LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jacky Y..., demeurant ... (Indre),
en cassation d'un arrêt rendu le 16 novembre 1990 par la cour d'appel de Bourges (chambre sociale), au profit de :
18) la société Moore Paragon, société anonyme, dont le siège est ... (Indre),
28) la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre, dont le siège est ... (Indre),
38) la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales d'Orléans, dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 11 mars 1993, où étaient présents :
M. Kuhnmunch, président, M. Pierre, conseiller rapporteur, MM. Lesire, Vigroux, Berthéas, Lesage, Favard, conseillers, Mmes X..., A..., M. Choppin Z... de Janvry, conseillers référendaires, M. Chambeyron, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Pierre, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat pour M. Y..., les conclusions de M. Chambeyron, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 233-4 du Code du travail ; Attendu que, le 14 novembre 1986, M. Y..., salarié de la société Moore Paragon, a été blessé par la bobineuse à papier sur laquelle il travaillait, sa main droite ayant été happée par la bobine, puis coincée entre celle-ci et le cylindre du chariot ; Attendu que, pour dire que l'accident n'était pas dû à une faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt attaqué énonce que celui-ci n'avait fait que choisir l'un des trois procédés de fonctionnement agréés par l'administration et normalement prévus pour le type de bobineuse où il venait d'affecter M. Y... et que, par ailleurs, ce dernier, en dépit de son expérience, avait commis une faute en passant sa main au-dessus et non en dessous du papier, la plaçant ainsi à proximité du point de contact entre les rouleaux ; Attendu, cependant, qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que le procédé de fonctionnement imposé par l'employeur avait pour effet de
supprimer le faisceau lumineux qui constituait le
seul dispositif de sécurité installé sur la machine, en sorte que, pour se conformer aux règles édictées par l'article L. 233-4 du Code du travail, l'employeur n'avait d'autre solution que de mettre en place, comme il l'a d'ailleurs fait après l'accident, un dispositif de protection empêchant la main d'être coincée entre le rouleau du chariot et la bobine ; que l'homologation de la machine litigieuse par l'administration ne dispensant pas l'employeur de ses obligations de sécurité et de surveillance, celui-ci aurait du avoir conscience du danger auquel il exposait la victime ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 novembre 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ; Condamne la société Moore Paragon, la CPAM de l'Indre et la DRASS d'Orléans, envers M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Bourges, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du six mai mil neuf cent quatre vingt treize.