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14/12/1993 | FRANCE | N°91-21421

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 décembre 1993, 91-21421


Sur le premier moyen :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 1991) que le ministre délégué chargé de la Mer (Direction des gens de mer et de l'administration générale) a lancé, en 1990, un appel d'offres restreint pour le remplacement d'une vedette régionale d'assistance et de surveillance ; qu'à l'issue de la procédure d'ouverture des plis cachetés, le marché a été attribué à la direction de la construction et armes navales de Lorient par décision administrative en date du 24 janvier 1991 ; que la société Guy X...
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Sur le premier moyen :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 1991) que le ministre délégué chargé de la Mer (Direction des gens de mer et de l'administration générale) a lancé, en 1990, un appel d'offres restreint pour le remplacement d'une vedette régionale d'assistance et de surveillance ; qu'à l'issue de la procédure d'ouverture des plis cachetés, le marché a été attribué à la direction de la construction et armes navales de Lorient par décision administrative en date du 24 janvier 1991 ; que la société Guy X...
Y..., qui avait soumissionné à ce marché, a estimé que son attribution s'était faite en violation des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 sur les prix et la libre concurrence ; qu'elle a saisi le Conseil de la Concurrence de deux requêtes, l'une tendant à la cessation des pratiques dénoncées et l'autre, demandant que des mesures conservatoires soient prononcées ;

Attendu que la société Guy X...
Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le recours formé contre la décision du Conseil de la Concurrence ayant déclaré irrecevables les demandes présentées par la société Guy X...
Y..., alors, selon le pourvoi, que l'ordonnance du 1er décembre 1986 s'applique à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques ; qu'il en résulte que les règles prévues par le Code des marchés publics ne sont pas exclusives des dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dès lors que le marché public est relatif à une activité de production, de distribution ou de services ; que le marché public portant sur la fourniture d'un bien d'équipement est relatif à une activité de production ; qu'ainsi, l'entente entre le soumissionnaire qui s'est vu attribuer le marché et l'Administration responsable du marché relève des articles 7, 8 et 10 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le soumissionnaire fut-il lui-même un service de l'Etat ; qu'en estimant le contraire, l'arrêt attaqué a violé l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu que si la fourniture d'un navire par un service public constitue un acte de production économique qui relève de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et lui rend applicable les dispositions des articles 7 et 8 de cette même ordonnance relatives à la prohibition des pratiques anti-concurrentielles, la décision administrative par laquelle le ministre, à l'issue d'une procédure d'ouverture des plis faite en application des dispositions du Code des marchés publics, attribue le marché à un des soumissionnaires, relève de la compétence de la juridiction administrative ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté le recours formé contre la décision du Conseil de la Concurrence, ayant déclaré irrecevable les demandes formées par les sociétés Guy X...
Y..., alors, selon le pourvoi, d'une part, que la SARL Guy X...
Y... ne demandait pas l'annulation d'une décision administrative, mais dénonçait la pratique d'un taux de TVA anormal, en faisant valoir qu'une telle pratique résultant d'une entente entre l'acheteur public, le ministre délégué de la Mer, et l'un des soumissionnaires mis en concurrence, la Direction des constructions navales de Lorient, avait pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence ; que le Conseil de la Concurrence et la cour d'appel de Paris sont précisément compétents pour rechercher si l'application de ce taux de TVA minoré, qui bénéficiait à un seul des soumissionnaires au marché, entrait dans le champ d'application des articles 7 et 8 de l'ordonnance, ou pouvait se trouver justifié par application de l'article 10 ; qu'en prétendant le contraire, l'arrêt attaqué a violé les articles 11 et 12 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors, d'autre part, que la lettre du 27 mai 1991 du ministre de l'Economie, des Finances et du Budget n'avait pas le caractère d'une décision administrative, mais n'était autre qu'une interprétation donnée, par l'une des parties au procès, des textes applicables du Code général des impôts ; que le Conseil de la Concurrence, à qui il appartenait de rechercher le taux de TVA applicable pour apprécier l'existence, ou non, d'une pratique anti-concurrentielle, ne pouvait, sans violer les principes élémentaires régissant la procédure, interroger l'une des parties au procès -l'Etat- sur ce point et la cour d'appel de Paris ne pouvait s'estimer liée par la " décision " de la personne publique ; que, dès lors, l'arrêt attaqué a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que le principe de la contradiction et l'article 16 du nouveau Code de procédure civile, et le principe selon lequel nul ne peut se constituer une preuve dans sa cause ;

Mais attendu que c'est à bon droit que l'arrêt a relevé que le grief articulé par la société Guy X...
Y... selon lequel la Direction des constructions navales de Lorient avait bénéficié d'un taux de TVA anormalement bas qui aurait faussé le jeu de la libre concurrence entre les différents soumissionnaires, tendait en réalité à demander à ce que le Conseil de la Concurrence se prononce sur la légalité d'une décision administrative concernant le taux de TVA applicable aux opérations de production entre deux services de l'Etat ; qu'en décidant qu'une telle appréciation n'entrait pas dans les pouvoirs du Conseil et, par suite, échappait à sa propre compétence, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les principes élémentaires régissant la procédure civile ou les droits de la défense, n'a pas violé les textes de lois précités ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-21421
Date de la décision : 14/12/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Concurrence - Ordonnance du 1er décembre 1986 - Pratique anticoncurrentielle - Procédure - Conseil de la Concurrence - Compétence - Exclusion - Marché public - Décision administrative d'attribution.

1° REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Concurrence - Ordonnance du 1er décembre 1986 - Dispositions diverses - Domaine d'application - Fourniture d'un navire par un service public.

1° Si la fourniture d'un navire par un service public constitue un acte de production économique qui relève de l'article 53 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et lui rend applicable les dispositions des articles 7 et 8 de cette même ordonnance relatives à la prohibition des pratiques anticoncurrentielles, la décision administrative par laquelle le ministre, à l'issue de la procédure d'ouverture des plis faite en application des dispositions du Code des marchés publics, attribue le marché à un des soumissionnaires, relève de la compétence de la juridiction administrative.

2° REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Concurrence - Ordonnance du 1er décembre 1986 - Pratique anticoncurrentielle - Procédure - Conseil de la Concurrence - Compétence - Exclusion - Légalité du taux de la taxe sur la valeur ajoutée.

2° Le grief articulé par un soumissionnaire à un marché public selon lequel un autre soumissionnaire, service public, avait bénéficié d'un taux de TVA anormalement bas qui aurait faussé le jeu de la libre concurrence entre les différents soumissionnaires tend à demander à ce que le Conseil de la Concurrence se prononce sur la légalité d'une décision administrative concernant le taux de TVA applicable aux opérations de production entre deux services de l'Etat ; une telle appréciation n'entre pas dans les pouvoirs du Conseil de la Concurrence et, par suite, échappe à la compétence de la cour d'appel de Paris.


Références :

1° :
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 7, art. 8, art. 53

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 novembre 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 déc. 1993, pourvoi n°91-21421, Bull. civ. 1993 IV N° 482 p. 352
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1993 IV N° 482 p. 352

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Léonnet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Ancel et Couturier-Heller.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:91.21421
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