AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Hervé Y..., demeurant chez M. X... à Arguence de Haut-Mazerolles, Mont-de-Marsan (Landes), en cassation d'un arrêt rendu le 26 septembre 1991 par la cour d'appel de Paris (15ème chambre, section B), au profit de la société F.P.G. actuellement dénommée société I.D.M., dont le siège social est sis à Paris (1er), ..., défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 1995, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Mme Ridé, MM. Merlin, Desjardins, conseillers, Mlle Sant, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Verger, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Monboisse, les observations de Me Choucroy, avocat de M. Y..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société F.P.G., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 septembre 1991), en 1986 la société Financière de participation et de gestion (FPG) a promis d'acheter 4 000 actions de la société Y... aux membres de la famille Y..., dont M. Hervé Y... porteur de 1 900 actions ;
que le prix convenu était de 79 500 000 francs dont 35 % payable immédiatement et le reste en cinq ans contre fourniture d'une garantie bancaire ;
que le promettant se portait fort de l'attribution à M.
Hervé Y... par la société dont il allait prendre le contrôle, des fonctions de directeur général salarié et de directeur technique pendant deux ans puis de directeur du développement pendant trois ans ;
que la garantie bancaire n'ayant pas été fournie, les époux Jean Z...
Y... et Hervé Y..., d'une part, et FPG ont convenu le 7 janvier 1987 de ramener le solde du prix (51 675 000 francs) à 41 175 000 francs payés comptant, outre 2 000 000 francs payables le 31 janvier 1988 ;
que, par un second acte se référant à cet accord, passé le même jour entre les mêmes parties, FPG s'est engagé de surcroît "à verser ou à faire verser une somme de 1 000 000 francs à M. Hervé Y... à titre de complément de salaire par fractions annuelles égales de 200 000 francs" ;
qu'un versement de 200 000 francs figure sur le bulletin de salaire d'avril 1987 de M. Hervé Y..., lequel a acquis par ailleurs des actions de FPG qu'il a revendues ensuite à la société ;
que, par lettre du 13 janvier 1988, la société a licencié M. Hervé Y..., avec prise d'effet le 15 juillet 1988 et dispense d'effectuer le préavis ;
qu'une transaction est intervenue le 16 mai 1988 entre la société et M. Hervé Y..., aux termes de laquelle la société a reconnu la qualité de salarié de M.
Y... depuis 1970 et a accepté de lui verser 118 221 francs à titre d'indemnité de préavis, 444 742 francs correspondant à l'indemnité de licenciement d'un cadre ayant plus de 18 ans d'ancienneté, 440 000 francs de dommages-intérêts forfaitaires réparant le préjudice moral ;
que la société FPG ayant refusé de poursuivre l'exécution de l'accord du 7 janvier 1987, prévoyant des versements annuels de 200 000 francs au motif que la transaction avait éteint cette dette, M. Hervé Y... l'a assignée devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de paiement de la somme de 800 000 francs en principal, et de 50 000 francs à titre de dommages-intérêts ;
Attendu que M. Hervé Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes alors que, selon le moyen, M. Y... tirait son droit à complément de prix de cession des actions Y... des termes clairs et précis des convention et transaction des 7 janvier 1987 et 16 mai 1988 qui avaient fixé à la somme annuelle de 200 000 francs pendant cinq ans le complément de prix de cession accordé par la société FPG en contrepartie d'une diminution de prix de cession de 8 500 000 francs, et avaient attribué à M. Hervé Y..., sans aucune référence au complément de prix de cession des actions, les sommes de 118 221 francs à titre d'indemnité de préavis, de 444 741 francs à titre d'indemnité de licenciement, de 440 000 francs à titre de réparation du préjudice moral et commercial subi du fait de la rupture du contrat de travail et la somme de 2 000 000 francs pour prix de rachat des actions FPG, et que, la correspondance échangée entre les conseils des parties constituait des propositions "au conditionnel" échangées en cours de négociations qui n'avaient été reprises par aucun accord ferme signé par les parties et qui se trouvaient contredites par les documents contractuels ultérieurs ;
que l'unique suggestion faite le 15 janvier 1988 d'incorporer le complément de prix de cession à l'indemnité transactionnelle de dommages-intérêts n'avait pas été retenue puisque cette indemnité avait été limitée à la proposition de 440 000 francs ;
que la proposition faite le 18 mars 1988 d'un accord sur le versement global d'une somme de 3 000 000 francs n'était nullement mentionnée comme s'étendant, au-delà des pourparlers en cours sur la rupture du contrat de travail et le rachat des actions FPG, au complément de prix impayé des actions Y... ;
si bien qu'en jugeant que de simples propositions conditionnelles et équivoques faites en cours de négociation par les conseils auraient pu valoir renonciation de M. Hervé Y... au droit à complément de prix de cession des actions Y... qu'il tenait des termes clairs et précis des convention et transaction des 7 janvier 1987 et 16 mai 1988 sans caractériser une volonté certaine et non équivoque de M. Y... de renoncer à son droit et de simuler la transaction, la cour d'appel a refusé d'appliquer les termes clairs et précis des conventions signées par les parties, violant l'article 1134 du Code civil, n'a pas légalement caractérisé la renonciation aux droits objet de la transaction ou la simulation de celle-ci, violant l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'interprétant l'ensemble des accords des parties, la cour d'appel a constaté que la transaction du 16 mai 1988 qui comportait une simulation acceptée par l'une et l'autre des parties, avait porté en réalité sur une somme de 3 000 000 francs intéressant la vente à la société Y... des actions de FPG détenues par M. Y..., le paiement du complément de prix convenu dans l'acte du 7 janvier 1987 et une somme complémentaire ;
qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que la société FPG, actuellement dénommée société IDM, sollicite sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 15 000 francs ;
Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'y faire droit ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
REJETTE la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne M. Y..., envers la société IDM, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt et un juin mil neuf cent quatre-vingt-quinze.