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30/10/1995 | FRANCE | N°95-80864

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 octobre 1995, 95-80864


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller Le GALL, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- C... Marcel, contre l'arrêt de la cour d'assises de PARIS du 13 janvier 1995 qui l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle

pour assassinat ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller Le GALL, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- C... Marcel, contre l'arrêt de la cour d'assises de PARIS du 13 janvier 1995 qui l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle pour assassinat ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 310 du Code de procédure pénale et 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des principes généraux du droit et violation des droits de la défense ;

"en ce qu'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats que le président a versé aux débats en vertu de son pouvoir discrétionnaire les éléments d'une procédure pénale "empoisonnements c/X..." portant le n 725 du cabinet A... puis 641 du cabinet Le Houx ;

"1 - alors que, si l'article 310 du Code de procédure pénale permet au président en vertu de son pouvoir discrétionnaire d'ordonner le versement aux débats d'une autre procédure dont la production peut être de nature à éclairer la Cour et le jury et à contribuer à la manifestation de la vérité, c'est à la double condition qu'une telle jonction ait un caractère contradictoire et que toutes les parties intéressées aient pu en débattre ;

que cette seconde condition doit être effective ;

que la seule communication des pièces du dossier précité à l'audience de la cour d'assises n'a pas permis, en l'espèce, à l'accusé de débattre de leur portée dans la mesure où dans la procédure n 725 qui s'est terminée par un non-lieu, l'accusé, en sa qualité de témoin, n'avait pas eu accès au dossier et que, dès lors, le président n'a pas fait un usage régulier de son pouvoir discrétionnaire ;

"2 - alors que l'égalité des armes, élément essentiel du procès équitable, suppose que la défense et l'accusation aient accès aux mêmes éléments d'information et qu'en versant aux débats partie d'une procédure à laquelle le ministère public et la partie civile, Mme veuve Y..., avaient eu accès dans son intégralité cependant que l'accusé se voyait communiquer et opposer uniquement certaines pièces à charge, le président a violé les dispositions combinées des articles 310 du Code de procédure pénale et l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales" ;

Attendu que le procès-verbal des débats mentionne qu'au cours de l'interrogatoire de l'accusé, le président a indiqué qu'en vertu de son pouvoir discrétionnaire, il versait aux débats diverses pièces provenant d'un autre dossier ;

que le même procès-verbal constate que ces pièces ont été communiquées à toutes les parties et qu'aucune observation n'a été formulée ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations, il n'en résulte aucune violation des dispositions légales et conventionnelles visées au moyen, dès lors qu'après la communication des pièces dont s'agit à l'accusé et à ses conseils, il n'a été sollicité par eux aucun délai pour les examiner ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 310 du Code de procédure pénale, du principe de l'oralité des débats, ensemble violation des droits de la défense ;

"en ce que le président a communiqué - c'est-à -dire a donné lecture- à l'audience du 10 janvier 1995 d'un procès-verbal d'audition d'Eric B... en date du 1er février 1989 appartenant à la procédure n 725 instruite par le juge Grellier (coté D 43 à D 46) versée aux débats en vertu de son pouvoir discrétionnaire ;

"1 - alors que, devant la cour d'assises, le débat doit être oral et qu'en donnant lecture d'un procès-verbal d'audition de témoin acquis aux débats et comparant, avant que celui-ci ait fait à la barre sa déposition, le président a méconnu le principe susvisé et fait un usage manifestement irrégulier de son pouvoir discrétionnaire ;

"2 - alors que le principe de l'oralité des débats est d'ordre public et que sa violation ne peut être couverte par le silence de l'accusé ;

"3 - alors que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer par l'examen du procès-verbal dont la lecture a été faite en violation du principe susvisé qu' Eric B... s'était exprimé dans le cadre de la procédure distincte instruite par le juge Grellier sur la culpabilité de Marcel C... relativement aux faits soumis à l'examen de la cour d'assises et que dès lors la violation par le président, sous couvert du versement aux débats d'une procédure distincte, du principe de l'oralité des débats a porté une atteinte particulièrement grave aux droits de la défense" ;

Attendu qu'il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal des débats que le président ait donné lecture des dépositions d' Eric B..., témoin acquis aux débats, avant son audition par la cour d'assises ;

Que dès lors, le moyen manque en fait ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 156 et suivants, 168, 281 et 310 du Code de procédure pénale et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que selon les énonciations du procès-verbal des débats l'expert, le docteur Pierre Z..., expert non cité et qui avait été chargé de procéder à des expertises (ordonnance du 21 février 1983 du juge d'instruction M. A... - affaire empoissonnement c/X... dossier 525 (en réalité 725) a été entendu oralement en vertu du pouvoir discrétionnaire du président après avoir prêté serment dans les termes prescrits par l'article 168 du Code de procédure pénale ;

"1 - alors que les prescriptions de l'article 168 du Code de procédure pénale relatives aux serments des experts s'appliquent à toute personne entendue à l'audience fut-ce en vertu du pouvoir discrétionnaire du président à la condition qu'elle ait été chargée d'une mission d'expertise, soit au cours de l'information, soit à l'occasion d'un supplément d'information ordonné par le président ou par la cour d'assises, soit en application de l'article 60 du Code de procédure pénale pour procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques, soit enfin en application de l'article 74 du Code de procédure pénale pour apprécier la nature des circonstances d'un décès ;

qu'en revanche ne doit pas prêter le serment des experts, la personne commise pour procéder à une expertise dans le cadre d'une information pénale distincte ;

"2 - alors que le versement aux débats de manière sélective de la procédure portant, selon le procès-verbal des débats soit le n 725 soit le n 525 du cabinet du juge A... ne vaut pas jonction des deux procédures dont l'une s'est apparemment terminée par une ordonnance de non-lieu et l'autre par une décision de renvoi de Marcel C... devant la cour d'assises et que, dès lors, quand bien même le rapport médico-légal établi le 2 juin 1989 par les docteurs X... et Z... a été versé aux débats en vertu du pouvoir discrétionnaire du président, cette initiative ne permettait en aucun cas d'assimiler le docteur Z... à un expert commis aux cours de l'information ;

"3 - alors qu'il résulte des pièces versées aux débats par le président en vertu de son pouvoir discrétionnaire et tiré de la procédure n 725 du cabinet du juge A... que dans ladite procédure au cours de laquelle le professeur Z... avait, avec le professeur X... été commis en qualité d'expert pour examiner MM. B... et Y..., Marcel C... avait été entendu comme simple témoin ;

que, par conséquent, le rapport d'expertise en cause ne lui avait pas été notifié alors qu'il l'avait été à Mme veuve Y... partie civile ;

que, dès lors, ce document ne saurait être considéré à l'égard de l'accusé, comme un rapport d'expertise pouvant être discuté contradictoirement en tant que tel devant la cour d'assises en sorte qu'en aucun cas le professeur Z... ne pouvait être entendu après avoir prêté le serment des experts ;

"4 - alors que le versement aux débats de pièces d'une information distincte portant sur une infraction distincte n'est pas assimilable à un supplément d'information et que, dès lors, l'audition d'un expert au cours de cette information en vue de la recherche de la preuve d'une infraction qui n'a pas été soumise à l'appréciation de la cour d'assises ne peut avoir lieu après prestation du serment de l'article 168 ;

"5 - alors que le principe de l'égalité des armes s'oppose à ce qu'une personne qui est intervenue en qualité d'expert dans une procédure distincte de celle déférée à la cour d'assises et dans laquelle l'accusé a eu la qualité de simple témoin puisse être entendue en qualité d'expert par la cour d'assises dans la mesure même où l'autorité qui lui serait ainsi conférée devant cette juridiction ne pourrait pas être contrebalancée par la possibilité, pour l'accusé, de lui poser toutes les questions pertinentes, étant étranger au dossier dans lequel cette personne est intervenue" ;

Attendu que l'accusé ne saurait se faire un grief de ce qu'ait été prêté par le docteur Z..., dans les circonstances exactement rapportées au moyen, le serment prévu par l'article 168 du Code de procédure pénale dès lors qu'il ne s'y est pas opposé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Massé conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Le Gall conseiller rapporteur, M. Fabre, Mme Baillot, M. Farge conseillers de la chambre, MM. Nivôse, Poisot conseillers référendaires, M. Galand avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-80864
Date de la décision : 30/10/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(sur le premier moyen) COUR D'ASSISES - Débats - Président - Pouvoir discrétionnaire - Etendue - Pièces - Versement aux débats - Pièces nouvelles - Pièces extraites d'une autre procédure en cours d'instruction.

(sur le troisième moyen) COUR D'ASSISES - Débats - Témoins - Serment - Témoin entendu en vertu du pouvoir discrétionnaire du Président - Portée - Absence d'opposition des parties.


Références :

Code de procédure pénale 310, 168

Décision attaquée : Cour d'assises de Paris, 13 janvier 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 oct. 1995, pourvoi n°95-80864


Composition du Tribunal
Président : Président : M. MASSE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:95.80864
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