La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/1992 | FRANCE | N°90-19980

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 décembre 1992, 90-19980


.

Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société des Etablissements Taunay a été mise en redressement judiciaire sans avoir payé le prix d'engrais livrés par la société anonyme Norsk-hydro-azote (société NHA) ; que celle-ci, invoquant une clause de réserve de propriété, a revendiqué ces biens et a subsidiairement demandé une expertise comptable aux fins de déterminer si elle était le seul fournisseur de ce produit et d'en rechercher les sous-acquéreurs ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société NHA fait grief à l'ar

rêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, qu'aucune règle n'impose au vende...

.

Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société des Etablissements Taunay a été mise en redressement judiciaire sans avoir payé le prix d'engrais livrés par la société anonyme Norsk-hydro-azote (société NHA) ; que celle-ci, invoquant une clause de réserve de propriété, a revendiqué ces biens et a subsidiairement demandé une expertise comptable aux fins de déterminer si elle était le seul fournisseur de ce produit et d'en rechercher les sous-acquéreurs ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que la société NHA fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, qu'aucune règle n'impose au vendeur de marchandises grevées d'une réserve de propriété de faire l'avance du coût de l'inventaire ; qu'il appartient à l'administrateur de faire dresser cet inventaire et qu'à défaut, il doit supporter le risque de l'impossibilité où il se trouve de rapporter la preuve - qui lui incombe - que les marchandises revendiquées et livrées avant l'ouverture de la procédure collective n'existaient plus en nature à la date du jugement d'ouverture ; que la cour d'appel a donc violé les articles 27 et 121 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la formalité de l'inventaire constitue une simple faculté laissée à l'appréciation du juge-commissaire, et non de l'administrateur qui n'a pas à y procéder d'office ; qu'ainsi, le vendeur de marchandises livrées antérieurement au prononcé du redressement judiciaire ne peut invoquer le bénéfice d'une clause de réserve de propriété régulièrement convenue qu'en prouvant l'identité entre les marchandises livrées et celles existant au jour du jugement d'ouverture ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en ses deuxième et quatrième branches :

Vu les articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que, pour refuser la mesure d'expertise sollicitée, l'arrêt énonce que les marchandises livrées avaient en grande partie disparu et qu'elles étaient en général directement remises aux clients des Etablissements Taunay ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la revente, avant le jugement d'ouverture, de certaines marchandises demeurées en leur état initial ne fait pas obstacle, sous réserve de leur identification, à la revendication qui porte alors sur la créance du prix dû par les sous-acquéreurs, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 16 et 783 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'expertise présentée par la société NHA, la cour d'appel énonce qu'il existait une pluralité incontestable de fournisseurs des Etablissements Taunay pour le même engrais ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'en réponse à l'allégation des Etablissements Taunay qui avaient fait valoir que la société NHA n'était pas le fournisseur exclusif, cette société, d'un côté, avait soutenu, dans ses écritures, qu'elle avait été, pendant la période de livraison considérée, le seul fournisseur des Etablissements Taunay pour le produit revendiqué, et, d'un autre côté, pour mettre fin à toute équivoque, avait sollicité une mesure d'expertise, la cour d'appel, qui, en l'absence de tout élément de preuve, n'a pu constater la pluralité de fournisseurs qu'en se fondant sur les pièces transmises postérieurement à la clôture des débats, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 juin 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 90-19980
Date de la décision : 15/12/1992
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Revendication - Marchandises livrées au débiteur - Revente par celui-ci - Revendication de deniers - Conditions - Existence de la marchandise en nature au jour de l'ouverture de la procédure collective.

1° La revente avant le jugement d'ouverture de la procédure collective de marchandises livrées au débiteur avec réserve de propriété ne fait pas obstacle, sous réserve de leur identification, à la revendication qui porte alors sur la créance du prix dû par le sous-acquéreur.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Revendication - Marchandises livrées au débiteur - Conditions - Existence en nature - Preuve - Inventaire - Etablissement par l'administrateur - Ordonnance du juge-commissaire le prescrivant - Nécessité.

2° La preuve de l'identité entre les marchandises livrées avec réserve de propriété antérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire de l'acquéreur et celles existant à la date du jugement incombe au vendeur, la formalité de l'inventaire étant laissée à l'appréciation du juge-commissaire et non de l'administrateur qui n'a pas à y procéder d'office.


Références :

Loi 85-98 du 25 janvier 1985

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 28 juin 1990

DANS LE MEME SENS : (1°). Chambre commerciale, 1988-03-08 , Bulletin 1988, IV, n° 99, p. 69 (cassation)

arrêt cité. A RAPPROCHER : (2°). Chambre commerciale, 1991-04-09 , Bulletin 1991, IV, n° 130, p. 93 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 déc. 1992, pourvoi n°90-19980, Bull. civ. 1992 IV N° 412 p. 291
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 IV N° 412 p. 291

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :Mme Piniot
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Tricot
Avocat(s) : Avocats :MM. Barbey, Roger.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.19980
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award