AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf novembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Ernesto, partie civile, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de PARIS, en date du 27 septembre 1994, qui, dans la procédure suivie contre Francine X..., épouse Y..., des chefs de faux et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 199 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué mentionne qu'à l'audience du 1er juillet 1994 a été entendue "Marguerite Laurent, conseiller, en son rapport, -lecture faite par M. Beyer, président"- ;
"alors qu'il résulte des dispositions de l'article 199 du Code de procédure pénale que le rapport doit être fait à l'audience de la chambre d'accusation par le conseiller chargé de celui-ci et que les mentions précitées ne permettent pas de savoir si cette formalité a été régulièrement accomplie, le conseiller chargé du rapport n'étant pas, en l'espèce, le président qui a lu celui-ci" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que Mme Laurent, conseiller, a été entendue en son rapport ;
qu'il n'importe que, de surcroît, lecture en ait été donnée par le président ;
Que dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 150 et suivants du Code pénal, 441-1 et suivants du nouveau Code pénal, 86 et 593 du Code de procédure pénale, défaut, insuffisance et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, sur la plainte déposée pour faux et usage de faux ;
"aux motifs que la partie civile n'est plus recevable à solliciter un complément d'information sous forme, notamment, de nouvelle expertise, en l'état d'un refus précédent, après notification du 18 janvier 1994, de l'avis de l'article 175 du Code de procédure pénale, -refus par ordonnance du 7 février 1994-, confirmé par une ordonnance ayant caractère définitif, rendue par le président de la chambre d'accusation le 2 mars 1994 ; qu'en tout état de cause, la Cour dispose des éléments nécessaires et suffisants à sa conviction ;
qu'il résulte à l'évidence des mesures d'information et notamment des expertises déjà diligentées qu'il n'existe aucun élément indiscutable de nature à établir l'existence d'un faux et, à le supposer même établi, que Francine X..., épouse Y..., en soit l'auteur ou en fait sciemment usage ;
qu'il importe peu à cet égard de savoir si la partie civile est ou non l'auteur de la signature litigieuse, le seul point à considérer pour la Cour étant qu'il n'existe, en l'état, aucune charge suffisante contre la mise en examen ou quiconque d'en être l'auteur ;
que les faits -objets de la plainte- ne sont susceptibles d'aucune autre qualification pénale (arrêt p. 6) ;
"alors que, d'une part, les juridictions d'instruction ont le devoir d'informer et qu'en l'espèce, les faits dénoncés n'étant pas d'emblée insusceptibles d'incrimination, il était nécessaire de rechercher si les éléments constitutifs d'une infraction pénale n'étaient pas réunis et ne pouvaient pas comporter une qualification pénale au regard des articles 150 et suivants du Code pénal, 441-1 et suivants du nouveau Code pénal ;
"qu'ainsi l'arrêt attaqué, qui constitue en fait une véritable décision de refus d'informer, a violé les textes susvisés en se limitant à retenir qu'il n'existait aucun élément indiscutable de nature à établir l'exisence d'un faux et qu'il n'y avait aucune charge suffisante contre quiconque d'être l'auteur de la signature ;
"alors que, d'autre part, ne peut motiver une décision de refus d'informer, un élément de pur fait qu'il appartient à l'information de faire apparaître ou de vérifier ;
qu'en l'espèce, l'existence de la signature utilisée à l'encontre du plaignant comme étant la sienne, n'étant pas contestée, il importait nécessairement de savoir si la partie civile en était ou non l'auteur, et, dans la négative de rechercher qui a signé le document litigieux ;
que, dès lors, en considérant qu'il importait peu de savoir si la partie civile étai ou non l'auteur de la signature litigieuse, et qu'il n'y avait aucune charge suffisante contre quiconque d'être l'auteur de cette signature, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"alors qu'en outre, en admettant même que l'arrêt attaqué ne soit pas qualifié de décision de refus d'informer, les motifs retenus par la chambre d'accusation, ne suffisent pas à justifier une décision de non-lieu à suivre car il incombe à la juridiction d'instruction de ne pas se satisfaire d'éléments discutables, mais de faire apparaître ou de vérifier qui est l'auteur de la signature litigieuse ;
qu'ainsi, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
"alors que la partie civile a fait valoir que le document litigieux avait été dactylographié par on ne sait qui sur une machine dont on ignore tout, sans le concours des conseils de la société, qu'il a été dissimulé à tout le monde jusqu'au 4 mai 1992, que ce document entier présentait des indices intrinsèques et extrinsèques de nature à le faire soupçonner de faux et qu'une confrontation, entre Ernesto Z... et Francine Y..., refusée pour des raisons non convaincantes, aurait été utile sur ce point ;
qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions concernant la falsification du document tout entier, l'arrêet attaqué n'a pas satisfait, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;
Vu l'article 575, 2ème alinéa,6 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte de la partie civile, a, contrairement aux allégations de celle-ci, répondu sans insuffisance aux articulations du mémoire prétendument délaissées et énoncé les motifs dont elle a déduit qu'il n'existait pas charges suffisantes, contre Francine X..., d'avoir commis les infractions reprochées ;
Attendu que le moyen proposé qui revient à discuter les motifs de fait et de droit retenus par les juges, ne contient aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de la chambre d'accusation en l'absence de recours du ministère public ;
Qu'il est dès lors irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Grapinet conseiller rapporteur, MM. Simon, Aldebert, Farge conseillers de la chambre, Mme Ferrari conseiller référendaire, M. le Foyer de Costil avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;