LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE,
a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Ligue française de l'enseignement et de l'éducation permanente, dont le siège social est ..., Cédex 07,
en cassation d'un jugement rendu le 24 mars 1989 par le conseil de prud'hommes de Poitiers (Section activités diverses), au profit de M. Pol X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 juin 1992, où étaient présents :
M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bèque, conseiller rapporteur, M. Pierre, conseiller, Mme Kermina, conseiller référendaire, M. de Caigny, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Bèque, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la Ligue française de l'enseignement et de l'éducation permanente, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; ! Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Poitiers, 24 mars 1989), que M. X... a été engagé le 1er novembre 1983 par l'office régional des oeuvres laïques d'éducation par l'image et le son de Poitiers (l'office) en qualité de vérificateur de film pour assurer la diffusion de films non commerciaux ; qu'en raison des difficultés rencontrées par l'office, la Ligue française de l'enseignement et de l'éducation permanente (la ligue) a décidé de reprendre elle-même cette activité de diffusion et a embauché M. X... à compter du 1er janvier 1987 ; que le salarié a été par la suite licencié pour motif économique le 29 février 1988 ; Attendu que la ligue fait grief au jugement de l'avoir condamnée à payer à M. X... des indemnités de rupture tenant compte d'une ancienneté remontant à son engagement au service de l'office, alors, selon le moyen, que, d'une part, pour qu'il y ait modification de la situation juridique de l'employeur au sens de l'article L. 122-12 du Code du travail, il faut non seulement qu'il existe un lien de droit entre les employeurs successifs, mais il faut également et surtout que ce lien de droit soit de nature à entraîner un transfert d'"entreprise" ; qu'en décidant que l'article L. 122-12 du Code du travail était en l'espèce applicable, sans avoir recherché ni constaté l'existence d'un tel lien de droit entre l'office et la ligue, le conseil de
prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-12 du Code du travail ; alors que, d'autre part, le "transfert d'entreprise" constitutif de la modification de la situation juridique de l'employeur au sens de l'article L. 122-12 du Code du travail implique nécessairement l'existence d'une unité de production ou de travail qui subsiste et dont l'exploitation ou la propriété soit susceptible d'être transférée, qui ne saurait être déduite de la seule constatation qu'un salarié déterminé a été reconduit dans ses fonctions ; qu'en affirmant que, dès lors que M. X... avait été reconduit dans ses fonctions pour effectuer un travail identique à celui qu'il exerçait auparavant à l'office, il y avait eu continuation de l'activité au sens de l'article L. 122-12 du Code du travail, le conseil de prud'hommes a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-12 du Code du travail ; Mais attendu que les juges du fond ont constaté qu'en passant du service de l'office au service de la ligue, M. X... avait continué le même travail, avec les mêmes moyens matériels ; qu'ils ont ainsi fait ressortir qu'avait été transférée une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité avait été poursuivie ou reprise ; que, dès lors, ils ont décidé à bon droit que l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail devrait recevoir application ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;