Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'avec l'autorisation du directeur des centres Les Marronniers et Les Catalpas, M. Luc X... a réalisé un film intitulé Décompte de la folie ordinaire concernant la vie de jeunes adultes handicapés mentaux, hébergés dans ces centres, gérés par l'association ADEJAH, à laquelle a succédé l'association ARSEAA ; que les pensionnaires de ces établissements étaient, pour la plupart, placés sous le régime de la gérance de tutelle, confiée à l'ADEJAH ; qu'après avoir été projeté dans le milieu médico-social, le film devait être diffusé par les chaînes de télévision FR3 et La Sept ; que l'ARSEAA a demandé au juge des référés, sur le fondement de l'article 9, alinéa 2, du Code civil, le retrait de cette diffusion ; que l'arrêt attaqué (Toulouse, 15 janvier 1991) a fait droit à la demande ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, que les mesures prévues par l'article 9, alinéa 2, du Code civil ne peuvent être ordonnées en référé que dans le seul cas d'une intrusion dans la vie privée qui porte atteinte à l'intimité de celle-ci ; qu'en se bornant à relever que les adultes handicapés ont été filmés dans le cadre de leur vie quotidienne sans préciser en quoi le film portait atteinte à leur vie privée en présentant des images ayant le caractère d'intimité prévu par l'article 9 du Code civil et sans rechercher si une telle atteinte était intolérable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce texte ; et alors, d'autre part, que la limitation par l'article 500 du Code civil des pouvoirs du gérant de tutelle ne fait pas obstacle à ce que celui-ci puisse -par application des dispositions combinées des articles 450 et 495 du même Code- valablement consentir à certains actes à caractère personnel de la vie courante du majeur protégé, telle que l'autorisation de diffuser son image filmée ; qu'ainsi, en décidant que le gérant de tutelle ne disposait pas du droit de consentir à cette autorisation, la cour d'appel a violé l'article 500 du Code civil, par fausse application, et les articles 450 et 495 du même Code, par refus d'application ; et alors, enfin, qu'il appartenait à l'ARSEAA, qui invoquait le défaut de validité de l'autorisation globale donnée par l'ADEJAH, d'établir la présence dans le film de pensionnaires dont le représentant légal n'avait pas donné son autorisation ; qu'en déclarant que le réalisateur ne justifiait pas d'une autorisation, portant sur la réalisation du film et sa diffusion, de tous les représentants légaux des pensionnaires filmés sans constater la présence dans le film d'incapables majeurs dont les représentants légaux n'auraient pas donné une telle autorisation, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que la reproduction d'images représentant des handicapés mentaux dans l'intimité de leur existence quotidienne à l'intérieur des établissements où ils vivent et ce, sans l'autorisation de leurs représentants légaux constitue, à elle seule, une atteinte illicite à l'intimité de leur vie privée ;
Attendu, ensuite, que l'arrêt énonce à bon droit que le gérant de tutelle ne peut accomplir, seul, les actes relatifs à la personne du majeur protégé, tel celui de consentir à la reproduction de son image, et qu'il lui appartient, à cet effet, conformément à l'article 500, alinéa 2, du Code civil, de saisir le juge des tutelles qui pourra soit l'autoriser à faire ces actes et éventuellement sous les conditions qu'il déterminera, soit décider de constituer une tutelle complète ; que, dès lors, ayant relevé que l'ADEJAH avait donné son accord à la réalisation et à la diffusion du film sans y avoir été autorisée par le juge des tutelles, la cour d'appel, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi .