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12/05/1993 | FRANCE | N°89-44806

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 1993, 89-44806


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Bouygues, société anonyme dont le siège social est à Challenger, Saint-Quentin-en-Yvelines (Yvelines), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 juin 1989 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (Chambre sociale), au profit de M. Jean X..., demeurant ... (Réunion),

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 mars 1993, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Monboisse, conseille

r rapporteur, MM. Guermann, Saintoyant, Zakine, Ferrieu, Mme Ridé, M. Merlin, conseillers, M. ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Bouygues, société anonyme dont le siège social est à Challenger, Saint-Quentin-en-Yvelines (Yvelines), ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 14 juin 1989 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (Chambre sociale), au profit de M. Jean X..., demeurant ... (Réunion),

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 mars 1993, où étaient présents : M. Kuhnmunch, président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, MM. Guermann, Saintoyant, Zakine, Ferrieu, Mme Ridé, M. Merlin, conseillers, M. Aragon-Brunet, Mlle Sant, Mme Blohorn-Brenneur, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Monboisse, les observations de Me Blondel, avocat de la société Bouygues, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

! Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. X... a été, par contrat du 31 octobre 1984, engagé par la société Bouygues, en qualité de technicien, au service matériel, pour la durée d'un chantier à la Réunion ; qu'il a signé, par ailleurs, un avenant relatif à ses conditions de déplacement (logement meublé de fonction, véhicule de service et indemnité de grand déplacement) ; qu'à la suite d'un accident de travail, il a été en arrêt de travail à compter du 4 décembre 1986 ; qu'ayant refusé de restituer le logement et le véhicule, la société l'a licencié le 13 août 1987 pour faute grave ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier, le deuxième et le quatrième moyens réunis :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Bouygues à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, une somme à titre d'indemnité de préavis et une somme à titre d'indemnité de licenciement et d'avoir limité la condamnation de M. X..., au titre des frais de location du logement, à la somme de 52 465,93 francs afférente à la période du 13 août 1987 au 31 mai 1988, alors, selon le moyen, qu'en premier lieu, la voiture remise au salarié était un véhicule de service ou de fonction destiné à compenser les frais occasionnés par le travail ; que, dès lors que le contrat de travail était suspendu, ledit véhicule devait être restitué à l'employeur ; qu'en refusant, après plusieurs mises en demeure, de le restituer, alors surtout qu'il ne s'en servait pas, comme le soulignait la société dans ses conclusions d'appel, M. X... a commis une faute grave

apportant un trouble important à l'entreprise, privée d'un bien nécessaire à son fonctionnement ; que, par suite, conformément à l'article L. 122-32-2 du Code du travail, l'employeur était en droit de licencier le salarié pour faute grave au cours de la période de suspension du contrat de travail ; qu'ainsi, en condamnant la société Bouygues à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, au motif que le licenciement aurait été illicite, parce que, si le salarié avait commis une faute en ne restituant pas

le véhicule, cette faute n'était pas grave, la cour d'appel a violé les articles L. 122-32-2 et L. 122-32-7 du Code du travail ; alors qu'en deuxième lieu, le logement remis au salarié était un logement de "fonction" lié par définition à un travail effectif ;

que, dès lors que le contrat de travail était suspendu, ledit logement devait être restitué à l'employeur ; qu'en refusant, après plusieurs mises en demeure, de le restituer ou d'en payer les loyers, M. X... a commis une faute grave apportant un trouble important à l'entreprise ; que, par suite, conformément à l'article L. 122-32-2 du Code du travail, l'employeur était en droit de licencier le salarié au cours de la période de suspension du contrat de travail ; qu'ainsi, en condamnant la société Bouygues à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, au motif que le licenciement aurait été illicite, parce que le salarié n'aurait commis aucune faute en ne restituant pas le logement ou en refusant d'en payer les loyers, la cour d'appel a derechef violé les articles L. 122-32-2 et L. 122-32-7 du Code du travail ; alors, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-8 du Code du travail, l'indemnité de préavis n'est pas due au salarié en cas de faute grave ; que M. X... ayant commis deux fautes graves, l'une en refusant de restituer son véhicule de fonction, l'autre en refusant de restituer son logement de fonction, l'indemnité de préavis n'était pas due ; qu'en condamnant néanmoins la société à payer cette indemnité, la cour d'appel a violé l'article L. 122-8 du Code du travail ; alors, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-9 du Code du travail, l'indemnité de licenciement n'est pas due au salarié en cas de faute grave ; que M. X... a commis deux fautes graves, l'une en refusant de restituer son véhicule de fonction, l'autre en refusant de restituer son logement de fonction ; que, dès lors, l'indemnité de licenciement n'était pas due ; qu'en condamnant néanmoins la société à la payer, la cour d'appel a violé l'article L. 122-9 du Code du travail ; alors, en cinquième lieu, comme le demandait la société dans ses conclusions d'appel, les frais de location du logement devaient lui être payés à compter du 29 avril 1987 (exactement comme pour les frais de location du véhicule, ce qu'a admis pour ceux-ci la cour d'appel) et non à compter du 13 août 1987, date du licenciement de M. X..., dès lors que, comme on l'a vu, dans la deuxième branche du moyen de cassation, le refus par le salarié de restituer le logement de fonction constituait une faute grave comme le refus de restituer le véhicule de fonction (pour celui-ci, la cour d'appel a admis la faute, tout en l'estimant pas grave) ; qu'ainsi donc, l'accueil à intervenir du moyen en sa seconde branche (faute grave résultant de la non-restitution du logement le 28 avril 1987) doit entraîner, par voie de conséquence nécessaire et par

application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile, celle du chef visé en la présente branche du moyen ;

Mais attendu que la cour d'appel a, d'une part, relevé que le comportement du salarié qui, en cours d'une période de suspension du contrat de travail, refusait d'obtempérer à la demande de restitution du logement qui lui avait été alloué par le contrat au titre des conditions de déplacement, hors métropole, ne pouvait être qualifié d'acte d'insubordination ; que, d'autre part, elle a retenu que le refus de restituer le véhicule de service émanait d'un

salarié qui se trouvait dans un état "sub-dépressif et sinistrosique" ; qu'ainsi, la cour d'appel a fait ressortir que M. X... n'avait pas commis une violation délibérée des obligations découlant du contrat de travail ; qu'elle a légalement justifié sa décision ; que les moyens ne sont pas fondés ;

Mais sur le troisième et le cinquième moyens réunis :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que pour condamner la société Bouygues à payer à M. X..., outre une somme au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, avec la charge des dépens, une somme au titre de l'indemnité de grand déplacement d'avril à la mi-août 1987, à l'exception du mois de mai, les juges du fond ont relevé que la prime de grand déplacement fait partie du salaire contractuel, pendant le séjour à La Réunion ;

Qu'en statuant ainsi, sans préciser le fondement sur lequel l'employeur était tenu de verser la prime, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

! CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la condamnation à l'indemnité de grand déplacement et la condamnation aux dépens et à la somme due en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 14 juin 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause

et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 89-44806
Date de la décision : 12/05/1993
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (Chambre sociale), 14 juin 1989


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 1993, pourvoi n°89-44806


Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:89.44806
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