AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Patrick X..., demeurant ... (Loire-Atlantique), en cassation d'un arrêt rendu le 29 avril 1991 par la cour d'appel de Grenoble (Chambre sociale), au profit de la société à responsabilité limitée Meuble et décor d'aujourd'hui - Roche et Bobois, dont le siège social est ..., prise en la personne de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège, défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 15 décembre 1993, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Boubli, conseiller rapporteur, MM. Saintoyant, Lecante, Bèque, Carmet, Le Roux-Cocheril, Brissier, conseillers, Mmes Pams-Tatu, Bignon, Girard-Thuilier, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Boubli, les observations de la SCP Defrenois et Lévis, avocat de M. X..., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;
Attendu que M. X..., employé en qualité de vendeur par la société Meuble et décor d'aujourd'hui, exploitant la marque Roche et Bobois à Grenoble, a été licencié pour motif économique le 2 mai 1989 ; que, le 1er avril 1989, la marque Roche et Bobois a été exploitée par la société Interiors 38 dans une boutique située àSaint-Egrève ;
Attendu que, pour décider que le licenciement de M. X... était fondé sur un motif économique, que le salarié ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail et le débouter de ses demandes dirigées contre les deux sociétés, l'arrêt attaqué énonce, d'une part, que la société Interiors 38 n'a pas poursuivi l'intégralité de l'activité économique de la société Meuble et décor d'aujourd'hui puisque les deux sociétés ont poursuivi leurs activités respectives au moins jusqu'au premier trimestre de l'année 1990, d'autre part, que si l'absence de tout lien juridique entre les deux sociétés n'est pas déterminante, cette absence conforte l'analyse économique ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'exploitation de la marque Roche et Bobois par la société Interiors 38 n'emportait pas transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité a été poursuivie ou reprise, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 avril 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Meuble et décor d'aujourd'hui, envers M. X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Grenoble, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du neuf février mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.