La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/05/1993 | FRANCE | N°92-85733

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 mai 1993, 92-85733


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller HECQUARD, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Pierre, contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 25 octobre 1992, qui l'

a condamné pour abus de confiance à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 70 ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller HECQUARD, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Pierre, contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 25 octobre 1992, qui l'a condamné pour abus de confiance à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et 70 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 486, 512 et 592 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué indique tout d'abord (page 3) qu'à l'audience où il a été prononcé, la Cour était composée de M. X..., faisant fonctions de président, assisté de MM. D... et A..., conseillers, ce dernier, présent lors des débats et du délibéré, ayant donné lecture de l'arrêt et l'ayant signé puis, in fine, qu'il a été signé "pour le président empêché", de sorte qu'en l'état de ces énonciations contradictoires, il n'est pas établi avec certitude que ce soit bien le conseiller ayant donné lecture de l'arrêt, par application des dispositions de l'article 485 du Code de procédure pénale, qui ait signé cette décision, conformément à l'article 486 du même Code" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. Delpeche, conseiller, qui a assisté aux débats et au délibéré, a donné lecture de l'arrêt et l'a signé par empêchement du président ;

Attendu que l'arrêt a été ainsi rendu conformément aux dispositions des articles 485 et 486 alinéa 3 du Code de procédure pénale ;

Que, dès lors, le moyen qui manque en fait, doit être écarté ;

8 Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6-3 c de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 417, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de renvoi des débats présentée par le prévenu dont l'avocat était dans l'impossibilité d'assurer sa défense devant la Cour ;

"au motif que cette affaire a déjà été renvoyée une fois à la demande du conseil du prévenu, la date de l'audience de renvoi ayant été fixée en fonction des dates préconisées par la défense ; qu'en outre, la seule présence de Me B... à Fort-de-France le 28 septembre 1992 est insuffisante pour justifier son absence à Toulouse le lendemain, 29 septembre, Me B... n'ayant donné aucune explication sur les raisons pour lesquelles il n'était plus disponible à une date qu'il avait lui-même préconisée lors du premier renvoi ;

"alors qu'en refusant ainsi le renvoi sollicité par le prévenu pour des raisons qui, au demeurant, ne lui étaient aucunement imputables et en le plaçant d'office devant l'alternative, soit d'assurer lui-même sa défense, soit d'être assisté par un avocat commis d'office, la Cour a violé le principe fondamental consacré par l'article 6-3 c de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales garantissant à tout accusé qui ne veut pas se défendre lui-même le droit à l'assistance d'un défendeur de son choix" ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que l'affaire a été évoquée à l'audience du 29 septembre 1992 et que Pierre Y..., prévenu comparant, a demandé le renvoi à une audience ultérieure en l'absence de son conseil ;

Attendu que, pour rejeter cette demande, la cour d'appel énonce que la cause a déjà été renvoyée une première fois au 29 septembre 1992, à la date proposée par le conseil du prévenu, que l'absence de ce conseil n'est pas justifiée et que le prévenu refuse l'assistance d'un avocat commis d'office qui lui est proposée ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a porté aucune atteinte aux droits de la défense et a satisfait aux exigences de l'article 6-3 c de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que le prévenu n'a pas cru devoir utiliser la faculté dont il disposait de se faire assister par un défenseur en l'absence du conseil de son choix défaillant ;

Qu'ainsi le moyen ne peut qu'être rejeté ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 585, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motif ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré irrecevable, par application des dispositions de l'article 385 du Code de procédure pénale, les exceptions de nullité soulevées par Pierre Y... ;

"au motif qu'il ressort des énonciations du jugement entrepris que Pierre Y... a fait soulever des exceptions de nullité fondées sur la présence au dossier pénal de mémoires extraits d'un dossier disciplinaire ; mais que cette exception a été présentée "en fin de défense au fond" et que c'est, dès lors, à juste titre que les premiers juges l'ont déclaré irrecevable ; que d'autre part, il ne résulte d'aucune énonciation du jugement ni des notes prises par le greffier à l'audience du 9 décembre 1991 que Pierre Y... ait soulevé ou fait soulever in limine litis des exceptions de nullité de la procédure tirées d'une violation du secret de l'instruction et de l'absence de réquisitoire saisissant le juge d'instruction des faits d'abus de confiance qui lui sont reprochés au préjudice de M. C... ; que la seule présence dans le dossier remis au tribunal correctionnel par l'avocat du prévenu de conclusions, non visées par le greffier, faisant état de ces nullités est insuffisante pour établir qu'elles ont été présentées avant toute défense au fond ; qu'elles sont présentées pour la première fois en cause d'appel et sont donc irrecevables ;

"alors que la Cour, qui a ainsi considéré que l'existence constatée par elle de conclusions, certes non visées par le greffier mais figurant dans le dossier remis aux premiers juges et soulevant diverses exceptions de nullité, ne constituait pas une preuve suffisante de ce que ces exceptions aient bien été soulevées in limine litis, sans même examiner le fait que les conclusions sur le fond se référaient à un mémoire annexe entête et concernant précisément les exceptions de nullité, n'a pas, en l'état de ces énonciations entachées d'insuffisance, établi avec certitude l'inobservation des dispositions de l'article 385 du Code pénal et, partant, l'irrecevabilité des exceptions de nullité soulevées par Pierre Y..." ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que pour déclarer irrecevables les nullités proposées par le prévenu, la cour d'appel énonce que la nullité tirée de la présence dans le dossier de mémoires de synthèse extraits d'une procédure disciplinaire, n'a été soulevée qu'après défense au fond devant les premiers juges et que pour les autres nullités invoquées elles n'ont pas été présentées avant toute défense au fond par des conclusions visées par le greffier du tribunal ;

Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des dispositions de l'article 385 du Code de procédure pénale ;

Que dès lors, le moyen doit être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 408 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Pierre Y... coupable d'abus de confiance ;

"au motif que, concernant l'affaire de la société du château d'Ax, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu la culpabilité du prévenu, qui n'a jamais expliqué pour quelle raison il n'avait reversé les sommes à sa cliente que par règlements successifs, alors qu'il était en mesure de tout reverser dès le 21 mai 1981 ; qu'il en est de même de l'affaire CEPME-Mme Denis, où Pierre Y... n'a, là non plus, jamais expliqué pour quelle raison il n'a, contrairement à ce qu'il aurait dû faire, versé des sommes à sa cliente en deux versements alors qu'il aurait pu reverser l'intégralité des sommes reçues dès le mois de février 1981, ni pour quelle raison il a attendu le mois de novembre 1985 pour régler le solde ; que pour les affaires Trésor public-société d'assurances Languedoc, La Préservatrice, il s'avère, sur le premier dossier, que Pierre Y... a reçu le paiement avant la phase aiguë de sa maladie ; qu'au mois d'octobre 1982, il n'avait toujours pas avisé le Trésor de ce paiement, qu'il ne l'a pas davantage fait après le mois de juin 1983 ; que pour le second dossier, le versement de la somme de 141 277,45 francs a été effectué au début de la phase aiguë de l'affection dont était atteint le prévenu ; que cependant, la Cour observe que cette somme était d'un montant important et l'altération de ses facultés physiques et mentales, n'étant pas absolue, est insuffisante pour expliquer que Pierre Y... n'ait pas prévenu et ait reversé tardivement, après mise en demeure en janvier 1986 ; que pour l'affaire Cols, si Pierre Y... a toujours soutenu et maintient devant la Cour qu'à la suite de nombreuses récriminations de son client, il a décidé de se faire taxer par le bâtonnier des honoraires qu'il estimait devoir réclamer à M. Z..., et l'en a avisé par lettre du 2 juin 1984, M. Z... a toujours soutenu n'avoir pas reçu cette lettre et aucune trace du dossier Cols n'a été retrouvée dans les archives du barreau de Béziers ; qu'enfin, pour l'affaire SARL Les Champs-Elysées, si Pierre Y... a toujours affirmé que les sommes de 10 000 et 15 000 francs lui avaient été adressées par Minet, à titre d'honoraires, celui-ci a toujours soutenu que ces sommes l'avaient été pour désintéresser partiellement ses créanciers et les faire patienter ; qu'aucune explication sérieuse n'a pu être donnée par le prévenu sur le remboursement à Minet de 6 850 francs d'honoraires ; qu'il y a donc bien eu détournement sur ce (

point ;

"alors que, d'une part, le détournement ou la dissimulation constitutive d'abus de confiance supposant une intervention de possession, autrement dit la volonté chez son auteur de contrevenir aux droits du propriétaire légitime, la Cour, qui en l'état de ces seules énonciations n'établissent à l'encontre de Y... que de simples carences dans l'exécution de sa mission, en l'occurence des retards dans la transmission de fonds dont il n'est même pas allégué qu'ils aient été utilisés à d'autres fins, n'a aucunement caractérisé l'élément matériel du délit d'abus de confiance et, par tant, n'a pas légalement justifié sa déclaration de culpabilité ;

"alors que, d'autre part, la charge de la preuve des éléments constitutifs d'une infraction incombant aux parties poursuivantes, la Cour, qui, pour retenir la culpabilité de Pierre Y... de son impossibilité à fournir des explications sur les retards dans la remise des fonds aux personnes auxquelles ils étaient destinés, a, en renversant ainsi la charge de la preuve, privé sa décision de base légale, d'autant que la Cour avait par ailleurs tenu pour acquis que pendant toute la période de la prévention, et notamment de 1982 à 1985, Pierre Y... avait souffert d'une x affection ayant réduit ses capacités de travail ;

"qu'enfin, concernant les deux affaires -Cols et SARL Les Champs-Elysées- la seule circonstance que Pierre Y... ait conservé par devers lui, à titre d'honoraires, des sommes remises par des clients prétendument à d'autres fins, ne saurait suffire à caractériser la prévention d'abus de confiance, en l'absence de toute constatation établissant de manière certaine qu'il connaissait la cause de ces remises et n'ignorait pas qu'il ne s'agissait, en aucune manière, des honoraires qui lui étaient dûs" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué partiellement reprises au moyen mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel les délits d'abus de confiance dont elle a déclaré le prévenu coupable et justifié l'allocation de dommages et intérêts à la victime ;

D'où il suit que le moyen qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que la valeur des éléments de preuve contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 92-85733
Date de la décision : 17/05/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6.3 c - Droit de l'accusé à l'assistance d'un défenseur de son choix - Absence du défenseur choisi - Audience fixée à la date indiquée par ce conseil - Droit de renvoi de l'affaire (non).


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 25 octobre 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 mai. 1993, pourvoi n°92-85733


Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:92.85733
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award