Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif critiqué, qu'aux termes d'un " pré-contrat " en date du 5 septembre 1991, auquel était annexée une " offre d'achat " datée du 2 avril 1991, trois sociétés, dont la société Union laitière normande (ULN), celle-ci par l'intermédiaire de sa filiale espagnole, la société Iberlat, ont promis à la société Tabacalera de lui acheter des actions de la société Lactaria Espaola (Lesa), en se réservant le droit de retirer leur offre si les pertes de cette société étaient supérieures à un certain montant ; qu'il était précisé que, si l'acte de cession n'était pas signé avant le 31 décembre 1991, pour des raisons non imputables à la société Tabacalera, il lui serait versé une pénalité ; que la société Banco Exterior de Espaa a garanti à la société Tabacalera le paiement d'une somme déterminée, à l'échéance du 15 janvier 1992, à première demande, sur son affirmation que le défaut de signature du contrat de cession d'actions à la date fixée ne lui était pas imputable ; que la Banque française du commerce extérieur (BFCE) a contre-garanti, dans les mêmes conditions, la Banco Exterior de Espaa ; qu'un rapport d'audit ayant révélé que les pertes de la société Lesa étaient supérieures au montant prévu, la société Tabacalera a été informée de ce que l'offre d'achat d'actions était retirée ; que, le 2 janvier 1992, la société Tabacalera a appelé la garantie en présentant à la Banco Exterior de Espaa un certificat indiquant que le contrat d'acquisition d'actions n'avait pas été signé pour des raisons qui ne pouvaient lui être imputées ; qu'après avoir appelé en vain la contre-garantie, la Banco Exterior de Espaa a, le 15 janvier 1992, payé la société Tabacalera ; que le juge des référés a autorisé la BFCE à ne pas payer tant qu'une décision sur le fond ne serait pas intervenue ; que la Banco Exterior de Espaa a assigné les sociétés Iberlat et ULN ainsi que la BFCE devant le Tribunal ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la Banco Exterior de Espaa, l'arrêt retient que l'appel par la société Tabacalera de la garantie émise à son profit par la Banco Exterior de Espaa est abusif puisqu'un document émanant d'un cabinet de révision comptable a établi que les conditions de la dénonciation de la cession étaient réunies et que le donneur d'ordre a effectivement usé de la faculté qui lui était ouverte par le contrat ; qu'il retient, en outre, que les sociétés ULN et Iberlat peuvent opposer cet abus au garant et au contre-garant puisqu'il ressort des éléments du dossier qu'avant le paiement effectué par la Banco Exterior de Espaa le 15 janvier 1992, cette banque a été informée dès le 27 décembre 1991 que l'attestation fournie par la société Tabacalera bénéficiaire n'était pas exacte ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par un motif impropre à caractériser la connaissance qu'avait la Banco Exterior de Espaa, de la réalité du caractère manifestement abusif de l'appel de la garantie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 mars 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans.