qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué a violé le texte susvisé, ainsi que les droits de la défense" ;
Attendu que les prévenus ont soulevé la nullité des poursuites, tirée de ce qu'ils n'ont pu bénéficier d'un procès équitable, ni disposer des facilités nécessaires à la préparation de leur défense, ni connaître le détail des accusations portées contre eux, en l'absence d'information préparatoire ;
Attendu que, pour rejeter cette exception, les juges énoncent que l'ouverture d'une information est seulement facultative en matière correctionnelle ;
que les investigations pratiquées lors de l'enquête préliminaire sont complètes ;
que le procureur de la République, qui a fait délivrer aux prévenus des citations énonçant avec précision les faits qui leur sont imputés, a usé d'une faculté que lui ouvre la loi en recourant à ce mode de saisine de la juridiction ;
qu'ils ajoutent que le délai sollicité par les prévenus pour préparer leur défense devant le tribunal correctionnel leur a été accordé du 4 mars au 13 mai 1993 ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que les éléments de preuve recueillis au cours de l'enquête ont été soumis au débat contradictoire, et qu'en l'espèce, la procédure de la citation directe à permis le jugement de l'affaire dans un délai raisonnable, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable faute d'avoir été invoqué devant les juges du second degré en ce qui concerne Gisèle Le Gall, et mal fondé en ce qu'il est invoqué par Louis Z..., ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 437-3 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Louis Z... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société anonyme Presse de Bretagne et l'a condamné à une peine d'emprisonnement, ainsi qu'à une peine d'amende, en le condamnant également au paiement de diverses sommes aux parties civiles ;
"aux motifs que Louis Z... a été PDG de la SA Presse de Bretagne de 1984 à 1989, puis vice-président jusqu'au 31 mai 1990, et dirigeait en fait l'unité d'imprimerie de la Sirep dans laquelle il avait des intérêts ;
qu'en sa qualité de fournisseur de la Sirep, la presse de Bretagne était réglée dans un délai moyen de 75 jours alors que la Presse de Bretagne réglait la SIREP dans un délai de 30 jours à hauteur de 50 % et le solde
10 jours plus tard ;
que la prospection de clientèle pour la Sirep était effectuée par les commerciaux salariés de la société Presse de Bretagne ;
que le montage des plaques offset était facturé par le service film-montage de la Presse de Bretagne, la Sirep ne réglant que la fourniture des plaques vierges ;
que le montage et la maintenance d'une rotative de la Sirep ont été réalisés par un salarié de la Presse de Bretagne à un taux horaire très favorable ;
qu'une cercleuse a été mise à la disposition de la Sirep pendant 30 mois gratuitement ;
qu'un chariot élévateur d'occasion a été cédé à la Sirep à un prix avantageux ;
que pour obtenir le marché d'impression de la revue Le Rennais, Louis Z... a favorisé la Sirep ;
"alors, d'une part, que l'abus de biens sociaux n'est punissable que lorsque l'acte d'usage est contraire à l'intérêt social, c'est-à -dire de nature à compromettre l'intégrité de l'actif social et les possibilités de recours futur à l'emprunt, et excède notablement les facultés de la société ;
qu'en se bornant, pour qualifier d'abus de biens sociaux, les actes d'administration de Louis Z..., dirigeant de la SA Presse de Bretagne, en faveur de la SARL Sirep, sous traitante de qualité de la société anonyme, sans préciser en quoi ces actes étaient contraires à l'intérêt de la SA Presse de Bretagne, c'est-à -dire de nature à compromettre l'actif social, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, d'autre part, que la qualification d'abus de biens sociaux suppose que le dirigeant a agi de mauvaise foi, étant précisé que l'élément intentionnel doit être caractérisé par les juges du fond ;
qu'en ce qui concerne les nombreux faits retenus à charge, la cour d'appel ne caractérise absolument pas la mauvaise foi de Louis Z... ;
que de son côté, le tribunal n'exclut la bonne foi du dirigeant social qu'en ce qui concerne le retard de facturation des plaques offset, retard pour lequel l'intéressé avait invoqué l'erreur ;
que dès lors, en omettant de caractériser l'élément intentionnel concernant la quasi-totalité des faits retenus à charge, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, enfin, qu'en ce qui concerne le retard de facturation des plaques offset, pour lequel le tribunal avait exclu l'erreur, c'est-à -dire la bonne foi de Louis Z..., ce dernier faisait valoir devant la cour d'appel (conclusions au fond page 7) que c'est lui-même qui avait alerté, le 8 juin 1988, le commissaire aux comptes de l'absence de facturation due à un dysfonctionnement du service comptable, qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle, de nature à établir la bonne foi du prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
Attendu que, pour déclarer Louis Z... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Presse de Bretagne qu'il dirigeait, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que cette société a accordé, sans aucune contrepartie, des avantages à la Sirep dans le règlement de ses factures, et qu'aucune entreprise en relations avec elle ne bénéficiait des mêmes facilités ;
que la cour d'appel relève que des prestations ont été effectuées gratuitement ou à bas prix par la société Presse de Bretagne au profit de la Sirep, qui a bénéficié de matériel cédé gratuitement ou à un prix inférieur à sa valeur vénale par la SA Presse de Bretagne ;
qu'ils ajoutent que l'activité de Louis Z... a fait perdre des marchés à la société Presse de Bretagne au profit de la Sirep, dont il était le dirigeant de fait et dont sa concubine, Gisèle Le Gall, était gérante ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, notamment intentionnel, le délit d'abus de biens sociaux dont elle a reconnu le prévenu coupable ;
Que le moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, 121-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Louis Z... coupable de facturation non conforme et a prononcé à son encontre des condamnations tant pénales que civiles ;
"aux motifs que trois factures ont été mise, annulées puis remplacées par des factures minorées ; qu'en ce qui concerne la facturation tardive du montage des plaques offset, l'erreur ne peut être admise, s'agissant de prestations se déroulant sur plusieurs mois ;
"alors, d'une part, qu'il n'y a pas de délit sans intention de commettre ;
que la facturation non conforme punie d'une amende de 5 000 Francs à 100 000 francs est un délit ;
qu'en se bornant, s'agissant des factures minorées, à énoncer que trois factures avaient été émises par la société Presse de Bretagne, puis annulées et remplacées par des factures minorées, sans s'expliquer sur l'élément intentionnel de l'infraction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, d'autre part, qu'en ce qui concerne le retard de facturation des plaques offset, Louis Z... faisait valoir que c'est lui-même qui avait alerté, le 8 juin, le commissaire aux comptes de l'absence de facturation due à un dysfonctionnement du service comptable ;
qu'en excluant la réalité d'une erreur, au seul motif de sa persistance, sans répondre à cette articulation essentielle, de nature à exclure la mauvaise foi du prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
Attendu que, pour déclarer Louis Z... coupable d'infractions aux règles sur la facturation, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, énonce que le prévenu a fait remplacer des factures régulières par d'autres qui étaient minorées et ne reflétaient plus la réalité des prestations qu'elles concernaient, sans porter mention d'aucune remise ;
Attendu que les juges relèvent aussi que l'intéressé s'est abstenu de faire procéder, au fur et à mesure de leur exécution, à la facturation de divers travaux, échelonnés sur plusieurs mois, et écartent les explications apportées sur ce point ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie et a caractérisé en tous ses éléments, notamment intentionnel, les infractions aux règles sur la facturation dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision sans encourir le grief du moyen, lequel doit être rejeté ;
Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation des articles 425-4 et 431 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a décadré Louis Z... coupable d'abus de biens sociaux, au préjudice de la SARL Sirep et a prononcé contre lui des condamnations tant pénales que civiles ;
"aux motifs que l'enquête a permis d'établir que l'unité d'imprimerie de la Sirep a été en fait créée par Louis Z... qui l'a dirigée en fait dès sa création ; que Gisèle Le Gall, concubine de Louis Z..., a été engagée par la société Sirep en 1987, en qualité d'agent de production et est devenue gérante de droit en 1990 ; que sa rémunération a été fixée successivement à 15 000 francs, puis 25 000 francs pour atteindre 30 000 francs, alors même qu'elle assurait des tâches de secrétariat, Louis Z... étant co-gérant de fait ;
"alors, d'une part, que l'abus de biens sociaux suppose un acte d'usage contraire à l'intérêt social, commis par le prévenu ;
qu'en déclarant Louis Z... coupable d'abus de biens sociaux au motif de la rémunération "manifestement excessive" de Gisèle Le Gall, agent de production, puis, depuis 1990, gérante de droit de la société Sirep, sans constater que cette rémunération avait été fixée par Louis Z..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, d'autre part, que Louis Z... faisait valoir que pendant la période allant de 1987 au 31 août 1990, le salaire de Gisèle Le Gall avait été fixé par M. E..., gérant de la société Sirep, et non par lui-même ;
qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
Sur le sixième moyen de cassation pris de la violation des articles 460, alinéa 1er du Code pénal abrogé, 321-1 du Code pénal 425-4 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gisèle Le Gall coupable de recel d'abus de biens sociaux, et prononcé à son encontre des condamnations tant pénales que civiles ;
"aux motifs que Gisèle Le Gall a bénéficié de rémunérations excessives par rapport à l'activité qu'elle menait au profit de la Sirep ;
qu'en sa qualité de gérante de droit et de concubine de Louis Z..., elle était particulièrement bien éclairée sur la marche de l'entreprise ;
"alors, d'une part, que le délit de recel n'est constitué que si les choses détenues proviennent d'une infraction ;
qu'en l'espèce, la cassation intervenant sur le cinquième moyen de cassation de l'arrêt attaqué, en ce qu'il a déclaré Louis Z... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Sirep, entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a déclaré Gisèle Le Gall coupable de recel d'abus de biens sociaux ;
"alors, d'autre part, que le délit de recel n'est constitué que si le prévenu avait connaissance de l'origine frauduleuse de la chose recelée ;
que sur ce point, les énonciations de la cour d'appel selon lesquelles Gisèle Le Gall était la concubine de Louis Z... et la gérante de droit de la société dans laquelle elle n'exerçait en fait que des tâches de secrétariat, sont insuffisantes et ne caractérisent pas l'élément intentionnel de l'infraction" ;
Sur le septième moyen de cassation pris de la violation des articles 196, 197-2 , 198 de la loi du 25 janvier 1985, 402 du Code pénal abrogé, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gisèle Le Gall coupable de banqueroute, par détournement d'actifs de la société Sirep et a prononcé à son encontre des condamnations tant pénales que civiles ;
"aux motifs adoptés que la rémunération excessive de Gisèle Le Gall, gérante de droit de la société Sirep à partir de 1990, mais n'éxécutant en réalité que des tâches de secrétariat, n'avait pas été diminuée à partir de 1990, alors que la société mise en redressement judiciaire le 12 février 1992, connaissait des pertes très importantes ;
"alors, d'une part, que le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose l'existence d'un acte positif de disposition accompli sur un élément du patrimoine du débiteur, étant précisé qu'un usage même abusif des biens de la société ne caractérise pas la banqueroute ;
que la cour d'appel, qui ne constate aucun acte positif de disposition d'un élément du patrimoine social, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors, d'autre part, que le délit de banqueroute par détournement d'actif suppose l'existence d'un acte de disposition accompli sur un élément du patrimoine social, après la date de cessation des paiements ;
que faute de préciser la date de cessation des paiements de la société Sirep, et de constater que cette société était, au moment de consentir les rémunérations litigieuses, en état de cessation des paiements, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que la cour d'appel, pour déclarer coupables, Louis Z... d'abus des biens de la SARL Sirep, et Gisèle Le Gall, de recel de fonds provenant de cette infraction, et de banqueroute par détournement de l'actif de cette société, énonce, par motifs propres et adoptés, que le premier dirigeant de fait de la Sirep a fixé la rémunération de la seconde, qui en était gérante de droit ;
Que les juges constatent que, sous le couvert des fonds versés à sa concubine, Louis Z... a voulu rétribuer sa propre activité au profit de la Sirep, que la rémunération de Gisèle Le Gall, perçue après la date de cessation des paiements, en décembre 1991, et jusqu'au redressement judiciaire prononcé le 18 février 1992 était manifestement excessive au regard des travaux qu'elle assurait et de la situation financière de la société ;
Qu'en l' état de ces énonciations caractérisant des actes de disposition contraires à l'intérêt social, l'arrêt attaqué, qui n'avait pas à suivre les prévenus dans le détail de leur argumentation, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en conséquence, les moyens ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. de Larosière de Champfeu conseiller rapporteur, MM.
Culié, Schumacher, Martin, Mmes Françoise F..., Chevallier conseillers de la chambre, M. de A... de Massiac conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;