LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Ghislaine, Nicole, Lydie Y..., née A..., demeurant ..., La Roche-sur-Yon (Vendée),
en cassation d'un arrêt rendu le 7 février 1990 par la cour d'appel de Poitiers (Chambre civile, Section 2), au profit de Mme Gisèle B..., née Z..., demeurant ..., La Roche-sur-Yon (Vendée),
défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 31 mars 1992, où étaient présents :
M. Massip, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Grégoire, conseiller rapporteur, M. X... de Saint-Affrique, conseiller, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Grégoire, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat de Mme Y..., de Me Garaud, avocat de Mme B..., les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Vu l'article 1147 du Code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes Y... et B..., médecins gynécologues à La Roche-sur-Yon, ont conclu en 1981 un contrat d'association stipulé résiliable unilatéralement avec préavis de six mois ; qu'elles ont en outre constitué entre elles une société civile de moyens ; que, le 26 mars 1984, Mme Y... a déclaré son intention de se retirer de l'association à compter du 30 septembre 1984 ; qu'un litige a opposé les parties relativement à la liquidation de la société de moyens, à la prétention de Mme Y... au paiement d'une indemnité de clientèle et à la violation par Mme Y... de la clause contractuelle de non-concurrence, au mépris de laquelle elle a installé son nouveau cabinet à La Roche-sur-Yon ; que la cour d'appel a condamné Mme Y... à payer à Mme B... trois sommes, représentant sa part du passif de la société, le préjudice matériel inhérent à sa réinstallation et le préjudice moral subi par Mme B... ; qu'elle a également débouté Mme Y... de sa demande d'indemnité de clientèle ; Attendu qu'à l'appui de ces condamnations, l'arrêt énonce que Mme Y... est "responsable de la résiliation", dont le caractère
fautif est manifeste en raison de ses manquements à ses obligations contractuelles, de son comportement pendant le délai de préavis et de sa réinstallation illicite ; qu'en se déterminant par de tels motifs, alors qu'elle avait constaté qu'en résiliant le contrat d'association, Mme Y... n'avait fait qu'user de la faculté discrétionnaire qui lui était ouverte, quelles que soient par ailleurs les conséquences des fautes qu'elle avait pu commettre à l'égard de son confrère, antérieurement ou postérieurement à la rupture de leurs relations, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 février 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ; Condamne Mme B..., envers Mme Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Poitiers, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt cinq mai mil neuf cent quatre vingt douze.