AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Max Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 30 juin 1993 par la cour d'appel de Bordeaux (6e chambre), au profit de Mme Michelle Z..., épouse X..., demeurant "Le Roc", Saint-Vivien, 24230 Velines, défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 1995, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Thierry, conseiller rapporteur, MM. Grégoire, Renard-Payen, Chartier, Ancel, Durieux, conseillers, MM. Savatier, Bignon, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Thierry, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. Y..., de Me Capron, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, tel qu'il est énoncé au mémoire en demande et reproduit en annexe du présent arrêt :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que M. Y... et Mme Z..., qui étaient tous deux divorcés avec enfants, ont vécu en concubinage de 1982 à 1989 ;
que, durant cette période, M. Y... a consenti à Mme Z... diverses libéralités mobilières et immobilières, dont il a évalué le montant global à 1 500 000 francs ;
que, le 21 février 1990, quelques mois après leur rupture, M. Y... a assigné Mme Z... en remboursement de cette somme, sur le fondement de l'article 1088 du Code civil frappant de caducité les donations faites en faveur du mariage si celui-ci ne s'ensuit pas ;
que l'arrêt attaqué (Bordeaux, 30 juin 1993) l'a débouté de cette demande ;
Attendu, d'abord, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve soumis à son examen, que la cour d'appel a estimé que M. Y... n'établissait pas que les libéralités par lui consenties à Mme Z... étaient subordonnées à la condition de leur mariage ;
que, dès lors, l'article 1088 étant inapplicable, il ne s'agissait plus que de simples donations entre concubins, comme telles irrévocables ;
Attendu, ensuite, que l'aveu fait devant un expert ne constitue pas un aveu judiciaire s'imposant au juge, lequel dispose d'un pouvoir souverain pour retenir ou écarter ce qui ne forme qu'un aveu extrajudiciaire ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 10 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Le condamne également, envers Mme X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
1855