LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Pierre S.,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 janvier 1990 par la cour d'appel de Lyon (2e chambre), au profit de Mme Joséphine E., épouse S.,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience du 13 avril 1992, où étaient présents :
M. Dutheillet-Lamonthézie, président, M. Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, M. Chabrand, conseiller, M. Tatu, avocat général, Mme Rouquet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Bonnet, les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. S., de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de Mme S., les conclusions de M. Tatu, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé le divorce des époux S.-E. aux torts du mari,
alors que, d'une part, l'introduction de la demande en divorce ne confère pas aux époux, encore dans les liens du mariage, une immunité destituant de leurs effets normaux les offenses dont ils peuvent se rendre coupables ;
qu'en déniant tout caractère de gravité au fait d'abandon du domicile conjugal établi à l'encontre de la femme pour la seule raison qu'il apparaissait proche de la date de sa requête en divorce, la cour d'appel aurait violé l'article 242 du Code civil ;
alors que, d'autre part, à supposer que les juges du fond eussent entendu justifier l'absence de faute à la charge de la femme par le fait qu'elle avait été autorisée à résider séparément, il s'évinçait cependant des termes restrictifs de l'ordonnance de non-conciliation qu'elle avait l'obligation de fixer chez son père sa résidence provisoire ;
qu'en s'abstenant de rechercher si, en trouvant à résider ailleurs en qualité de gardienne rémunérée, l'épouse n'avait pas manifesté sans équivoque sa volonté de rompre toute vie commune avec son époux, cela quelle que fût l'issue du litige, la cour d'appel n'aurait pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 242 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que l'épouse a quitté le domicile conjugal pour aider sa mère malade et que, s'il est démontré qu'elle
est ensuite devenue salariée pour le compte d'une société d'Habitations à loyers modérés, le caractère fautif de ce départ n'est pas établi ;
qu'ainsi, la cour d'appel a usé de son pouvoir souverain pour apprécier le caractère fautif des faits allégués par le mari et légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné le mari à verser à son épouse une prestation compensatoire, alors que, d'une part, en se bornant à prendre en considération la situation du mari à un moment où il était encore en activité, tout en ayant constaté qu'à la date de sa décision il était retraité, la cour d'appel aurait violé les articles 270 et 271 du Code civil ;
alors que, d'autre part, en se bornant à énoncer que l'épouse exerçait la profession de gardienne rémunérée, sans pour autant préciser le montant de ses revenus, faisant ainsi droit à sa demande de prestation compensatoire au seul vu de ses charges, la cour d'appel aurait privé sa décision de toute base légale au regard des articles 271 et 272 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que le mari a reçu des sommes à titre de pension ;
que la cour d'appel a ainsi tenu compte de sa situation de retraité au moment où elle statuait, sans avoir à indiquer le montant des revenus de l'épouse, dont elle a tenu compte des besoins en indiquant les éléments sur lesquels elle se fondait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;