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06/12/1994 | FRANCE | N°92-10581

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 décembre 1994, 92-10581


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Nazif B...,

2 / Mme A...
B..., née Z..., demeurant ... (18e), et actuellement Zrtva-Fasizma, n° 18, 22000 Sremska, Mitrovica, Yougoslavie

3 / M. Daniel X..., administrateur judiciaire, agissant en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de la société Elips, demeurant ... (4e), en cassation d'un arrêt rendu le 26 septembre 1991 par la cour d'appel de Versailles (chambres réunies), au profit de la société AG

F, dont le siège social est ... (2e), défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoque...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Nazif B...,

2 / Mme A...
B..., née Z..., demeurant ... (18e), et actuellement Zrtva-Fasizma, n° 18, 22000 Sremska, Mitrovica, Yougoslavie

3 / M. Daniel X..., administrateur judiciaire, agissant en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de la société Elips, demeurant ... (4e), en cassation d'un arrêt rendu le 26 septembre 1991 par la cour d'appel de Versailles (chambres réunies), au profit de la société AGF, dont le siège social est ... (2e), défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 octobre 1994, où étaient présents : M. de Bouillane de Lacoste, président et rapporteur, MM. Fouret, Pinochet, conseillers, M. Lupi, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le président de Y... de Lacoste, les observations de la SCP Defrenois et Levis, avocat des époux B... et de M. X..., ès qualités, de Me Baraduc-Benabent, avocat de la société AGF, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que les époux B..., propriétaires de locaux à usage commercial dans lesquels ils avaient réalisé des agencements et installations, ont donné ces locaux à bail à la société ELIPS, qui a souscrit auprès des Assurances générales de France (AGF) un contrat d'assurance multirisque garantissant contre le risque d'incendie, d'une part, les marchandises, matériel et mobilier lui appartenant ou "placés sous sa garde à quelque titre que ce soit", d'autre part, sa responsabilité à l'égard des dommages matériels causés à l'immeuble ; qu'un incendie ayant, le 14 juin 1980, détruit la totalité des biens qui se trouvaient dans les locaux loués, la société locataire, après avoir provoqué une expertise en référé, a engagé contre les AGF une action en indemnisation dont elle s'est désistée par la suite ; que les époux B... ont alors mis les AGF en demeure de leur rembourser la valeur des agencements et installations dont ils étaient demeurés propriétaires, puis, agissant conjointement avec le syndic de la liquidation des biens de la société ELIPS ont assigné le 23 décembre 1983 cet assureur aux mêmes fins ; que les AGF leur ont opposé la prescription de cette action ;

Attendu que les époux B... font grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 26 septembre 1991), rendu sur renvoi après cassation, d'avoir accueilli cette fin de non-recevoir au motif qu'ils agissaient en vertu du contrat d'assurance souscrit pour leur compte par la société ELIPS, alors, selon le moyen, d'une part, qu'aucune stipulation de la police, qui couvrait expressément la responsabilité du preneur envers le bailleur en cas d'incendie, ne permettait de la qualifier d'assurance pour compte, de sorte qu'en retenant cette qualification la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, L. 112-1 et L. 124-3 du Code des assurances ;

alors, d'autre part, qu'à supposer que la police litigieuse ait pu recevoir la qualification d'assurance pour compte, cette assurance s'analysait à l'égard du détenteur en un contrat d'assurance de responsabilité le couvrant vis-à -vis du propriétaire pour la perte des choses ; que les époux B..., propriétaires des biens, exerçaient contre l'assureur du détenteur, auteur du dommage, l'action directe de la victime et non le droit propre du bénéficiaire de l'assurance pour compte, de sorte qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 112-1, alinéa 2, du Code des assurances, et par refus d'application l'article L. 124-3 de ce code ; alors, de troisième part, que la renonciation à un droit ne se présume pas et doit être déduite d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;

qu'en décidant, au vu d'une mise en demeure et d'une assignation qui pouvaient être fondées aussi bien sur l'assurance de responsabilité que sur l'assurance de dommages résultant de l'assurance pour compte, que les époux B... avaient accepté la stipulation pour autrui contenue dans l'assurance pour compte et renoncé à exercer l'action directe, la cour d'appel a violé les articles 2221 du Code civil, L. 112-1 et L. 124-3 du Code des assurances ; alors, enfin, qu'en toute hypothèse, l'acceptation de la stipulation pour autrui contenue dans une assurance pour compte n'empêche pas le bénéficiaire, par ailleurs tiers lésé, d'exercer l'action directe contre l'assureur du responsable ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1121 du Code civil et les articles précités du Code des assurances ;

Mais attendu que l'arrêt, en un motif non critiqué, relève que les époux B... n'ont à aucun moment soutenu que leur locataire était responsable du sinistre ;

qu'il ajoute que la société ELIPS a contracté une assurance pour un montant d'un million de francs, alors qu'elle n'était personnellement propriétaire que d'un mobilier réduit et d'un matériel de peu de valeur, et que les agencements et installations réalisés par les époux B... appartenaient à ces derniers et étaient couverts par l'assurance comme étant placés sous la garde de la société locataire ; que de ces constatations il déduit à bon droit que les propriétaires bénéficiaient de la stipulation pour autrui contenue dans l'assurance souscrite pour leur compte par la société ELIPS, stipulation qu'ils ont acceptée sans équivoque en agissant contre l'assureur en indemnisation des dommages causés aux agencements dont ils étaient propriétaires, et qu'ayant ainsi, à l'égard de ces dommages, la qualité d'assurés, leur action était soumise à la prescription biennale prévue à l'article L. 114-1 du Code des assurances ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les demandeurs, envers la société AGF, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du six décembre mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 92-10581
Date de la décision : 06/12/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE (règles générales) - Assurance pour le compte de qui il appartiendra - Assurance souscrite par un locataire pour garantir sa responsabilité à l'égard des dommages matériels causés à l'immeuble - Stipulation pour autrui au bénéfice du propriétaire - Acceptation par celui-ci - Action du propriétaire contre l'assureur - Prescription.


Références :

Code des assurances L114-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambres réunies), 26 septembre 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 déc. 1994, pourvoi n°92-10581


Composition du Tribunal
Président : Président : M. de BOUILLANE de LACOSTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.10581
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