AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GUERDER, les observations de Me Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Daniel, contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 12 novembre 1991, qui l'a condamné, pour infractions au Code du travail, à13 amendes de 2 000 francs ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 55 de la Constitution, des articles 85 et 177 du Traité de Rome, des articles L. 221-17 et L. 221-5 du Code du travail, des arrêtés du préfet du Gard des 7 août 1980 et 3 novembre 1988, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Y... coupable d'avoir contrevenu aux dispositions d'arrêtés préfectoraux de fermeture pris sur le fondement de l'article L. 221-7 du Code du travail et d'avoir omis de donner à des employés le repos hebdomadaire dominical ;
"aux motifs propres que "les premiers juges ont sainement analysé les faits de la cause" ;
"et aux motifs adoptés qu'"il résulte de l'enquête et des débats que Daniel Y... s'est bien rendu coupable des infractions qui lui sont reprochées" ;
"alors que tout jugement doit être motivé pour permettre à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle sur sa légalité ; que la cour d'appel ne pouvait se limiter à adopter les motifs d'un jugement qui s'était borné à énoncer que le prévenu s'était bien rendu coupable des infractions qui lui étaient reprochées ;
"alors que la cour d'appel se devait de répondre au chef péremptoire des conclusions de Y... faisant valoir que les dispositions de l'article L. 221-17 du Code du travail étaient incompatibles avec celles de l'article 85 du Traité de Rome, les accords intervenus entre syndicats d'employeurs et de travailleurs sur le fondement desquels le préfet d'un département réglemente l'ouverture des établissements d'une profession étant susceptibles d'avoir des effets sur le commerce intracommunautaire et de restreindre le jeu de la concurrence ;
"alors qu'il entre dans les attributions de la juridiction répressive de statuer sur la légalité des règlements assortis d'une sanction pénale qu'il lui est demandé de prononcer et que la cour d'appel se devait également de répondre aux conclusions de Y... faisant valoir que les arrêtés préfectoraux sur le fondement desquels il était poursuivi étaient illégaux, l'accord préalable entériné par le préfet n'exprimant pas la volonté de la majorité de la profession et le syndicat auquel appartient l'établissement du prévenu n'ayant pas été consulté ;
"et alors qu'enfin, il appartenait à la cour d'appel de répondre aux conclusions de Y... invoquant la nullité des poursuites engagées à son encontre sur le fondement de l'article L. 221-5 du Code du travail, aucun procès-verbal ne lui ayant été remis" ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que Daniel Y... a été poursuivi pour avoir omis, le 4 février 1990, d'une part de respecter l'arrêté préfectoral des 7 août 1980 et 3 novembre 1988 ordonnant la fermeture de l'établissement le dimanche, d'autre part de donner le repos hebdomadaire à treize employés nommément désignés ;
Attendu que pour condamner le prévenu des chefs de contraventions aux articles L. 221-17 et L. 221-5 du Code du travail, les juges énoncent qu'il résulte de l'enquête et des débats que Daniel Y... s'est bien rendu coupable des infractions qui lui sont reprochées, et qui ont été relevées par le procès-verbal de police du 4 février 1990 ;
Attendu qu'en cet état, les juges qui ont implicitement écarté le moyen pris par le prévenu de la violation des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 611-10 du Code du travail, inapplicables en l'espèce, ont donné une base légale à leur décision sans encourir les griefs allégués par la dernière branche du moyen ;
Et attendu que les peines étant ainsi justifiées au regard de l'article L. 221-5 du Code du travail, il n'y a pas lieu d'examiner les griefs relatifs à l'application de l'article L. 221-17 du même Code ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Guerder conseiller rapporteur, MM. Dumont, Fontaine, Milleville, Alphand, Pinsseau conseillers de la chambre, Mmes Batut, Sabatier, M. Poisot conseillers référendaires, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;