LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Claude Y..., demeurant "Tivoli", ..., Le Cannet (Alpes-Maritimes),
en cassation d'un arrêt rendu le 18 mai 1989 par la cour d'appel de Paris (18ème chambre E), au profit de la société anonyme Vandelet et compagnie, dont le siège social est sis à Paris (10ème), 5, place du Colonel Fabien, prise en la personne de ses président directeur général, administrateurs et représentants légaux en exercice domiciliés audit siège,
défenderesse à la cassation ; LA COUR, en l'audience publique du 7 avril 1992, où étaient présents :
M. Saintoyant, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, MM. Lecante, Waquet, Renard-Payen, Boittiaux, Bèque, conseillers, Mme X..., MM. Bonnet, Laurent-Atthalin, Mmes Pams-Tatu, Kermina, conseillers référendaires, M. Kessous, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Bonnet, les observations de Me Choucroy, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-14-3 du Code du travail et l'article L. 321-9, alors en vigueur, du même code ; Attendu qu'il résulte de ces textes qu'il appartient au juge judiciaire d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs d'un licenciement, hormis le cas où, le motif étant d'ordre économique, l'appréciation ressortit à la compétence de l'autorité administrative ; Attendu que pour débouter M. Y..., salarié licencié pour motif économique par la société Vandelet et compagnie le 8 mars 1980, avec une autorisation administrative ultérieurement annulée par le Conseil d'Etat selon arrêt du 25 novembre 1987, de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a énoncé que l'annulation de l'autorisation, au motif d'une erreur de droit commise par le directeur adjoint du travail, ne saurait, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, justifier une demande indemnitaire dirigée à l'encontre de l'employeur, que si le salarié rapporte la preuve d'une fraude commise par celui-ci à l'égard du directeur départemental du travail ; qu'en l'espèce la preuve de cette fraude n'est pas rapportée ; Qu'en statuant ainsi, alors que l'annulation de l'autorisation administrative ne laissait rien subsister de celle-ci, de sorte qu'il
appartenait au juge judiciaire, saisi de la demande d'indemnité, d'excercer son pouvoir d'appréciation du caractère réel et sérieux, au sens de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, de la cause du licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Condamne la société Vandelet et compagnie, envers M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ; Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt mai mil neuf cent quatre vingt douze.