Sur les deux moyens du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi provoqué de la société X... Bernard :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 octobre 1992), que la société Union des assurances de Paris (UAP) a, sous la maîtrise d'oeuvre de MM. Y... et Z..., architectes, fait construire plusieurs immeubles par la société Oger-Bateg, devenue X... Bernard, pour le gros oeuvre et la société Ferem, devenue SMAC Acieroid, pour l'étanchéité ; que la réception est intervenue entre juillet et octobre 1977 ; que des désordres étant apparus, une ordonnance de référé a, en août 1986, sur la demande de l'UAP, désigné un expert dont la mission a été étendue par ordonnances de décembre 1986 et avril 1987 ; que les assignations au fond en réparation ont été délivrées en juin 1989 ;
Attendu que les sociétés SMAC Acieroid et X... Bernard font grief à l'arrêt de juger que la " prescription " décennale a été interrompue par les assignations en référé délivrées en 1986 et 1987, alors, selon le moyen, 1° que le délai de garantie décennale étant un " délai d'épreuve " et non un " délai de prescription ", aucune action fondée sur cette garantie ne peut être exercée plus de 10 ans après la réception ; que l'effet interruptif conféré aux assignations en référé par la loi du 5 juin 1985 s'applique à la prescription des actions en responsabilité et non au délai d'épreuve décennale institué par l'article 1792 du Code civil ; qu'en étendant cette disposition à ce délai d'épreuve, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 2244 du Code civil ; 2° que l'expertise, simple mesure conservatoire n'empêchant pas l'une des parties d'agir contre l'autre pour faire établir sa responsabilité, ne peut avoir pour effet que de suspendre la prescription ; qu'après avoir admis qu'une assignation en référé expertise avait pour effet de suspendre la prescription pendant le temps que dure l'instance, d'où il résultait nécessairement qu'il convenait de compléter le temps déjà couru par la fraction qui restait à courir au moment de la suspension, de sorte que l'assignation au fond de l'UAP intentée plus de 10 ans après la réception des travaux se trouvait prescrite, la cour d'appel en a néanmoins déduit que l'action en référé avait eu pour conséquence de faire repartir, à l'issue de l'instance, un délai nouveau de prescription égal à celui qui avait été interrompu ; qu'en ne déduisant pas de ses constatations les conséquences légales qui en découlaient, la cour d'appel a violé l'article 2244 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que l'article 2244 du Code civil, texte de portée générale, s'applique à toutes les prescriptions et délais pour agir et notamment au délai de forclusion de l'article 2270 du Code civil et que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 juillet 1985, l'effet interruptif de la citation en justice, même en référé, a pour conséquence de faire courir un nouveau délai égal à celui interrompu ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les deux moyens du pourvoi principal étant rejetés, le pourvoi provoqué, formé à titre éventuel, par MM. Y... et Z..., est devenu sans objet ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois.