AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X... Sans, demeurant ... (Haute-Garonne), en cassation d'un arrêt rendu le 17 janvier 1991 par la cour d'appel de Toulouse (2ème chambre), au profit de la société anonyme Sharp Burotype Machines, dont le siège social est 53, avenue du Bois de la Pie, Paris Nord II à Tremblay-les- Gonesse (Seine-Saint-Denis), défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 mai 1994, où étaient présents :
Mme Pasturel, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Tricot, conseiller rapporteur, M. Edin, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Tricot, les observations de Me Vuitton, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Toulouse, 17 janvier 1991), que M. Y... s'est porté caution des dettes de la société Carlus informatique (société Carlus), pour un montant limité, au profit de la société Sharp burotype machines (société Sharp) ; que la société Carlus ayant été mise en redressement judiciaire, la société Sharp a déclaré sa créance et, par assignation du 27 juillet 1988, a demandé que M. Y... soit condamné à exécuter son engagement de caution ;
Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la demande et de l'avoir en outre condamné à payer des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 1988 alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 dispose expressément que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur ; qu'il s'ensuit que le débiteur étant libéré de son passif non payé, l'engagement de la caution est lui-même éteint ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait maintenir l'engagement de M. Y..., sans violer par refus d'application, les dispositions susvisées ; et alors, d'autre part, que l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 énonce que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, sans opérer aucune distinction ; que dès lors, l'obligation de la caution ne pouvant excéder ce qui est dû par le débiteur, la caution ne saurait être tenue des intérêts au delà de la date prononçant le redressement judiciaire du débiteur ;
qu'en l'espèce, le redressement judiciaire de la société Carlus étant intervenu le 12 avril 1988, l'arrêt confirmatif ne pouvait, sans violer l'article susvisé, condamner M. Y... au paiement des intérêts de droit à compter du 27 juillet 1988 ;
Mais attendu, d'une part, que si, en application de l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985, les créanciers ne recouvrent pas l'exercice individuel de leur action contre le débiteur dont la liquidation judiciaire a fait l'objet d'une clôture pour insuffisance d'actif, ils conservent, la dette n'étant pas éteinte, le droit de poursuite à l'encontre de la caution du débiteur ; qu'il en est ainsi quoique le droit, subsistant, de la caution à subrogation ne puisse s'exercer, sauf dans les cas prévus aux articles 169, alinéa 2, et 170 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel a exactement retenu que la clôture de la liquidation judiciaire de la société Carlus pour insuffisance d'actif était sans influence sur l'obligation de M. Y... envers la société Sharp en vertu du cautionnement qu'il avait contracté ;
Attendu, d'autre part, que les intérêts au taux légal de la somme due par la société Carlus incombaient à M. Y..., à titre personnel, dans les limites de son engagement, à compter de l'assignation du 27 juillet 1988, valant mise en demeure, sur le fondement de l'article 1153, alinéa 3, du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y..., envers la société Sharp Burotype Machines, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son audience publique du douze juillet mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.