AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq juillet mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller BAILLOT, les observations de Me de NERVO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Jean Robert, contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, du 25 mai 1994, qui, après l'avoir condamné pour destruction volontaire d'un bien immobilier appartenant à autrui, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1351 et 1382 du Code civil, des articles 2, 188 à 190, 591 à 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Z... à payer à M. Y... une somme de 90 000 francs ;
"aux motifs que M. A..., artisan agissant sous les ordres de Z..., avait admis avoir "démonté la toiture" de la bergerie appartenant à M. Y... ; que Z... avait convenu que les liteaux sur lesquels reposaient ces tuiles avaient été enlevés ;
que lors de son dépôt de plainte, le 24 mai 1989, Henri Y... avait indiqué que la charpente avait en partie été démontée et qu'une poutre maîtresse avait été emportée ; que ses affirmations avaient alors pu être vérifiées par les déclarations des témoins Guy Y... ("je suis certain que des affaires de cette bergerie ont été emportées"), Jean-Pierre X... ("lorsque je suis intervenu sur les lieux, la bergerie se trouvait dans l'état représenté par la photographie D 6, c'est-à -dire réduite à quelques poutres") ;
qu'il y avait lieu toutefois de considérer que la bergerie était à l'origine en très mauvais état ;
que le préjudice global devait être fixé à 90 000 francs ;
"alors que le juge pénal, statuant sur l'action civile, ne peut condamner le prévenu qu'à réparer le dommage directement causé par l'infraction dont il l'a préalablement déclaré coupable ;
qu'il ne peut donc fonder sa décision sur des faits de vol lorsque le prévenu n'a été ni jugé, ni condamné pénalement pour ce délit ;
qu'en l'espèce, Z... n'avait été condamné pénalement que pour dégradation volontaire, ayant obtenu un non-lieu pour les faits de vol qui lui avaient été initialement reprochés ;
que la cour d'appel ne pouvait donc motiver sa décision sur l'action civile en énonçant que ledit prévenu avait fait enlever et emporter des éléments d'un bâtiment, faits caractérisant le délit de vol" ;
Attendu que la cour d'appel, après avoir déclaré Jean Z... coupable non de vol mais de dégradation à la propriété immobilière d'Henri Y..., partie civile, l'a condamné à verser des dommages et intérêts à ce dernier ;
Que, dès lors, le moyen, qui se borne à contester l'évaluation, souverainement appréciée par les juges du fond, du montant du préjudice résultant de l'infraction retenue à la charge du prévenu, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, Mme Baillot conseiller rapporteur, MM. Massé, Guerder, Fabre, Joly, Pibouleau conseillers de la chambre, M.
Nivôse, Mme Fayet conseillers référendaires, M. le Foyer de Costil avocat général, M. Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;