LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jacques X..., demeurant 10, avenue du Dauphiné à Mitry-Mory (Seine-et-Marne),
en cassation d'un arrêt rendu le 2 juin 1989 par la cour d'appel de Paris (21e chambre, section C), au profit de M. Jean-Yves Y..., pris ès qualités de syndic à la liquidation des biens de la société Cogepeint, demeurant ... (1er),
défendeur à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 décembre 1992, où étaient présents :
M. Kuhnmunch, président, M. Boittiaux, conseiller rapporteur, M. Boubli, conseiller, Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Boittiaux, les observations de la SCP Desaché etatineau, avocat de M. X..., de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de M. Y..., ès qualités, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 1989), M. X..., directeur général de la société Cogepeint, devenu président-directeur général et détenteur de la majorité des actions, a démissionné de ses fonctions d'administrateur et de président-directeur général le 14 décembre 1984, et a cédé ses actions ; que, le 17 décembre 1984, un contrat était établi, prévoyant qu'il exercerait, à plein temps, pour une période de six mois pour permettre la transmission des pouvoirs, et à temps partiel au-delà de cette période pour exercer des fonctions commerciales et techniques ; qu'après la mise en liquidation des biens de la société, le 3 avril 1985, M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir que soient fixées ses créances salariales ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes en l'absence de contrat de travail le liant à la société au moment de la mise en liquidation de celle-ci, alors que, selon le moyen, il ressortait des dispositions claires et précises de la convention litigieuse que la nécessité d'assurer la transmission des pouvoirs avait déterminé les parties à préciser que "dans une première période, la fonction de M. X... sera assurée à temps plein" et "qu'après cette période, la fonction de M. X... sera exercée à temps partiel" ; qu'il s'ensuivait que ce n'était nullement le maintien de prérogatives anciennement attachées à son mandat social qui devait permettre la transmission des pouvoirs et la continuité de
l'entreprise durant cette période, mais la présence permanente et effective de M. X... à son poste de directeur commercial ; qu'en statuant sans avoir égard à ces dispositions claires et précises de la convention des parties, qui lui donnaient tout son sens, la cour d'appel l'a dénaturée et a violé l'article 1134 du Code civil ; et alors que le juge ne peut écarter la qualification de contrat de travail en se fondant sur les seules stipulations figurant dans la convention des
parties, sans rechercher si les conditions de fait dans lesquelles était exercée l'activité de la partie qui l'invoque permettaient ou non de caractériser l'existence d'un lien de subordination ; qu'en se bornant à affirmer que la nécessité d'une "transmission de pouvoirs" souhaitée par les parties à la convention était exclusive d'un lien de subordination, sans rechercher si, dans l'exercice effectif de ses fonctions durant la première période d'exécution du contrat, M. X... était ou non intervenu dans la gestion ou l'administration générale de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-1 et L. 122-6 du Code du travail ; alors qu'enfin, en toute hypothèse, l'exercice par un administrateur dont le mandat a pris fin de certaines fonctions de gestion ou d'administration n'est pas incompatible avec la fonction de directeur commercial qu'il exerce par ailleurs, dès lors, qu'elles sont purement occasionnelles et ponctuelles ; qu'en l'espèce, les premiers juges avaient encore relevé que si M. X... pouvait exercer par délégation de président-directeur général certaines fonctions incombant à ce dernier, "c'est occasionnellement et de façon ponctuelle, de sorte qu'il ne peut être soutenu que de telles délégations sont exclusives d'un contrat de travail" ; qu'en affirmant que la nécessité d'une "transmission de pouvoirs" souhaitée par les parties au contrat était exclusive de l'existence d'un tel contrat, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... n'exerçait pas ses activités de direction de façon occasionnelle et ponctuelle, et donc dans des conditions parfaitement compatibles avec un contrat de travail, la cour d'appel a privé à nouveau sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 122-1 et L. 122-6 du Code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel, procédant à l'interprétation nécessaire des clauses du contrat du 17 décembre 1984, a jugé que, durant les six premiers mois, M. X... conservait la direction effective de l'entreprise et exerçait ses fonctions sans être lié à la société par un lien de subordination ; qu'elle a pu décider qu'aucun contrat de travail n'existait entre M. X... et la société lors de la liquidation des biens ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;