AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société d'exploitation des bois de l'Est -SEBE-, société anonyme, dont le siège social est à Créancey (Haute-Marne), en cassation d'un arrêt rendu le 21 février 1989 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), au profit de M. José X..., demeurant à Bricon par Châteauvillan (Haute-Marne), défendeur à la cassation ;
EN PRESENCE DE :
- l'ASSEDIC de Champagne-Ardenne, dont le siège social est à Reims (Marne), ...,
LA COUR, en l'audience publique du 23 juin 1993, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, Mme Blohorn-Brenneur, conseiller référendaire rapporteur, MM. Guermann, Saintoyant, Zakine, Ferrieu, Monboisse, Mme Ridé, M. Merlin, conseillers, M. Aragon-Brunet, Mlle Sant, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Blohorn-Brenneur, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la SEBE, de Me Boullez, avocat de l'ASSEDIC de Champagne-Ardenne, les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 21 février 1989), afin de permettre aux salariés intéressés de participer à l'ouverture de la chasse, la direction de la Société d'exploitation des bois de l'Est (SEBE) a décidé que son entreprise fermerait ses portes la journée du 28 septembre 1987 et que les heures perdues seraient récupérées durant la semaine du 21 au 25 septembre ; que M. X... a refusé de participer aux heures de récupération ; que, le 23 septembre, il a été sanctionné d'une journée de mise à pied pour avoir abandonné son poste à l'ancien horaire, les 21 et 22 septembre ; que l'employeur lui a précisé qu'une deuxième faute entraînerait la rupture du contrat de travail ; qu'il a été licencié le 2 octobre 1987 pour avoir persisté à refuser les horaires de récupération ;
Attendu que la société reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. X... diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées dans la limite de 6 mois de salaire, alors, selon le moyen, d'une part, que l'usage ancien et constant s'incorpore au contrat de travail et s'impose au salarié ; qu'ainsi, en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions d'appel de la SEBE, si la fermeture de l'entreprise le jour de l'ouverture de la chasse et la récupération d'heures chômées ne constituaient pas un usage en vigueur lors de l'engagement de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, l'employeur tire de la durée indéterminée du contrat de travail et de son pouvoir de direction la faculté de modifier unilatéralement le contrat de travail et d'imposer au salarié une modification non substantielle ; qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si la fermeture le jour de l'ouverture de la chasse et les modalités de récupération ne constituaient pas une modification non substantielle
du contrat de travail que le salarié ne pouvait refuser, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que l'article L. 212-2-2 du Code du travail énumère limitativement les interruptions collectives de travail pouvant donner lieu à récupération ; que ce texte n'a pas prévu le cas d'ouverture de la chasse ; qu'il s'ensuit qu'en décidant que l'employeur ne pouvait contraindre M. X... à récupérer les heures perdues, la cour d'appel a justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SEBE, envers M. X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du treize octobre mil neuf cent quatre vingt treize.