AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Robert X..., demeurant à Béziers (Hérault), ..., en cassation d'un arrêt rendu le 2 novembre 1989 par la cour d'appel de Montpellier (4e chambre sociale), au profit de la société Vigouroux frères, société anonyme, dont le siège social est à Béziers (Hérault), ..., défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 juillet 1993, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, Mme Blohorn-Brenneur, conseiller référendaire rapporteur, MM. Saintoyant, Zakine, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, M. Merlin, conseillers, M. Aragon-Brunet, Mlle Sant, M. Frouin, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Blohorn-Brenneur, les observations de Me Hennuyer, avocat de M. X..., de Me Vincent, avocat de la société Vigouroux frères, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail et l'article 5 bis de la convention collective des transports routiers ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé en qualité de tôlier-peintre par la société Vigouroux, a été victime, en mars 1987, d'un accident non professionnel ; qu'après sa consolidation, il a été déclaré, par le médecin du travail, le 27 mai 1988, inapte à un emploi nécessitant le port de charges lourdes ou des efforts violents, mais apte à tout autre emploi ; que la société a pris acte de la rupture du contrat du salarié par lettre du 30 mai 1988 ;
Attendu que, pour débouter M. X... de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail, la cour d'appel retient que le médecin du travail n'ayant assorti le certificat d'inaptitude délivré d'aucune proposition de reprise du travail à un poste différent et précis de l'entreprise, l'employeur n'était pas tenu d'envisager le reclassement et qu'il n'apparaît pas que la rupture soit imputable à l'employeur ;
Attendu, cependant, que la rupture du contrat de travail d'un salarié déclaré inapte par le médecin du travail s'analyse en un licenciement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 novembre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Vigouroux frères, envers le trésorier payeur général, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Montpellier, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt sept octobre mil neuf cent quatre vingt treize.