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17/11/1992 | FRANCE | N°90-20299

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 novembre 1992, 90-20299


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Attendu, selon l'arrêt déféré, que M. Y... a dirigé en fait la société anonyme FDGM depuis la démission de Mme X... de ses fonctions de président du conseil d'administration et celle de M. X... de son poste d'administrateur, ces démissions et la nomination par le conseil d'administration de M. Y... en qualité de président directeur général n'ayant jamais été publiées ;

Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches :

Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que pour condamner M. Y... à payer la total

ité de l'insuffisance d'actif constatée après la liquidation judiciaire de la société, la co...

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Attendu, selon l'arrêt déféré, que M. Y... a dirigé en fait la société anonyme FDGM depuis la démission de Mme X... de ses fonctions de président du conseil d'administration et celle de M. X... de son poste d'administrateur, ces démissions et la nomination par le conseil d'administration de M. Y... en qualité de président directeur général n'ayant jamais été publiées ;

Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches :

Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que pour condamner M. Y... à payer la totalité de l'insuffisance d'actif constatée après la liquidation judiciaire de la société, la cour d'appel retient qu'il résulte des éléments du dossier que M. Y... qui, travaillant dans la société, ne pouvait ignorer sa situation puisqu'ayant racheté les parts des époux X... pour un franc, a pris en charge en septembre 1986 une société déficitaire et que, loin de déposer le bilan, il a continué sciemment son exploitation jusqu'au " dépôt du bilan " en juin 1987 révélant un état de cessation des paiements tellement irrémédiable que le tribunal de commerce a prononcé très rapidement la liquidation judiciaire ; que la cour d'appel retient encore que si M. Y... soutient que l'accroissement du passif résulte des fautes de gestion et des abus de biens sociaux commis antérieurement par M. X..., il ne précise pas quelles seraient ces fautes de gestion et ne prouve pas l'abus de biens sociaux ; qu'enfin, l'arrêt relève que M. Y... ne fournit aucune explication sur le défaut de comptabilité régulière tandis que les premiers juges, dont la décision a été confirmée sur ce point, avaient relevé que l'absence de comptabilité régulière est sans aucun doute le premier motif de l'insuffisance d'actif ;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs impropres à caractériser les fautes de gestion commises par M. Y... et à constater en quoi elles ont contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche :

Vu l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu qu'après avoir constaté que l'insuffisance d'actif s'élève à une certaine somme, l'arrêt, d'un côté, condamne M. Y... à supporter la totalité de cette insuffisance et, de l'autre, condamne les époux X... à supporter cette insuffisance à concurrence de 50 000 francs ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans préciser que l'obligation faite à M. Y... de contribuer à l'insuffisance d'actif sera limitée à une somme correspondant au montant de cette insuffisance, déduction faite de la somme de 50 000 francs, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l'article 188 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que pour prononcer la faillite personnelle de M. Y... pour une durée de 15 ans, la cour d'appel retient que le Tribunal a relevé à juste titre, à partir du rapport du liquidateur, que deux des faits prévus à l'article 187 de la loi du 25 janvier 1985 étaient établis à l'encontre de M. Y..., c'est-à-dire la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire ne pouvant conduire qu'à la cessation des paiements et l'absence de comptabilité régulière ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le prononcé de la faillite personnelle d'un dirigeant de fait d'une personne morale ne peut intervenir que s'il a commis l'un des actes mentionnés à l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses quatre branches :

Vu l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que pour prononcer le redressement, puis la liquidation judiciaire de M. Y..., la cour d'appel se borne à énoncer qu'il ressort des motifs ci-dessus que les dispositions de l'article 182-4° et 5° sont applicables à M. Y... ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, par une affirmation générale, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

Et sur le moyen relevé d'office après avertissement donné aux parties :

Vu les articles 180, 181 et 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que si l'action en comblement de l'insuffisance d'actif prévue à l'article 180 peut entraîner l'ouverture d'un redressement judiciaire du dirigeant défaillant dans les conditions fixées à l'article 181, une même décision judiciaire ne peut entrer en voie de condamnation de ce chef, dès lors qu'elle prononce le redressement judiciaire du dirigeant en application de l'article 182, mesure qui, en raison de la confusion entre le passif personnel et le passif social, rend sans objet la condamnation à supporter tout ou partie du passif social ;

Attendu que l'arrêt, en condamnant M. Y... à payer l'insuffisance d'actif de la société FDGM et en prononçant à son égard le redressement judiciaire en vertu de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions concernant M. Y..., l'arrêt rendu le 2 novembre 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 90-20299
Date de la décision : 17/11/1992
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Faute de gestion - Constatations nécessaires.

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Faute de gestion - Lien de causalité avec l'insuffisance d'actif - Constatations nécessaires.

1° Sont impropres à caractériser l'existence d'une faute de gestion d'un dirigeant social ayant contribué à l'insuffisance d'actif les motifs par lesquels une cour d'appel retient, pour appliquer les dispositions de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, que ce dirigeant a pris en charge la société en connaissance de sa situation déficitaire, qu'il en a poursuivi sciemment l'exploitation jusqu'à la cessation des paiements, dont l'état s'est révélé irrémédiable, qu'il ne s'explique pas sur le défaut de comptabilité régulière et qu'enfin il ne prouve pas que l'insuffisance d'actif est due à des fautes de gestion d'anciens dirigeants.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Condamnation - Montant - Premier dirigeant - Totalité de l'insuffisance d'actif - Second dirigeant - Condamnation partielle - Diminution correspondante de l'obligation du premier - Nécessité.

2° Viole l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 la cour d'appel qui condamne un dirigeant à supporter la totalité de l'insuffisance d'actif de la personne morale et un autre à en payer une partie, sans préciser que l'obligation de contribuer du premier en sera diminuée d'autant.

3° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Faillite personnelle et autres mesures d'interdiction - Faillite personnelle - Cas - Dirigeant d'une personne morale - Cas prévu à l'article 187 de la loi (non).

3° Viole l'article 188 de la loi du 25 janvier 1985 la cour d'appel qui prononce la faillite personnelle du dirigeant d'une personne morale pour des cas prévus à l'article 187 de la même loi, et non à l'article 182.

4° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Redressement judiciaire - Cas - Motifs - Contrôle de la Cour de Cassation.

4° Ne met pas la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle la cour d'appel qui prononce le redressement puis la liquidation judiciaire du dirigeant d'une personne morale en se bornant, par une affirmation générale, à énoncer qu'il ressort des motifs " ci-dessus " que les dispositions de l'article 182-4° et 5° sont applicables à ce dirigeant.

5° ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Condamnation - Décision prononçant également le redressement judiciaire - Impossibilité.

5° Une même décision judiciaire ne peut à la fois condamner le dirigeant d'une personne morale en redressement judiciaire à supporter l'insuffisance d'actif et prononcer à son égard le redressement judiciaire en vertu de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985.


Références :

Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 180
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 182 4, 5
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 188, art. 187, art. 18

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 02 novembre 1989


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 nov. 1992, pourvoi n°90-20299, Bull. civ. 1992 IV N° 359 p. 255
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1992 IV N° 359 p. 255

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bézard
Avocat général : Avocat général :M. Curti
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Tricot
Avocat(s) : Avocat :la SCP de Chaisemartin et Courjon.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1992:90.20299
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