Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que la société Lener a chargé M. X..., membre de la SCP de conseil juridique X... Minne, de déposer un dossier à la préfecture ; que ce dossier avait pour objet de demander le bénéfice des dispositions de l'ordonnance n° 82-204 du 1er mars 1982 relative à la prise en charge par l'Etat de certaines cotisations de sécurité sociale dans les entreprises industrielles des secteurs du textile et de l'habillement et de son décret d'application n° 82-340 du 16 avril 1982 ; que la demande, n'ayant pas été présentée par M. X... avant la date limite impartie du 31 décembre 1982, n'a pu être examinée ; que la société Lener a estimé qu'elle avait en conséquence subi un préjudice dû à la faute de son conseil juridique assuré auprès de la société Via Assurances Nord et Monde ; que la cour d'appel (Douai, 30 octobre 1989), a débouté la société Lener de son action en responsabilité au motif qu'il n'y avait pas de préjudice réparable dès lors que le régime d'aide institué par l'ordonnance du 1er mars 1982 avait été reconnu contraire au droit communautaire ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : (sans intérêt) ;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société Lener reproche encore à la cour d'appel d'avoir statué comme elle a fait alors que, selon le moyen, d'une part, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale dès lors que la question posée était, non pas de savoir si cette société pouvait bénéficier de l'aide déclarée incompatible avec le marché commun par la décision de la Commission des Communautés économiques européennes du 12 janvier 1983, et cela postérieurement à la date d'effet de cette décision, mais si la négligence du conseil juridique consistant à ne pas avoir déposé le dossier à un moment où cette aide était encore licite, n'avait pas causé un préjudice à son mandant en lui faisant perdre le bénéfice de cette aide que, malgré la décision de la Commission, l'Etat français avait continué à octroyer pendant 2 ans aux entreprises ayant souscrit un contrat avant le 31 décembre 1982 ; alors que, d'autre part, le caractère illicite de la cause du mandat doit s'apprécier au moment de sa formation et que, par suite, la cour d'appel ne pouvait exciper du caractère illicite de la cause de ce contrat conclu à un moment où le régime d'aide était encore licite ; et alors que, enfin, les juges du second degré ont privé leur décision de base légale en ne recherchant pas si la société ne pouvait pas au moins être dédommagée des aides dont elle avait été privée jusqu'à la prise d'effet de la décision de la Commission ;
Mais attendu que la cour d'appel relève que le régime d'aide institué par l'ordonnance du 1er mars 1982 a été déclaré incompatible avec le marché commun au sens de l'article 92 du traité CEE par une décision de la Commission des Communautés européennes du 12 janvier 1983 qui a mis le Gouvernement français en demeure de supprimer ce régime d'aide dans le mois de la notification de la décision, qui a eu lieu le 21 janvier 1983 et que, par un communiqué du 23 février 1983, ce Gouvernement à précisé que le régime serait appliqué de façon dégressive pour la deuxième et dernière année ; que les juges du second degré retiennent que, par un arrêt du 15 novembre 1983, la Cour de justice des Communautés européennes a jugé qu'en ne se conformant pas, dans le délai imparti, à cette décision de la Commission, la République française a manqué à une obligation qui lui incombait en vertu du Traité ;
Attendu que les juges d'appel en ont exactement déduit qu'en vertu de la primauté du droit communautaire le régime d'aide " quoique résultant de textes législatifs ou réglementaires français devait être considéré comme illicite... par les juridictions françaises " et que, si le conseil juridique a commis une faute, il n'y a pas de préjudice réparable dès lors qu'indemniser la société conduirait à tenir pour licite un régime d'aide déclaré contraire aux règles communautaires ; que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut donc être accueilli en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.