AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de LAROSIERE de CHAMPFEU, les observations de Me X... et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- E... Jacques, - Y... Christian, - MARONNE Gilbert, contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 31 octobre 1994, qui les a condamnés chacun à 1 an d'emprisonnement avec sursis et à 80 000 francs d'amende, le premier pour faux et usage de faux en écritures de commerce, les autres pour complicité de ces délits, et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation présenté au nom de Jacques E... et de Gilbert Maronne et pris des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'incident de procédure, l'exception de nullité du réquisitoire introductif et a condamné Jacques E..., Christian Y... et Gilbert D... à un an d'emprisonnement avec sursis et 80 000 francs d'amende chacun ;
"alors que le prévenu ne peut présenter sa défense avant l'audition de la partie civile et les réquisitions du ministère public ;
que Jacques E..., Christian Y... et Gilbert D... ont été entendus en leurs explications et moyens de défense avant les parties civiles et les réquisitions du ministère public (p. 8, dernier alinéa) ;
que la cour d'appel, en violant les textes susvisés, a porté une atteinte à leurs intérêts qui ne peut être réparée par la mention qu'ils ont eu la parole en dernier" ;
Sur le premier moyen de cassation présenté au nom de Christian Y... et pris de la violation des articles 513 en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993 entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, 460 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué précise que Christian Y..., prévenu, a été entendu en ses explications et moyens de défense avant les parties civiles et les réquisitions du ministère public ;
"alors qu'il résulte des textes précités que le prévenu doit, à peine de nullité, présenter sa défense après l'audition des parties civiles en leur demande et des réquisitions du ministère public ;
"alors, d'autre part, que si l'arrêt énonce que Me Meiffren, avocat de Christian Y..., a été entendu après le ministère public, et que Christian Y... a eu la parole en dernier, ces mentions ne suffisent pas à réparer l'atteinte portée aux intérêts du prévenu résultant de l'obligation, qui lui a été imposée en l'espèce, de présenter sa défense la premier" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, si l'arrêt mentionne que Jacques E..., Christian Y... et Gilbert D... ont présenté leur défense avant le ministère public, dans l'ordre prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale en leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise encore que les prévenus ont eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité invoquée n'a pas porté atteinte aux droits des demandeurs ;
Que les moyens ne sauraient dès lors être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté au nom de Jacques E... et de Gilbert Maronne et pris de la violation des articles 680 et suivants et 591 et 593 du Code de procédure pénale, tels qu'ils étaient en vigueur à l'époque des faits, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'incident de procédure ;
"aux motifs que les prévenus font valoir que dès le 14 octobre 1987, M. B..., maire de Saran, ayant été mis en cause comme ayant introduit la société Sicopar auprès de M. C..., alors que cette société n'aurait eu aucune activité réelle sur le parc de loisirs et que le but de son intervention aurait été un financement du parti communiste auquel appartenait Sicopar, M. le procureur de la République devait, sans délai, en application de l'article 681 du Code de procédure pénale, présenter une requête à la chambre criminelle de la Cour de Cassation afin de désigner la juridiction chargée de l'instruction ;
que de simples allégations sur les liens éventuels entre le maire, M. B..., et la société Sicopar et que la dénégation par la société Sicopar d'avoir eu des liens avec le parti communiste, sont des éléments insuffisants pour caractériser la mise en cause de M. B... susceptible d'être inculpé ;
que ce n'est que lorsqu'il envisage de donner suite à l'encontre de la personne que le procureur est tenu avant toutes poursuites de présenter des requêtes à la chambre criminelle ;
qu'en l'espèce, ni dans le réquisitoire introductif, ni dans le réquisitoire supplétif, le procureur de la République n'a engagé de poursuites à l'encontre de M. B..., maire de Saran ;
que, dès lors, l'exception de nullité doit être rejetée" ;
"alors qu'il suffit qu'un maire soit seulement susceptible d'être inculpé pour que le procureur de la République soit tenu de saisir sans délai la chambre criminelle de la Cour de Cassation ;
que la cour d'appel a estimé que cette procédure n'avait pas à s'appliquer, puisqu'aucune poursuite n'a été engagée à l'encontre de M. A..., maire de la commune de Saran ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé la loi par fausse interprétation du texte susvisé" ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la procédure, fondée sur la prétendue violation des dispositions alors en vigueur de l'article 681 du Code de procédure pénale, et motif pris que le maire de la commune de Saran était susceptible d'être inculpé à la date du réquisitoire introductif, l'arrêt attaqué énonce que cet élu, contre lequel de simples allégations non vérifiées avaient été portées, n'a pas été mis en cause dans des conditions susceptibles de conduire à son inculpation ;
Qu'en cet état la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation présenté au nom de Jacques E... et de Gilbert Maronne et pris de la violation des articles 80, 82, 86, 591 et 593 du Code de procédure pénale, tels qu'ils étaient applicables à l'époque des faits ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité du réquisitoire introductif fondée sur le visa des pièces postérieures ;
"aux motifs que les prévenus soutiennent que le réquisitoire du 15 octobre 1987 a été pris sur la base du procès-verbal 120/87 du SRPJ d'Orléans qui n'a été transmis à M. le procureur de la République que le 5 novembre 1987 ainsi qu'il résulte du cachet du SRPJ ; que cette pièce est composée d'un feuillet unique, intitulé "compte rendu enquête après identification", qu'elle porte dans une case en bas à gauche la date de transmission au procureur de la République du 5 novembre 1987 et dans une case en bas à droite, procédure 120/87 comprenant 57 procès-verbaux, 1 rapport ;
que cette pièce ne saurait constituer un procès-verbal, mais un simple compte rendu d'enquête reprenant très succinctement l'identité de l'auteur, l'énumération des victimes, le mode opératoire, le lieu de l'infraction ;
que l'examen de la procédure révèle qu'auraient été établis entre le 5 mai 1987 et le 5 octobre 1987, 57 procès-verbaux référencés par la police 120/1 à 120/57 et cotés dans le dossier d'instruction D 3 à D 65 qui ont été nécessairement transmis à M. le procureur de la République au plus tard le 15 octobre 1987, date du jour du réquisitoire, dans la mesure où le procès- verbal 120/57 mentionne que M. C..., placé en garde à vue, a été conduit devant le procureur de la République le 15 octobre 1987 à 9 heures 30 ;
qu'en visant comme pièces jointes : procès-verbal 120/87 du SRPJ d'Orléans, M. le procureur de la République ne visait pas le compte rendu d'enquête après identification, qui effectivement n'a été établi et transmis que postérieurement à la rédaction du procès-verbal de constatation et d'audition susvisé, mais ces procès-verbaux établis sous le n 120/87 ;
que d'ailleurs le rapport de synthèse en date du 30 octobre 1987 adressé à M. le procureur de la République et parvenu au cabinet d'instruction le 10 novembre 1987 fait état sur sa première page :
"pièces jointes : la réquisition et le dossier communiqué, 57 procès-verbaux du service, cotés 120/1 à 120/57 et leurs annexes (déjà transmis), vu album d'état des lieux en double exemplaire (dont un exemplaire vous a déjà été transmis), ainsi que les 57 procès-verbaux 120/1 à 120/57 ont été antérieurement transmis au procureur de la République et non pas en même temps que ce rapport de synthèse et le compte rendu d'identification" ;
que dès lors, la Cour est en mesure de constater au vu des procès-verbaux référencés par la police 120/1 et 120/57 et cotés au dossier d'instruction D 3 à D 66, avant le réquisitoire introductif en date du 15 octobre, coté D 64, que ces procès-verbaux ont bien été transmis au Parquet avant l'ouverture de l'information ;
que, d'ailleurs, Jacques E... et Gilbert D... le reconnaissent expressément en écrivant : "Attendu que cette mise en cause d'un maire dans l'exercice de ses fonctions et sur le territoire de sa commune a été portée à la connaissance de M. le procureur de la République au moins le 15 octobre 1987 par la transmission des procès-verbaux 120/1 à 120/57 qui a donné lieu à l'ouverture d'une information par réquisitoire introductif en date du 15 octobre 1987" (arrêt p. 15 dernier alinéa à p. 17 quatrième alinéa) ;
"alors que, premièrement, toutes pièces visées par le réquisitoire introductif d'instance doivent être nécessairement annexées à cet acte ;
que le réquisitoire introductif du 15 octobre 1987 visait un procès-verbal n 120/87, SRPJ d'Orléans, qui a été transmis au procureur de la République le 5 novembre suivant et n'a donc pas été annexé au réquisitoire introductif ;
qu'en refusant d'annuler cet acte par des motifs inopérants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"alors que, deuxièmement, et en toute hypothèse, eu égard à la date du procès-verbal n 120/87, la cour d'appel devait rechercher, ainsi que cela lui était demandé, la date exacte du réquisitoire introductif ;
que, faute d'une telle recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, qui constate que le réquisitoire introductif a été établi le 15 octobre 1987, que cet acte vise une procédure référencée 120/87, comprenant cinquante-sept procès- verbaux établis par la police judiciaire entre le 5 mai et le 15 octobre 1987 ;
qu'un document dénommé "compte rendu d'enquête", constituant en réalité un simple bordereau de transmission, portant le même numéro de référence, daté du 5 novembre 1987, a été adressé par la suite au parquet ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité du réquisitoire introductif, tirée de ce qu'il aurait visé des pièces lui étant postérieures, les juges énoncent que la circonstance que le compte rendu d'enquête ait été établi ultérieurement est sans incidence sur la validité de l'acte de poursuite, dès lors que le visa des pièces qu'il mentionne ne concerne que les seuls procès-verbaux effectivement transmis à la date de son établissement ;
Attendu qu'en cet état l'arrêt attaqué n'a pas encouru le grief allégué ;
Qu'en conséquence le moyen, qui manque en sa seconde branche par le fait sur lequel il prétend se fonder, ne saurait être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation présenté au nom de Jacques E... et Gilbert D... et pris de la violation des articles 147 et 150 du Code pénal, tels qu'ils étaient en vigueur antérieurement au 1er mars 1994, article 441-1 du nouveau Code pénal, articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, et de l'article 1134 du Code civil ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jacques E..., Christian Y... et Gilbert D... coupables d'avoir commis des faux en écriture de commerce et usage en signant des protocoles dont l'objet était purement fictif et les a condamnés, en répression, à un an de prison avec sursis et 80 000 francs d'amende chacun ;
"aux motifs que la société Sicopar, introduite dans des conditions plus ou moins controversées dans la réalisation du parc de loisir de Saran, a signé, avec certaines entreprises, un protocole d'accord prévoyant l'assistance et le conseil à l'entreprise dans l'organisation et la constitution de son dossier d'offre, le quitus à Sicopar des tâches accomplies par elle comportant notamment l'analyse du marché concerné, l'analyse des capacité de l'entreprise à y répondre, enquête de marché sur les points de rapprochement entre les besoins et capacités, la rationalisation et l'organisation de cette offre, des réunions de suivi administratif du dossier ;
qu'en contrepartie, l'entreprise s'engageait, sous la condition suspensive de l'obtention du marché, de sa réalisation et de son paiement, à verser à Sicopar des honoraires sur la base de 2 % du montant initial du marché hors taxes ;
que, si Gilbert D... et Christian Y... ont déclaré que Sicopar était intervenue dans la conclusion du marché entre l'entreprise et le maître d'oeuvre délégué, en revanche, tous les chefs d'entreprise entendus ont déclaré que Sicopar n'était intervenue que postérieurement à la signature des marchés uniquement pour faire signer des protocoles particuliers et qu'en outre, aucun travail n'avait été effectué par Sicopar sur les chantiers ;
que ces chefs d'entreprise ont expliqué qu'il s'agissait d'une sorte de chantage pour permettre un paiement régulier des factures ;
que l'absence de l'exécution des prestations prévues dans les protocoles d'accord résulte non seulement des déclarations des chefs d'entreprise susmentionnés, mais aussi des résultats de la perquisition effectuée au siège de la société Sicopar qui a révélé l'absence de documents techniques, et encore des propres déclarations de Christian Y... qui a indiqué qu'aucun courrier n'était envoyé sur les chantiers et que la "prestation" consistait en une discussion d'une demi- heure avec le responsable ;
que, dès lors, ces protocoles d'accord, notamment signés avec Sicopar par Morvan, SCREG-Ouest, Westlandt, TPBAT, Heraudet sont constitutifs de faux en écritures de commerce ;
que ces protocoles comportent des obligations pour les entreprises et constituent des titres au profit de Sicopar occasionnant un préjudice pour lesdites entreprises ;
que c'est à bon droit que Jacques E... a été retenu dans les liens de la prévention, étant observé qu'il a fait usage de ces protocoles pour établir et adresser des factures, de même que pour tirer des lettres de change sur lesdites entreprises ;
que Christian Y... et Gilbert D..., agents commerciaux de Sicopar, avaient parfaitement conscience de la fictivité des prestations prévues et ont été à bon droit déclarés coupables du chef de complicité ;
"alors que la fictivité d'un contrat portant obligation de faire, dont la validité n'est ni contestée ni constatée, ne se déduit pas de sa seule inexécution, et qu'il n'est pas interdit au débiteur de cette obligation d'émettre une facture réclamant un paiement éventuellement indu, le créancier de l'obligation de faire ayant la faculté d'opposer l'exception d'inexécution ou de répéter l'indu devant les juridictions civiles ;
qu'en retenant que les protocoles d'accord valablement conclus entre la société Sicopar et les diverses entreprises sont fictifs et que les factures correspondantes constituent des faux sur la seule considération que la société Sicopar n'a pas exécuté son obligation de faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté au nom de Christian Y... pris de la violation des articles 441-1, 121-6, 121-7 (nouveaux) du Code pénal, 59, 60, 42, 147 et 150, alinéa 1 (anciens) du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Christian Y... complice du délit de faux en écriture de commerce reproché à Jacques E... ;
"aux motifs que ces protocoles d'accord notamment signés, avec Sicopar par Morvan le 23 septembre 1986, par SCREG-Ouest le 2 juillet 1986, Woestland le 6 août 1986, TPBAT le 19 juillet 1986, Heraudet le 23 septembre 1986 et Jacques E... pour Sicopar, à l'exception de celui de Woestland signé par M. Z... pour Sicopar, sont constitutifs de faux en écriture de commerce... que c'est à bon droit que Jacques E..., signataire desdits protocoles, a été retenu dans les liens de la prévention... que Christian Y... et Gilbert D..., agents commerciaux de Sicopar pour lesquels il est établi qu'ils avaient pour fonction de rechercher les entreprises susceptibles de signer les protocoles alors qu'ils avaient parfaitement conscience de la fictivité des prestations, ont également, à bon droit, été déclarés coupables du chef de complicité pour avoir sciemment, par aide ou assistance, facilité la préparation ou la consommation des délits de faux établis à l'encontre de Jacques E... ;
"alors que la complicité par aide ou assistance n'est punissable que si cette aide ou assistance ont été portées à l'auteur principal dans les faits mêmes qui ont préparé, facilité ou consommé son action ;
qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué ne relève aucun fait précis, imputable à Christian Y..., susceptible de caractériser une aide à Jacques E... dans la signature des protocoles passés avec les entreprises Morvan, SCREG, TPBAT, Heraudet, qui seuls ont été déclarés constitutifs de faux par la cour d'appel, l'arrêt attaqué a violé le principe et les textes précités" ;
Sur le troisième moyen de cassation présenté au nom de Christian Y... pris de la violation des articles 441-1, 121-6, 121-7 (nouveaux) du Code pénal, 59, 60, 42, 147, 150, alinéa 2 (anciens) du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Christian Y... complice du délit d'usage de faux en écriture de commerce reproché à Jacques E... ;
"alors qu'en se fondant sur le fait que Christian Y... a démarché des entreprises pour qu'elles signent des protocoles fictifs avec Jacques E..., fait relatif à la préparation du délit de faux reproché à Jacques E..., la cour d'appel n'a pas caractérisé l'aide ou l'assistance dans la préparation du délit d'usage de faux, et violé ainsi les textes précités" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Sicopar a signé avec certaines entreprises, candidates à l'adjudication de marchés de construction, des protocoles prévoyant le versement à son profit d'honoraires d'un montant de 2 % des marchés en contrepartie d'une assistance commerciale et de prestations de conseil, dont les parties connaissaient le caractère fictif ;
Attendu que la cour d'appel relève que les protocoles ainsi signés constituaient des titres au profit de la Sicopar, les entreprises s'obligeant à lui verser des fonds, renfermaient des mentions contraires à la vérité, et qu'ils ont porté préjudice aux entreprises qui ont contracté avec elle ;
Attendu que les juges relatent, d'autre part, que ces protocoles ont été signés par Jacques E..., en sa qualité de délégué général de la société Sicopar, et utilisés par celui-ci pour tirer des lettres de change sur les entreprises adjudicataires de marchés ;
Attendu que l'arrêt énonce encore que Christian Y... et Gilbert D..., en leur qualité d'agents commerciaux de la société Sicopar, connaissant le caractère fictif des prestations prévues, ont recherché des entreprises susceptibles de souscrire les protocoles litigieux, et ont ainsi sciemment prêté aide et assistance à Jacques E... dans la préparation ou la consommation des délits qu'il a commis ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance ou de contradiction, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnels, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupable, et a ainsi justifié sa décision, au regard des dispositions des articles 121-6, 121-7, 441-1 du Code pénal, applicables en la cause comme moins sévères que celles en vigueur lors des faits ;
Que les moyens, dès lors, ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Gondre conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Larosière de Champfeu conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Schumacher, Martin, Mme Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, Mme Mouillard conseiller référendaire, M. Dintilhac avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;