AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. René X..., demeurant 12, place Jean Moulin à Agen (Lot-et-Garonne), en cassation d'un arrêt rendu le 27 novembre 1990 par la cour d'appel d'Agen (Chambre sociale), au profit de :
1 ) la société anonyme Jasmin Terminus, dont le siège social est ... (Lot-et-Garonne),
2 ) M. Y..., mandataire liquidateur, demeurant ... (Lot-et-Garonne), agissant en qualité de représentant des créancier de la société anonyme Jasmin Terminus,
3 ) l'ASSEDIC du Sud-Ouest, agissant comme mandataire de l'AGS, dont le siège social est avenue de la Jallère, quartier du Lac à Bordeaux (Gironde), défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 11 avril 1995, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, Mlle Sant, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, MM. Merlin, Desjardins, conseillers, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Verger, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mlle le conseiller référendaire Sant, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 27 novembre 1990), que M. X... a été embauché le 1er février 1983, pour assurer les veilles de nuit de 20 heures à 8 heures, dans l'hôtel Jasmin Terminus ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'un rappel de salaires pour heures supplémentaires, alors, selon le moyen, qu'il est constant que M. X... se trouvait sur place entre une heure et 5 heures et accomplissait les actes de sa profession ;
que l'employeur ne peut se soustraire à ses obligations en prétendant que le salarié restait sur place de sa propre autorité et pour des raisons personnelles ;
qu'il ne lui a jamais demandé de partir ou de ne s'occuper de rien pendant ce temps ;
qu'après le premier juin 1987, l'embauche d'un deuxième veilleur de nuit confirme que les missions à exercer existaient bien ;
que, se trouvant à la disposition et sous l'autorité de son employeur, sur le lieu de travail et à son profit exclusif, M. X... devait être considéré comme étant dans le cadre de son activité professionnelle, y compris pendant les heures creuses, et la réglementation sur les heures d'équivalence était donc applicable ;
que la cour d'appel a donné une fausse qualification aux heures creuses, qui étaient des heures d'équivalence, en les assimilant à un temps de repos, extérieur au temps de travail et a commis une erreur de droit ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de fait et les preuves qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que, de une heure à cinq heures, l'hôtel était fermé et que le salarié était au repos ;
que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le salarié fait encore grief à l'arrêt de n'avoir que partiellement accueilli sa demande de repos compensateur, alors, selon le moyen, d'une part, que la cour d'appel a commis une erreur matérielle en calculant l'horaire du salarié sur sept nuits au lieu de six nuits ;
que, même après rectification de cette erreur, le temps de travail effectif, de 48 heures, étant supérieur à la durée légale de travail, la cour d'appel a fait une mauvaise application des textes relatifs au repos compensateur ;
alors, d'autre part, que le repos compensateur étant accordé pour les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent réglementaire de 130 heures et se calculant à partir de la 131ième heure, la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, reconnaître au salarié un droit au repos compensateur et écarter le droit aux heures supplémentaires ;
alors, encore, que le repos compensateur de 20 % s'applique dans les entreprises de plus de dix salariés, ce qui n'est pas le cas de l'hôtel Jasmin Terminus ;
que la cour d'appel ne pouvait donc faire application de l'alinéa 1 de l'article 212-5-1 du Code du travail au lieu de l'alinéa 2, du même texte ;
alors, enfin, que la prescription de deux mois prévue en matière de repos compensateur par l'article D. 212-10 du Code du travail concerne la prise effective du congé, et non l'indemnisation du repos admise par ce texte ;
que la cour d'appel qui était saisie, non d'une demande de repos, mais d'une demande d'indemnisation en réparation du préjudice subi du fait de la non attribution du repos, a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que seules les heures de travail effectif doivent être prises en considération pour la détermination du repos compensateur ;
que la cour d'appel, abstraction faite de l'erreur matérielle relevée par le moyen, ayant fait ressortir que la durée de présence du salarié, de 48 heures, était inférieure à l'horaire d'équivalence invoqué par le salarié, il en résultait que le salarié ne pouvait prétendre à un repos compensateur ;
que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié reproche à la cour d'appel de ne pas avoir appliqué la circulaire du syndicat des hôteliers du Lot et Garonne fixant à 54 heures la durée de présence équivalent à 39 heures de travail effectif, alors, selon le moyen, que l'expert désigné en première instance avait indiqué dans son rapport que la société Jasmin Terminus était adhérente à ce syndicat ;
que la durée de présence de M. X... étant de 72 heures, il en résultait un dépassement hebdomadaire de l'horaire d'équivalence de 18 heures ;
que c'est la raison pour laquelle l'expert avait invité implicitement la juridiction de première instance à retenir le principe de 18 heures supplémentaires par mois, ce qui correspondait à la réalité professionnelle du veilleur de nuit ;
Mais attendu, que le moyen qui ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation des éléments de fait et de preuves par les juges d'appel, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., envers la société Jasmin Terminus, M. Y..., ès qualités et les ASSEDIC du Sud-Ouest, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept juin mil neuf cent quatre-vingt-quinze.